Capture d’écran d’une vidéo montrant des colons israéliens armés en Cisjordanie.
En mars, en Cisjordanie, on a recensé 147 agressions commises par des juifs israéliens contre des Palestiniens, soit une moyenne de cinq par jour. Sur les 31 jours du mois, il n’y a eu que deux jours où aucune agression n’a été enregistrée ; l’un de ces deux jours était le samedi 23 mars. Autrement dit, des agressions ont été signalées les quatre autres jours de shabbat.
J’ai fait état vendredi d’une incursion et d’une agression le samedi 30 mars subies par des habitants de Mukhmas, un village situé au sud-est de Ramallah [voir ci-dessous]. Une autre incursion enregistrée attend toujours notre compte rendu détaillé : un raid contre le village d’Aqraba le 19 mars, au terme duquel Fakher Jaber, 43 ans, a été tué par balle.
Revenons à l’attaque de Mukhmas. Un juif a frappé Samhan Abu Ali, 55 ans, à la tête avec une barre de fer. Alors qu’il était étendu par terre, inconscient, deux autres assaillants, ou trois, l’ont frappé avec une pierre et un gourdin. Autour de lui, quelques assaillants tiraient en l’air. Les agresseurs ont « engrangé » un bras cassé, une épaule déboîtée et une blessure profonde à la tête d’Abu Ali. Un autre assaillant a frappé Muqtada, le fils d’Abu Ali, lui cassant également le bras.
Un peu plus tôt, alors que les assaillants avançaient vers les villageois en brandissant leurs fusils et en tirant en l’air, un homme de 22 ans a été blessé d’une balle dans la jambe. Samhan Abu Ali s’est précipité à son secours, craignant que les assaillants ne le battent alors qu’il gisait sur le sol en sang. Ils s’en sont pris à cet homme courageux, plus âgé, qui pensait que son âge le protégerait. Deux autres habitants ont été blessés par des pierres, mais n’ont pas eu besoin de soins hospitaliers.
Selon le porte-parole de l’armée israélienne, « il a été fait état d’une agression contre un berger israélien, à la suite de laquelle des heurts et des jets de pierres ont opposé des civils juifs et des Palestiniens. » Avez-vous déjà eu l’occasion de voir un Palestinien agresser un berger juif (souvent armé ou escorté par des gardes armés) et ne pas être arrêté immédiatement ou dans la nuit ? Il est inutile que j’ajoute qu’aucun habitant de Mukhmas n’a été arrêté la semaine dernière pour avoir prétendument attaqué un Israélien.
Et maintenant, le cliché de circonstance : si un juif de 55 ans avait été agressé de cette manière près de chez lui par trois Palestiniens, les gros titres auraient hurlé à l’attentat terroriste, dénoncé la cruauté, martelé qu’ils l’avaient battu simplement parce qu’il était juif. Mais comme il s’agit de Palestiniens, dans leur maison, et que les agressions ont été commises par des juifs israéliens, l’événement n’est pas jugé digne d’attention.
Il y a des vidéos et des photos où l’on voit les hommes armés menaçants, le visage couvert, se dirigeant vers les Palestiniens sur leurs propres terres. Il n’y a pas de photos des moments les plus violents.
Mais le schéma est le même que celui de nombreux incidents similaires au cours desquels des Israéliens présentant les caractéristiques extérieures de juifs religieux (kippas, boucles pendantr sur les côtés, tzitzits accrochés à leur maillot de corps) se sont attaqués à des fermiers palestiniens, jeunes et vieux. Ils ont également agressé des militants israéliens contre l’occupation, notamment des femmes - y compris des femmes âgées - et des rabbins.
Répétons-le pour la millionième fois : Ce schéma, établi depuis des décennies, montre que les autorités - qui n’empêchent, n’arrêtent, ne détiennent, ne poursuivent ni ne punissent personne - veulent que les attaques se poursuivent.
