Dijon, Montpellier, Roubaix, Grenoble… Le nombre des accords de premier tour entre le PS et le Modem est significatif. Il faut y ajouter la participation de membres du parti centriste dans d’autres villes importantes, telles que Lyon et Tours. Rien d’étonnant, après le flirt poussé entre Royal et Bayrou lors de la présidentielle, et vu les politiques libérales-sociales appliquées par toutes ces municipalités. Il reste qu’il s’agit d’un pas important, qui confirme et commence à matérialiser la politique d’alliance au centre.
C’est cependant la situation parisienne qui polarise l’attention. Après des manœuvres d’approche, le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a spectaculairement confirmé, le 6 février, sa proposition d’alliance de second tour : « Je suis prêt à rassembler […]. Cela peut concerner des forces du centre, le Modem, je dis les choses. » Accueilli avec satisfaction par ses partenaires putatifs, le message a provoqué la consternation chez ses associés actuels (Verts, PCF) et dans des secteurs du PS parisien, sans qu’il soit toujours aisé de distinguer ce qui relève de l’indignation sincère, du calcul électoral (comme dans le 20e arrondissement, où le candidat Modem est l’ancien maire d’arrondissement chiraquien, largement rejeté par les électeurs de gauche), de ce qui exprime surtout la crainte de voir échapper des postes. Toujours est-il que Delanoë vient de mettre un bémol, en affirmant notamment que, contrairement à ce qu’il avait laissé entrevoir, il ne céderait pas au Modem les mairies du 5e ou du 14e arrondissement. Mais, sans écarter – et donc en confirmant – la possibilité de fusions des listes.
On ignore si, et comment, de tels accords se concrétiseront, mais on peut d’ores et déjà tirer deux conclusions. La première, de portée nationale, est que le principal concurrent de Royal au leadership du PS (et, au-delà, du pays) n’a en rien une politique ou une stratégie différentes. La seconde tient à l’inconsistance des postures de gauche adoptées par les Verts et le PCF. Denis Baupin, tête de liste parisienne des Verts, déclarait, le 12 février, « ne pas se voir dans un exécutif avec des gens de droite ». Mais l’hypothèse d’un accord Delanoë-Modem n’empêcherait pas les Verts de participer à leurs listes fusionnées, et Baupin a indiqué ne pas être en désaccord avec Cohn-Bendit, qui l’appelait à se rapprocher du Modem – comprenne qui pourra.
Quant au PCF, il aura fallu attendre le 20 février pour que son secrétaire fédéral, Patrice Bessac, emboîte le pas aux Verts en proclamant que, « si Marielle de Sarnez, bras droit de François Bayrou, est dans le gouvernement de la capitale, nous n’y serons pas ». Pas question cependant de déserter les listes Delanoë, où il figure dès le premier tour après avoir péniblement négocié huit postes éligibles de conseiller de Paris. Dans le même sens, le conseil national du PCF du 7 février avait rejeté une motion écartant la présence de candidats PCF sur des listes où figurerait le Modem, lui opposant la décision fracassante d’« encourager les communistes confrontés à ces situations à continuer à se battre pour assurer la réaffirmation claire et la visibilité, dans leur localité, des idéaux qui sont les nôtres et ceux de tous les progressistes »…
Naturellement, la LCR n’appellera en aucun cas à voter au second tour pour des listes de gauche qui deviendraient, en fait, des listes de droite. En revanche, nous tendons la main aux militants communistes, verts, socialistes, que toutes ces compromissions écœurent.