Le Labour Party Pakistan (LPP — Parti du travail du Pakistan) a eu quelque mal à réunir son quatrième congrès national : il a dû le reporter par deux fois pour cause de répression, mais aussi pour mieux consacrer ses forces aux grandes luttes démocratiques qui ont marqué l’année 2007. Le congrès s’est finalement tenu les 8 et 9 décembre derniers, quelques jours avant que l’état d’urgence, imposé six semaines plus tôt par le général-président Musharraf, ne soit formellement levé. [1]
Pour saisir la « fenêtre d’opportunité » ouverte par une réduction (toute relative) de la répression et pour discuter en urgence des tâches politiques, le congrès a été convoqué en une semaine. Dans ces conditions, un certain nombre de délégués n’ont pu venir. Néanmoins, ce sont 126 délégués représentants toutes les régions et 35 observateurs qui se sont retrouvés dans l’auditorium de la Commission des droits humains du Pakistan, à Lahore, avec pour ordre du jour la situation internationale et nationale, ainsi que les choix organisationnels.
La discussion internationale a porté sur le Venezuela (les délégués ont regretté manquer de temps pour l’approfondir), la « guerre contre la terreur » de Washington et ses effets dans les pays musulmans, la mondialisation impérialiste et les résistances qu’elle suscite, la crise climatique. Sur la situation au Pakistan, les débats se sont concentré sur les récentes mobilisations des avocats, étudiants, militants sociaux et médias, ainsi que sur l’analyse du régime Musharraf, qualifié de « dictature faible » n’ayant pas réussi à gagner un soutien de masse par le biais d’une croissance économique. L’imposition de l’état d’urgence, le 3 novembre 2007, avait pour objectif premier de se débarrasser d’une magistrature devenue trop indépendante et de préparer des élections frauduleuses. Dans ces conditions, le congrès a unanimement repris à son compte l’appel a boycotter les prochaines législatives, lancé par le mouvement des avocats.
Sur les questions d’organisation, le congrès a traité des différentes tactiques de construction du parti. Les statuts du LPP ont été amendés pour les rendre plus démocratiques, avec notamment la création de 5 secrétariats (éducation et culture, mouvement ouvrier, paysan, femme, étudiant) aux activités coordonnées par un secrétaire général. Un nouveau drapeau a été adopté (une étoile blanche sur fond rouge). Décision a été prise de créer une nouvelle organisation étudiante. Le débat a été particulièrement vif sur l’amendement (finalement accepté par 7 voix de majorité) limitant à deux mandats (quatre ans) l’élection des responsables nationaux. Toutes les régions sont représentées dans le comité national de 21 membres — dont 6 femmes (elles n’étaient que 2 précédemment) — élu à bulletin secret. Le comité exécutif national comprend 7 membres. Nisar Shah, un avocat récemment libéré après 18 jours de détention et ancien président du LPP, occupe le poste de secrétaire général ; Farooq Tariq, la nouvelle fonction de porte-parole national.
Dans la foulée du congrès, un séminaire du Mouvement démocratique du peuple (Awami Jamhoori Tehreek — AJT —, une coalition de six petits partis de gauche), s’est tenu avec plus de 450 participants, dont de nombreux jeunes de différentes organisations. Les intervenants comprenaient des dirigeants du mouvement des avocats et des étudiants. La campagne de boycott des élections a été largement discutée : comment lui donner un caractère de masse afin de créer une alternative aux grands partis traditionnels ? Comment impliquer les milieux les plus populaires ? Comment s’assurer que la gauche gagne l’initiative politique dans ce combat contre le régime Musharraf ?
Face à des échéances cruciales, dans une situation qui reste à la fois très instable et répressive [2], le LPP a lancé une campagne financière nationale. Il en appelle aussi à la solidarité internationale. Les conditions dans lesquelles le congrès a été convoqué n’ont malheureusement pas permis aux organisations étrangères d’y participer. Mais le LPP a reçu de nombreux messages de la LCR et d’ESSF (France), du RSB (Allemagne), du CADTM (Begique), du Centre international Olof Palmer (Suède), Toni Usman (Norvège), du DSP (Australie), de l’Afghan Labour Revolutionary Organization (Afghanistan), du PCIML Libération et de VAK (Inde), du NSSP (Sri Lanka), du GFront (Népal), de la JRCL (Japon), d’ISO, du Labour Militant Voice et du Freedom Socialist Party (Etats-Unis), du Parti communiste cubain, de la Quatrième Internationale… Un engagement solidaire qui doit se poursuivre et accompagner jusqu’à son terme le combat contre la dictature pakistanaise.