Sur la base de photos, une source au sein des services de sécurité a déclaré que l’un des envahisseurs, armé et en uniforme, est le coordinateur de la sécurité de la colonie de Ma’aleh Mikhmash, située au nord-est du village. Trois autres hommes armés visibles sur les photos, en tenue civile, sont des soldats en permission, a ajouté cette source.
Palestiniens gardant des moutons en Cisjordanie. Au cours des 12 derniers mois, 1 926 attaques d’Israéliens contre des Palestiniens ont été enregistrées.Crédit : Nidal Eshtayeh
Pour information, président Biden : leurs armes sont de fabrication américaine et leur but est de terroriser les gens. De nombreux habitants de Mukhmas sont des citoyens américains. Ils possèdent des terres et des vignobles, mais ne peuvent y accéder en raison de la présence menaçante de Juifs armés qui se sont emparés de leurs terres. C’est ce que font, par exemple, les annexes de Ma’aleh Mikhmash, ses avant-postes de Neveh Erez et de Nahalat Tzvi.
Un document d’autopromotion émanant de Nahalat Tzvi indique que l’avant-poste prévoit de « créer de nouveaux états de fait sur le terrain en réponse à la »prise de contrôle« du secteur par les Arabes ». Les colons sont des émissaires de l’État d’Israël et des sionistes passionnés. Pour information au président américain le plus sioniste de tous les temps : Chacune de leurs expéditions et de leurs agressions - menées en brandissant des fusils de fabrication américaine - crée un état de fait [accompli].
En mars, 147 attaques ont été recensées. En février, 145. En janvier, 108. En octobre dernier, on a enregistré un nombre record, comme on s’y attendait, de 408. En juin, 184. Au total, au cours des 12 derniers mois, 1 926 attaques de Juifs contre des Palestiniens ont été recensées.
Laissons ce chiffre s’imprégner dans notre esprit : 1.926. Toutes les sortes d’agressions ont été commises : des hommes armés qui investissent des villages - tentes, vignobles, champs et sources ; de simples menaces avec des armes à feu ; des dommages aux arbres et aux biens ; des vols de bétail ; des pierres lancées sur des maisons et des voitures ; des personnes battues jusqu’au sang, leurs os brisés ; et des meurtres - avec ou sans escorte de soldats armés pour la protection des colons envahisseurs.
Les incidents sont répertoriés par le département chargé des négociations de l’OLP, qui n’a plus rien à négocier, ni personne avec qui il pourrait le faire. La liste est basée sur les rapports qui parviennent aux journalistes et aux forces de sécurité palestiniennes en temps réel. Certains incidents ne sont pas signalés au département. Parfois, les informations publiées sont de nature préparatoire, abrégées et non actualisées. Elles ne sont pas exactes à 100 %.
Mais elles donnent une idée de ce qu’est le terrorisme cumulatif. Elles dessinent les grandes lignes d’un régime d’intimidation, de terreur et de dépossession parallèle à celui de l’armée, un régime établi en Cisjordanie par des citoyens de cet État, par ses agents et ses représentants, qui sont chéris et subventionnés par l’État.
Amira Hass
• Haaretz. Apr 8, 2024 12:30 pm IDT :
https://www.haaretz.com/opinion/2024-04-08/ty-article-opinion/.premium/fyi-joe-biden-israels-settlers-use-american-weapons/0000018e-b82b-d906-a5cf-babfb7800000
Le chef de la sécurité de la colonie a participé à un raid brutal dans un village palestinien près de Ramallah
Des témoins du village de Mukhmas affirment qu’une trentaine d’Israéliens sont entrés sur leurs terres agricoles et ont battu les habitants ; Tsahal : L’incident a été précédé d’un rapport sur l’attaque d’un berger israélien.
Abdel Rahman al-Hajj, le citoyen américain propriétaire du puits et de l’oliveraie, avec la colonie de Ma’aleh Michmas en arrière-plan.
