La manifestation du 1er juillet a été un vrai succès : entre 8 000 et 10 000 personnes se sont rassemblées à Paris, à l’appel du Réseau éducation sans frontières (RESF), des organisations regroupées dans le collectif Uni(e)s contre une immigration jetable (Ucij), et des collectifs de sans-papiers de la région Île-de-France. C’était un pari risqué, après le coup porté par la double victoire de Sarkozy aux élections présidentielle et législatives. Pari tenu, qui montre que persistent les capacités de résistances... qui seront bien nécessaires dans les semaines à venir.
La forme « farandole » de la manifestation peut surprendre. Ce dimanche 1er juillet, elle a contribué au succès. Les collectifs se sont donné rendez-vous dans une dizaine d’endroits de Paris, au plus près des mobilisations locales, et les cortèges, d’apparence modeste au début, ont convergé les uns avec les autres. Les petits ruisseaux ont formé une grande rivière exigeant la régularisation, l’arrêt des rafles et des expulsions, le retrait du projet de loi Hortefeux, le garde-barrière de « l’identité nationale ». Parmi les collectifs de la région parisienne, on remarquait particulièrement les sans-papiers occupant l’église Saint-Paul de Massy et les salariés de Buffalo Grill, lutte emblématique de sans-papiers salariés luttant syndicalement à la fois pour leur régularisation et pour leur réintégration [1]. Les collectifs locaux du RESF scandaient « les enfants en vacances, et non en rétention ». Partout, le réseau met en place des dispositifs de veille permettant de faire face à la multiplication des rafles et des contrôles au faciès. L’année scolaire n’était pas terminée, qu’on sentait l’impatience policière de faire du chiffre à la faveur de la torpeur estivale. Le RESF organise une rencontre nationale de ses collectifs, les 7 et 8 juillet, à Lyon.
Non seulement les expulsions ne prennent pas de vacances, mais le délit de solidarité tend à se durcir. Non sans déconvenues pour le gouvernement. Ainsi, le tribunal de Bobigny a reconnu, le 29 juin, l’état de légitime défense de Salif Kamaté, ce Malien que des policiers brutalisaient à bord d’un appareil avec une telle violence que les passagers, parmi lesquels l’équipe du cinéaste Laurent Cantet, se sont indignés et que le commandant de bord a refusé de décoller. Le 3 juillet, les passagers d’un autre vol pour Bamako devaient être jugés pour avoir refusé de voyager dans un fourgon cellulaire Air France : Marie-Françoise Durupt, 60 ans, qui revenait de l’enterrement de son père, et Youssouf Soumounou, sont accusés d’avoir provoqué « la rébellion » et une « résistance violente à des personnes dépositaire de l’autorité publique » ! Le délit de solidarité va fortement marquer les prochains mois : les procès de Florimond Guimard, de Khadîdja et de François Auguste seront l’occasion de mobilisations à la rentrée.
D’autant qu’il est peu probable que le projet de loi Hortefeux sur l’immigration soit définitivement adopté en juillet. Il reviendra sur le devant de la scène en septembre. Il va encore accroître le nombre de sans-papiers, en restreignant durement le regroupement familial et l’asile, l’Ofpra passant sous la tutelle du ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale. L’eugénisme migratoire frappe encore. Dans un contexte de multiplication des arrestations - Hortefeux fixe l’objectif à 125 000 interpellations - et des descentes de police sur les lieux de travail, il est urgent que le mouvement syndical prenne la mesure de ce qui se joue et entre résolument dans la mobilisation.
1. Pour plus de détails, visitez le site www.educationsansfrontieres.org et profitez-en pour signer en ligne les pétitions.