Des responsables d’institutions et d’organisations internationales de défense des droits humains ne sont pas seuls à recourir à cette qualification. Des dirigeants israéliens eux-mêmes affirment s’y livrer.
En 2023, la foule israélienne, hostile à son coup d’Etat institutionnel, a massivement contesté le pouvoir de Netanyahu. Il s’attaquait à la Cour suprême, la plus haute institution judiciaire du pays, pour se protéger des procédures pénales engagées contre lui.
Tout au long de l’année, les chefs d’Etats impérialistes l’ont assuré de leur soutien moral, politique et matériel alors que Netanyahu confortait son fragile pouvoir en choisissant pour ministres des colonialistes parmi les plus brutaux, en ignorant les crimes de leurs bandes armées contre la population palestinienne de Cisjordanie.
Selon Avner Gvaryahou, directeur de Breaking the Silence [1], le 7 octobre, « une partie des soldats normalement présents près de Gaza avaient été réquisitionnés pour protéger des colons désireux d’organiser, vendredi 6 octobre, une fête de Souccot à Huwara, bourgade palestinienne proche de Naplouse, devenue l’épicentre des tensions en Cisjordanie depuis le début de l’année ».
Les Etats impérialistes soutiennent-ils Israël parce que cet Etat est juif ? Bien sûr que non. Une communauté d’intérêts lie ces Etats, et notamment leur refus qu’un peuple dominé, se libérant de leur tutelle, exige les droits que reconnaissent les conventions internationales.
De toutes les puissances impérialistes, la 5e République française est la seule à conserver en Afrique une puissance issue de son empire colonial. Les peuples y subissent sa domination, et en métropole des discriminations accablent leurs ressortissants ou leurs descendants.
Que les Palestiniens accèdent à la citoyenneté en Israël, obtiennent la fin de l’apartheid, du racisme, de la colonisation susciterait chez tous les peuples dominés un formidable espoir.
Et quel effet aurait en France une telle victoire sur les habitants des « quartiers » ? Les Palestiniens obtenant là-bas, ce que leur refusent la 5e République, ses policiers fascistes, ses politiciens racistes et les chiens de garde des valeurs laïques et républicaines !
Est-ce le sionisme que défendent en Israël le pouvoir et ses alliés impérialistes ?
Mais qu’est le sionisme ? A la fin du XIXe siècle un cercle de notables appartenant aux communautés juives d’Europe cherchaient avec Theodor Herzl une alternative à l’antisémitisme meurtrier qui faisait fureur de l’Atlantique à l’Oural.
En nombre croissant, des « juifs de l’est » rejoignaient l’Europe développée, fuyant leurs conditions de vies dans le Yiddishland [2]. Leur immigration nourrissait le racisme anti-juif, comme aujourd’hui l’islamophobie et d’autres formes du racisme sont infligés aux migrants. Les vieux empires allemand, austro-hongrois, russe étaient en crise et l’aspiration à créer des Etats indépendants se développaient parmi les nations qui subissaient ces empires. Feraient-elles une place aux juifs, qu’animaient également le désir d’une émancipation nationale ? Mais où, sur quel territoire ? Le sionisme allait incarner la vieille tradition religieuse, culturelle qui invitait à rêver à Jérusalem les jours de fête ?
Mais qui le sait aujourd’hui ? Le sionisme était alors minoritaire. Beaucoup plus nombreux étaient les juifs qui adhéraient au mouvement ouvrier et à son projet socialiste. Cet espoir fut étouffé par les victoires contre-révolutionnaires dans l’Europe des années 1918-1924, les dictatures antisémites qu’elles suscitèrent en Hongrie, en Pologne, en Roumanie, puis en Allemagne et en Autriche, jusqu’à l’avènement de la Shoah.
Est-ce cette histoire, que seuls se rappellent les survivant.es des familles qui l’ont connue, que mobilisent en Israël Netanyahu et les siens ? Oui, puisqu’il leur faut manipuler cette mémoire pour conserver leur pouvoir.
Et nous, solidaires de la lutte du peuple palestinien, allons-nous tomber dans le panneau et conforter ces colons racistes en accréditant leur propagande ? En répétant à notre tour que c’est au peuple israélien et à sa mémoire sioniste que nous nous en prenons ?
Où allons-nous enfin dénoncer pour ce qu’il est, ce génocide en cours à l’abri de toutes les puissances impérialistes de la terre ?
Pour la première fois dans l’histoire, nos opinions publiques assistent d’heure en heure à un crime commis en leur nom par leurs gouvernements. Elargir la conscience de son horreur n’est-ce pas notre seule tâche ?
Cease fire now !
« Cessez-le-feu », maintenant c’est exiger des hommes et des femmes politiques que nous avons élus qu’ils ne nous rendent pas complices de cette horreur. Qu’ils pèsent, ils en ont le pouvoir, sur le cours des événements et contribuent à mettre fin à ce massacre.
Karl Grünberg
Association contre le racisme ACOR (Association romande Contre le Racisme)