Samedi, plusieurs dizaines d’Israéliens ont envahi des terres appartenant au village de Mukhmas, au sud-est de Ramallah. Des témoins oculaires affirment que les Israéliens - certains armés de fusils, d’autres avec le visage masqué, et un en uniforme de l’armée israélienne - ont chassé les habitants sous la menace d’une arme et les ont ensuite agressés à l’aide d’un pied-de-biche, de gourdins et en tirant des coups de feu. Selon les témoins, trois villageois ont été blessés, et deux autres ont été blessés par des pierres lancées par les assaillants. Certains des blessés ont dû être transportés à l’hôpital pour y être soignés.
Une source au sein de sécurité a déclaré à Haaretz que l’homme en uniforme qui a été vu par les villageois est le coordinateur de la sécurité de la colonie de Ma’aleh Michmas, et que les autres Israéliens qui étaient armés étaient des soldats réservistes en permission.
Ma’aleh Michmas est située à l’est du village. Plusieurs avant-postes illégaux ont été érigés à la périphérie de la colonie. Les plus proches de Mukhmas sont Neveh Erez, installé au début des années 2000, et Nahalat Zvi, construit en octobre 2022 par des étudiants de la yeshiva Merkaz Harav. Cet avant-poste a été démoli plusieurs fois dans le passé par l’administration civile, mais ses fondateurs sont revenus et l’ont reconstruit. Ils ont créé une route non autorisée menant à l’endroit, y gardent un troupeau de moutons et, lors d’une visite en début de semaine, semblaient être occupés à s’agrandir et à préparer le terrain pour d’autres constructions. L’un des témoins oculaires de l’attaque, Mustafa Abu Siam, a déclaré avoir reconnu parmi les assaillants un homme qui vit à Nahalat Zvi, il n’était pas armé d’un fusil.
Selon les témoignages recueillis par Haaretz, vers 17h30 samedi, plusieurs villageois ont remarqué que des personnes marchaient sur une colline qui fait partie des terres agricoles du village. Ils ont dit qu’ils craignaient que les intrus inconnus ne vandalisent les oliviers et le champ de blé qui s’y trouvent, et qu’ils ne s’approchent également des maisons du village, et donc ils se sont précipités sur place pour voir ce qui se passait. À un moment donné, le groupe de villageois qui est allé vérifier a aperçu plusieurs des intrus en train de patauger dans un puits situé dans une oliveraie appartenant à deux frères du village qui ont par ailleurs la nationalité américaine. L’oliveraie se trouve à quelques centaines de mètres des cabanes de Nahalat Zvi.
Abu Siam, un pharmacien de 36 ans, explique que les personnes qui se trouvaient dans le puits en sont sorties et que plusieurs d’entre elles se sont enveloppées le visage avec des chemises. Il raconte qu’ils ont commencé à crier après le groupe de villageois et que quelques-uns d’entre eux, qui avaient des armes, ont commencé à tirer en l’air. Les villageois ont alors décidé de faire demi-tour et de quitter les lieux. Plus tard, les premiers Israéliens qui étaient venus au village ont été rejoints par d’autres, qui se sont dispersés le long de la colline située à l’ouest de la vallée. C’est alors que les villageois ont remarqué un homme portant l’uniforme des FDI, qui a pointé un fusil vers eux et s’est approché d’eux en criant. Il leur a semblé qu’il voulait encourager les autres Israéliens à avancer avec lui vers eux, alors qu’ils étaient sur le chemin du retour vers leurs maisons dans le village.
« Nous sommes retournés au village et ils nous ont suivis. Ils n’arrêtaient pas de se rapprocher de nous », raconte Samhan Abu Ali, 55 ans. « Nous ne pouvions pas nous éloigner d’eux. Nous retournons au village et ils sont juste derrière nous ». Abu Ali estime qu’il y avait une trentaine d’Israéliens en tout, et il dit que certains ont tiré des coups de feu en l’air. Une vidéo filmée par un villageois montre les Israéliens, dont le coordinateur de la sécurité, descendre de la colline sur la route, tandis que certains pointent vers eux leurs fusils de manière menaçante. Abu Ali raconte également qu’à 18 h 30, une demi-heure avant la fin du jeûne quotidien du ramadan, un jeune homme près de lui avait reçu une balle dans la jambe. « Je me suis approché de lui pour l’aider à sortir de là et j’ai vu qu’ils étaient sur le point de le frapper alors qu’il était à terre. L’un d’eux m’a frappé à la tête avec une barre de fer. J’ai dû m’évanouir, je suis tombé par terre et ils m’ont encore frappé ». Il se souvient ensuite « d’avoir été porté par les jeunes ». D’autres témoins affirment que trois ou quatre Israéliens ont agressé Abu Ali, et que pendant qu’il était allongé sur le sol, une personne continuait à le frapper avec un gourdin, et une autre avec une pierre. D’autres Israéliens ont tiré en l’air et empêché les villageois de s’approcher. L’un des Israéliens a également frappé Muqtada, le fils d’Abu Ali, avec une gourdin et lui a cassé la main.
