Les déclarations provocatrices et méprisantes du Ministre d’Etat et Ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy à Argenteuil et dans la presse et la mort tragique de deux adolescents, « coursés » ou ayant trop peur d’être contrôlés par la police à Clichy-sous-Bois, ont été le déclencheur de protestations et d’affrontements entre les jeunes et les forces de l’ordre.
Ainsi, depuis plusieurs jours, le département de la Seine-Saint-Denis en particulier et l’Ile de France sont le théâtre d’affrontements entre les forces de police et des groupes de jeunes. Ces affrontements ne cessent de croître et de se généraliser, provoquant des incendies de véhicules et d’autres biens publics et privés. Ces évènements touchent désormais d’autres régions de France.
La seule réponse du Gouvernement, aux revendications des jeunes des quartiers et des villes délaissés depuis plus de 30 ans, a été de renforcer les mesures sécuritaires et l’envoi de plus de policiers. L’hésitation des plus hauts responsables de l’Etat n’ont pas aidé à apaiser les esprits, bien au contraire.
Les déclarations du Président de la République puis la décision du gouvernement de recourir, au besoin, à l’état d’urgence (loi de 1955 chargé d’un message symbolique désastreux en référence à la guerre d’Algérie), après la loi du 23 février 2005, accentuent l’inquiétude de plus en plus grande dans tous les milieux.
L’Association des Tunisiens en France (ATF) considère que cette situation cristallise le fossé qui s’est creusé entre les populations de ces quartiers et villes et la République et ses institutions. En effet, dans ces quartiers et ces villes, les politiques libérales ont abouti au désengagement de l’Etat, à la quasi inexistence des services publics, à la concentration de la précarité et à la marginalisation de ces populations accentuant les inégalités sociales et les discriminations.
Les politiques éducatives inadaptées, les milliers de jeunes sans emploi ni formation et les discriminations à l’emploi, au logement, réelles et quotidiennes, ne peuvent enfanter que la perte de tout espoir.
On ne peut s’étonner de l’absence d’interlocuteurs et médiateurs après le gel des subventions, la suppression emploi jeunes et des éducateurs et que les restrictions budgétaires déciment le tissu associatif laïc et citoyen qui a, pendant des décennies, pallié à l’absence des services publics et de l’Etat et a assumé un rôle de médiation sociale.
Faute d’expression politique encadrée, ces jeunes s’expriment dans la violence. Tous les spécialistes -y compris des responsables de la police- s’accordent à reconnaître que rien ne prouve la thèse d’une orchestration. Ces évènements et ces violences expriment le « ras-le-bol » général des enfants de la République.
L’A.T.F présente ses condoléances aux familles de toutes les victimes de ces violences.
Tout en étant solidaire des revendications des jeunes, l’ATF considère que toutes les actions de destruction des biens privés et public et les atteintes aux personnes ne peuvent que desservir les revendications justes et légitimes des populations et de la jeunesse de ces quartiers et villes.
Le Bureau National de l’ATF , association qui œuvre à l’intégration des populations issues de l’immigration et à l’accès à une citoyenneté effective exprime :
– son soutien aux revendications légitimes de ces populations :
– Appelle au retour au calme, à l’apaisement des esprits et à l’arrêt des provocations
– au respect de leur dignité
– à leur aspiration d’accéder aux mêmes droits et traitements que tous les citoyens sans discrimination aucune.
– à accéder à un emploi, à l’éducation, à un logement décent, à la santé..
– Considère que seul le dialogue avec ces populations et cette jeunesse dans le respect et une réponse positive à leurs revendications qui offrent une sortie de la précarité et du chômage peuvent aboutir à une paix sociale. L’option répressive ne peut déboucher que sur une impasse et sur d’autres révoltes plus dévastatrices.
Le Bureau National de l’ATF appelle le gouvernement à lever l’état d’urgence et toutes les forces démocratiques en France à se mobiliser pour sauvegarder les droits et les libertés fondamentales individuelles et collectives et l’arrêt des procès.
Le Bureau National de l’ATF appelle à ce que des solutions positives concrètes par ville et par quartier associant les acteurs de terrains les institutionnels et les habitants et les jeunes eux mêmes soient mises en œuvre. Seule cette démarche peut réinstaurer le dialogue, construire des réponses collectives et garantir la paix sociale.
Paris, le 08 novembre 2005
Le Bureau National de l’ATF