Le dilemme est d’autant plus crucial que se profile un retournement historique où la jeunesse masculine semble vouloir voter à droite, davantage que les générations plus âgées. Se basant sur un sondage de la firme Nanos de la mi-avril, Blomberg affirme que « [l]es jeunes hommes sont particulièrement attirés par le leader du Parti conservateur, Pierre Poilievre. Selon Nanos Research, les femmes sont deux fois plus nombreuses à soutenir le parti Libéral de Mark Carney que celui de Poilievre. » Les jeunes hommes virent-ils à droite toute ? Un sondage Léger fait au même moment n’est pas si concluant bien qu’il affiche la même tendance tout en permettant de comparer le Canada (incluant le Québec) et le Québec.

Si on divise en deux groupes les partis en lice soit les partis néo-fascisant (partis Conservateur et Populaire) et ceux qui ne le sont pas (partis Libéral, néo-démocrate et Vert) en ignorant le cas litigieux du Bloc québécois (on y revient), on constate qu’au niveau canadien les hommes comme les femmes tout comme les personnes âgées (55+) et celles jeunes (18-34) votent toustes majoritairement pour les partis qui ne sont pas néo-fascisants. Cependant, les femmes le font dans une proportion sensiblement plus grande (un écart de plus de 25 points de pourcentage par rapport de près de 10 points pour les hommes). Et il est exact que les personnes âgées le font dans une proportion plus importante que les plus jeunes, plus de 20 points de pourcentage par rapport à plus de 10 points. C’est un renversement par rapport à une tendance historique. Si les données l’avaient permis, il aurait été intéressant de comparer jeunes femmes versus jeunes hommes. Le masculinisme fait-il des ravages ?
La comparaison avec le Québec introduit la difficulté du classement du Bloc québécois. C’est là un parti national-populiste qui mange à tous les rateliers. La campagne électorale a quand même souligné à double traits son caractère identitaire, pour le dire poliment, plus que celui dit progressiste. Souvenons-nous de la rencontre amicale de la Saint-Valentin entre le chef du Bloc et celui du parti Conservateur du Québec. Mais c’est aussi un moyen, en ces temps de bombance du torse canadian, d’affirmer la résistance nationale au chauvinisme canadien. Le Bloc a quelque chose d’un parti rouge-brun c’est-à-dire de tendance centre-gauche mais seulement pour les « de souche ». Constatons que selon le sondage Léger près du tiers des francophones québécois a l’intention de voter Bloc contre un peu plus de 5% pour les anglophones et les allophones du Québec. S’il n’y a pas de différence notable entre les hommes et les femmes, les personnes âgées sont deux fois plus bloquistes que les plus jeunes. Un parti près de la porte de sortie ?

Si on ignore les intentions de vote pour le Bloc, un gros ‘si’ pour les francophones, on constate que les femmes du Québec se prononcent pour les partis qui ne sont pas néofascisants par plus de plus de 40 points de pourcenage de plus que pour ceux néo-fascisants alors que les hommes ne le font que pour une quinzaine de points de pourcentage. Pour les personnes âgées c’est plus de cinquante points de pourcentage par rapport à une trentaine pour les plus jeunes. Pour les anglophones c’est une quarantaine de points, un peu plus d’une trentaine pour les allophones tout comme pour les francophones. Difficile de conclure sauf à noter que chez les jeunes hommes francophones tout indique que la montée du masculinisme se mêle au nationalisme identitaire aux relents de « dog whistling » vis-à-vis les gens demandeurs d’asile.
Dans un article précédent, on a déjà constaté que ce racisme larvé véhiculé par le bloc nationaliste (CAQ, PQ, Bloc québécois) imprègne la société québécoise. On aurait crû que Libéraux et, à coup sûr, Québec solidaire combattent ce discours bec et ongles. Au contraire, ils y adhèrent par la porte arrère. « Le flux migratoire risque de faire une pression sur les services et cette pression des services va nous interpeller tous », dit Monsef Derraji [députédu parti Libéral du Québec]. Quelques minutes auparavant, le député solidaire Guillaume Cliche-Rivard [et porte-parole intérimaire] s’était dit ‘’d’accord avec M. Legault [Premier ministre du Québec] sur le fond, pas sur la forme ‘’. La veille, le premier ministre avait rappelé sa demande aux chefs de partis fédéraux, en campagne électorale, pour réduire de moitié le nombre de demandeurs d’asile sur le territoire québécois. » Que vaut le discours à l’emporte-pièce en sens contraire de la porte-parole du parti lors de la conférence avec Jean-Luc Mélanchon ? The answer is blowing in the wind.
Marc Bonhomme, 20 avril 2025
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