Un millier de néonazis défilent dans les rues de Paris et la vie continue. La démonstration de force annuelle de l’extrême droite radicale, le défilé du Comité du 9-Mai (C9M) a permis de voir, cette année encore, des militants multicondamnés pour violence marcher en rang en scandant « Europe, jeunesse, révolution ».
Samedi 10 mai, ils ont évolué sous les huées des passants et des militants antifascistes, mais accompagnés par la bienveillance des forces de l’ordre, beaucoup plus promptes à interpeller les quelques contre-manifestants qu’à s’intéresser aux gros bras masqués, parfois porteurs de tatouages nazis, du défilé. Le ministre de l’intérieur Bruno Retailleau, qui a annoncé il y a quelques semaines la dissolution de la Jeune Garde antifasciste, ne s’est pas exprimé sur ce spectacle en pleine capitale.
Interdite par la préfecture de police de Paris, la manifestation avait été finalement autorisée par le tribunal administratif, qui a expliqué que le préfet « ne donnait pas d’indication précise sur les militants ultranationalistes radicaux qui seraient susceptibles de se joindre à la manifestation ». Ce qui laisse songeur : le défilé de l’an passé avait déjà rassemblé les mêmes militants néonazis, regroupés sous les mêmes drapeaux ornés de croix celtiques, porteurs des mêmes tatouages.
Après l’édition 2023, marquée par les intimidations envers les journalistes, le monde politique s’était ému de cette parade néonazie, ce qui avait obligé la préfecture de police à s’expliquer, en avançant comme justification que « le préfet de police n’était pas fondé à prendre un arrêté d’interdiction », la manifestation n’ayant pas entraîné, les années précédentes, de « débordement » ou de « trouble à l’ordre public ». Comme si le défilé d’hommes en noir cagoulés scandant des slogans fascistes n’était pas en soi un « débordement »…
Mis sous pression par l’Assemblée nationale, le ministre de l’intérieur de l’époque, Gérald Darmanin, avait alors promis d’interdire toute manifestation émanant de « militants d’ultradroite ou d’extrême droite », et de laisser au tribunal administratif le soin de trancher. Ce que ce dernier a fait à deux reprises, en 2024 et 2025, en autorisant cette manifestation qui rassemble chaque année de plus en plus de monde – ils n’étaient qu’une centaine à défiler en 2018.
S’il manquait encore quelques « indications précises » sur le caractère ultraradical du rassemblement, le discours de clôture de cette année en a fourni à la pelle : rue des Chartreux, dans le sixième arrondissement, l’un des militants a ainsi vanté au micro leur rôle de « soldats politiques », avec une référence assumée : « Ce combat contre nos ennemis doit se terminer par leur écrasement pour créer ce monde européen qui nous permettra de perpétuer notre héritage pour 1000 ans. »
Youmni Kezzouf