Les soldats sont arrivés sur les lieux vers 18 h 45. « Ils pensaient qu’un Israélien était blessé », suppose Abu Siam. Aucun membre de la police ou du COGAT (administration chargée de la Cisjordanie au sein du ministère de la défense ndt) ne s’est présenté. Plusieurs villageois ont transporté les trois blessés hors du village dans une voiture, puis les ont fait monter dans une ambulance. Tous trois ont été opérés dans un hôpital de Ramallah. Abu Ali, qui est sorti de l’hôpital mardi dernier, a déclaré au cours d’un appel vidéo qu’il avait été profondément entaillé à la tête et qu’il avait eu besoin de dix points de suture. Les agresseurs lui ont également cassé le bras gauche et l’os du bras a dû subir une intervention interne. Les coups et la chute ont également entraîné la dislocation de son épaule droite.
Ce n’est pas la première attaque à Mukhmas. Dans la nuit du 23 mars 2022, plusieurs Israéliens masqués ont envahi le nord du village, brisé les vitres d’une maison et de véhicules et vandalisé 17 voitures. Les villageois affirment également que des arbres ont été détruits ces dernières années par des vandales inconnus. Abdel Rahman al-Hajj, le citoyen américain propriétaire du puits et de l’oliveraie, explique qu’en raison de la proximité des avant-postes et de la peur de leurs occupants armés, il n’a pas pu accéder à son oliveraie au cours des deux dernières années.
D’autres villageois disent également qu’ils n’ont pas pu avoir accès à leurs oliveraies ces dernières années en raison de la proximité de l’avant-poste de Neveh Erez. Les bergers du village ont peur de se rendre à l’est du village, car dans le passé, il y a eu plusieurs incidents au cours desquels des bergers israéliens armés les ont menacés et chassés des zones de pâturage. À la mairie de Mukhmas, on trouve un dossier contenant des copies des confirmations par la police israélienne des plaintes déposées pour chacun des incidents de ce type, y compris des plaintes déposées par des avocats concernant le harcèlement par les résidents de Neveh Erez et leur envahissement des terres des villageois. Cependant, les agressions et le blocage de l’accès aux pâturages et aux vergers se poursuivent.
Des moutons paissent sur des terres près de Mukhmas, cette semaine.Crédit : Nidal Eshtayeh
La police a répondu : « L’incident en question a été traité par l’armée et un rapport a été envoyé à la police. À ce jour, la police n’a pas reçu de plainte à ce sujet. Si une plainte est enregistrée, elle sera examinée et traitée comme il se doit. »
Le porte-parole de l’armée israélienne déclare : « samedi dernier, un rapport a été reçu au sujet d’une agression contre un berger israélien, à la suite de laquelle une confrontation a eu lieu entre des résidents du village et des civils juifs, avec notamment des jets de pierres de part et d’autre. Les forces de l’IDF sont arrivées et ont dispersé les troubles en recourant aux dispositifs de dispersion des protestations et en tirant en l’air ».
Amira Hass
• Haaretz | Israel News. 5 avril 2024 :
https://www.haaretz.com/israel-news/2024-04-05/ty-article/.premium/settlement-security-head-joined-brutal-raid-of-palestinian-village-near-ramallah/0000018e-aa94-dc75-afde-faf40c770000