Deux experts indépendants viennent de publier les conclusions d’un rapport sur la gestion par l’Etat français de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl (Libération du 29 mars 2005). Nous attendons avec intérêt la parution de ce rapport dans son entier. Mais les conclusions annoncées n’ont rien de bien surprenantes : les autorités se sont refusées à transmettre tous les éléments dont elles disposaient, ou les ont maquillées avant de le faire (en cartographiant par exemple des taux inexacts de contamination après le passage du nuage radioactif en avril et mai 1986).
Si nos deux experts ont pu avoir accès à une documentation significative, ce n’est pas que l’administration aient enfin joué la transparence. C’est grâce aux saisies de la justice en novembre 2001, à la suite de plaintes déposées par près de 500 personnes. C’est aussi que, face au mensonge officiel, des mesures ont été effectuées par la Commission de recherches indépendantes sur la radioactivité (Criirad). Sans cela, un coin du voile n’aurait jamais été levé sur le secret nucléaire.
La catastrophe de Tchernobyl remonte à 19 ans. Le gouvernement français de l’époque a organisé la désinformation sur une question majeure de santé publique. Aucun des gouvernements qui se sont succédé depuis n’a décidé d’assumer véritablement la vérité et d’engager les démarches judiciaires nécessaires. Il en va en Russie et en Ukraine comme en France. Ce qui permet à l’Organisation mondiale de la santé —qui ne prend en compte que les rapports officiels fournis par les Etats— de prétendre en toute invraissemblance que les cancers de la thyroïde provoqués par Tchernobyl n’ont fait que 32 morts.