La situation sanitaire de la Birmanie est désastreuse. Les quarante ans de pouvoir militaire ont laminé le pays, appauvri considérablement la population et délabré un système de santé pourtant déjà bien faible, mais dont l’état alarme aujourd’hui les quelque 70 organisations de solidarité internationale qui y sont présentes.
Médecins du monde (MDM) est de celles-là. Installée depuis quinze ans en Birmanie, avec une centaine d’employés autochtones (médecins, infirmiers, éducateurs) et six expatriés, l’ONG française constate le lourd tribut payé par les habitants au régime dictatorial et rencontre de plus en plus de difficultés. Tracasseries administratives, complexité du moindre déplacement de personnes ou de médicaments soumis à autorisation de transport, lenteur des réponses, contraintes...
« Depuis des mois, raconte le docteur Françoise Sivignon, responsable de mission, les contrôles se sont intensifiés, les autorisations sont plus compliquées à obtenir et nos bénéficiaires harcelés de manière plus aiguë. Il y a même des organisations comme le Fonds global, sur le projet sida, qui se sont retirées car leur tâche devenait trop difficile. »
MDM travaille auprès des prostitués (hommes et femmes) à Rangoun et des usagers de drogue dans l’Etat de Kachin, au nord. Des populations exposées au VIH (32 % parmi les prostitués, 51 % parmi les drogués) et à d’autres maladies, et souvent harcelées, voire réprimées par la police, ce qui complique leur prise en charge sanitaire et psychosociale dans les dispensaires.
Mais le docteur Sivignon note aussi une aggravation des indicateurs sanitaires et une flambée des maladies dites de la pauvreté, comme la tuberculose, le paludisme et les infections respiratoires. « Trop peu d’argent est consacré aux systèmes sanitaire et éducatif. Dix dollars (7 euros) par an et par personne vont à la santé, contre 160 dollars en Thaïlande ! La situation des hôpitaux est dramatique, les services sont sous-équipés, les soignants pas ou mal formés, les médicaments rares et de mauvaise qualité. »
Enfin, les équipes de MDM sont de plus en plus frappées par le mauvais état nutritionnel de la population. « Elle est exsangue, dit le docteur Sivignon. Les jeunes moines, issus de familles pauvres et qui vivent de l’aumône, en sont le parfait reflet. »