LONDRES CORRESPONDANT
Même s’il s’agit d’un geste symbolique, la décision des dirigeants du Commonwealth de suspendre le Pakistan « en attendant la restauration de la démocratie et de l’autorité de la loi » est un coup dur pour le général-président Pervez Musharaff, trois semaines après l’instauration dans le pays de l’état d’urgence.
« Malgré les progrès accomplis (...), la situation au Pakistan continue de représenter une sérieuse violation des valeurs politiques fondamentales du Commonwealth » a déclaré, jeudi 22 novembre à Kampala (Ouganda), où devait s’ouvrir le lendemain le sommet du Commonwealth, le secrétaire général de l’organisation anglophone, Don McKinnon.
RÉTICENCES DE LA MALAISIE
M. McKinnon s’exprimait au nom du Groupe d’action ministérielle du Commonwealth - une instance composée de neuf pays et chargée de veiller au respect des principes de l’organisation -, qui a fustigé le maintien de l’état d’urgence, la non-restauration des droits civiques, l’absence de la justice ainsi que le refus du général Musharaf de démissionner de l’armée. Lors d’une réunion, le 12 novembre à Londres, le groupe avait donné dix jours au président pakistanais pour obtempérer. Le coup d’Etat du général, en 1999, avait déjà entraîné la suspension du Pakistan pendant cinq ans. Malgré les réticences de la Malaisie, la décision prise, à Kampala, de suspendre le Pakistan l’a été à l’unanimité, fait rare de la part d’une organisation hétéroclite au sein de laquelle le consensus a été difficile à trouver dans le passé.
A priori, la portée de cette suspension est limitée. Créée en 1931, qualifiée de « rayon de lune, incassable et insaisissable » par Winston Churchill, dépourvue d’unité géographique, cette association regroupant aujourd’hui 53 pays n’a ni charte, ni structure juridique ou administrative, à l’exception d’un secrétariat basé à Londres. Le lien entre les pays de l’ex-empire est essentiellement culturel, technologique, sportif et concerne l’aide au développement.
Présent sur tous les continents, le Commonwealth représente près de deux milliards d’habitants. Ses membres partagent le régime parlementaire copié sur le palais de Westminster et un système judiciaire basé sur le Common law (droit commun britannique). L’organisation a également une vocation économique régionale comme l’atteste la participation du Mozambique, ancienne colonie portugaise, ou la candidature du Rwanda, ex-possession belge.
Islamabad « regrette profondément » sa mise à l’index
Le Pakistan « regrette profondément » la décision du Groupe d’action ministérielle du Commonwealth (CMAG) de le suspendre de l’organisation anglophone. Cette mesure de rétorsion, prise à Kampala (Ouganda) jeudi 22 novembre, « ne prend pas en compte les conditions qui ont prévalu au Pakistan » pour décider de décréter l’état d’urgence le 3 novembre, a réagi, dans un communiqué, le ministère pakistanais des affaires étrangères. Les autorités d’Islamabad justifient l’état d’urgence par la nécessité de lutter contre la menace du terrorisme islamiste. « La décision du CMAG n’est pas raisonnable et est injustifiée », ajoute le communiqué, qui conclut : « Le Pakistan entend revoir ses liens avec le Commonwealth et sa coopération avec cette organisation. » - (AFP.)