Communiqué de presse – 18 mai 2007
La démission de Paul Wolfowitz de la présidence de la Banque mondiale ne peut pas suffire
CADTM
Les termes feutrés utilisés par les communiqués officiels ne sauraient
cacher la réalité : Paul Wolfowitz a violé les règles de la Banque
mondiale ; alors qu’il se présentait en apôtre de la lutte contre la
corruption et le népotisme, il a accordé une augmentation de salaire
exorbitante à sa compagne Shaha Riza ; gravement mis en cause par
l’enquête interne, il a fait tout son possible pour rester en poste et n’a
annoncé sa démission – qui plus est au 30 juin seulement - que quand la
situation n’était plus tenable pour lui.
Pour le CADTM, il ne faut pas se laisser tromper par l’arrangement trouvé
dans le but de ne pas faire perdre la face à Paul Wolfowitz. Bien que le
Conseil d’administration ait « accepté » l’assurance qu’il avait agi «
avec éthique et de bonne foi », Paul Wolfowitz a en réalité été poussé à
démissionner après avoir commis une faute grave.
Le CADTM rappelle que cet épisode n’est pas isolé. Le gouvernement des
Etats-Unis avait mandaté la compagne de Paul Wolfowitz, juste après
l’agression militaire de mars 2003, donc avant qu’il ne préside la Banque
mondiale, pour lui demander d’étudier comment la Banque mondiale pouvait
intervenir financièrement en Irak, et ce – déjà – sans en informer le
staff de la Banque mondiale et au mépris des règles de fonctionnement de
cette institution.
Il est clair que la Banque mondiale est avant tout un outil de domination
géopolitique très important pour le gouvernement des Etats-Unis, les
principes démocratiques et les intérêts des populations pauvres n’étant
absolument pas pris en considération.
Tout le déroulement de cette histoire, de l’arrivée très contestée de Paul
Wolfowitz à la présidence jusqu’à sa démission annoncée, n’a été possible
que parce que la Banque mondiale présente des béances insurmontables :
nomination systématique d’un président ressortissant des Etats-Unis par la
seule volonté du président américain ; distribution anti-démocratique des
droits de vote (sur le mode « 1 dollar = 1 voix ») avec minorité de
blocage pour les Etats-Unis ; choix idéologiques très discutables au
profit d’un néolibéralisme aux conséquences dramatiques pour les
populations des pays en développement ; violation régulière de ses propres
statuts et de textes internationaux comme la Déclaration universelle des
droits de l’Homme.
Au-delà de l’affaire Wolfowitz-Riza, c’est donc toute l’action de la
Banque mondiale qu’il faut remettre en cause et pour laquelle il faut
demander des comptes. Pour le CADTM, le passif de la Banque mondiale dans
son ensemble est bien trop lourd pour que l’on puisse se contenter du
départ d’un de ses dirigeants, fût-il son président.
Le CADTM considère qu’une seule issue est moralement envisageable :
l’abolition de la Banque mondiale et son remplacement dans le cadre d’une
nouvelle architecture institutionnelle internationale.
Contacts :
Damien Millet, président du CADTM France,
france cadtm.org, 00 33 6 60 54 27 13
Eric Toussaint, président du CADTM Belgique,
international cadtm.org, 00 32 486 74 47 52
Paul Wolfowitz accepte finalement de démissionner de la présidence de la Banque mondiale
LEMONDE.FR avec Reuters et AFP | 18.05.07 | 06h04 • Mis à jour le 18.05.07 | 07h00
Paul Wolfowitz, président de la Banque mondiale, accusé d’avoir favorisé l’avancement de sa compagne, a accepté, jeudi 17 mai, de renoncer à ses fonctions, qu’il quittera le 30 juin, au terme d’une longue crise. « Les gens les plus pauvres au monde (...) méritent ce que nous pouvons faire de mieux. Il est maintenant nécessaire de trouver un moyen d’aller de l’avant », déclare-t-il dans un communiqué diffusé par le conseil d’administration de l’institution. Et d’ajouter : « J’annonce aujourd’hui que je démissionne de la présidence du groupe Banque mondiale à compter de la fin de l’année fiscale », soit le 30 juin.
« Les administrateurs prennent acte de la décision de M. Wolfowitz », a, pour sa part, indiqué le Conseil d’administration dans un texte dont la publication est intervenue après trois jours de délibération. Les 24 représentants du Conseil d’administration, qui représente les 185 Etats membres, ont précisé qu’ils avaient « accepté » l’assurance fournie par M. Wolfowitz, 63 ans, qu’il avait agi « avec éthique et de bonne foi » en ordonnant personnellement l’avancement de sa compagne, Shaha Riza, également employée de l’institution.
« Je suis satisfait qu’après avoir examiné les preuves, les administrateurs aient accepté l’assurance [que je leur ai fournie] que j’avais agi avec éthique et de bonne foi dans ce que je pensais être les meilleurs intérêts de l’institution », a répété M. Wolfowitz, dans son communiqué, qui illustre le compromis intervenu entre les deux parties.
« LES DISPOSITIFS DE LA BANQUE NE SE SONT PAS AVÉRÉS SUFFISAMMENT RIGOUREUX »
Les administrateurs ont ajouté qu’il était « clair au vu des éléments qu’un certain nombre d’erreurs ont été commises par plusieurs individus dans la gestion de cette affaire et que les dispositifs de la Banque ne se sont pas avérés suffisamment rigoureux pour faire face aux contraintes auxquelles elles ont été soumises ».
En reconnaissant implicitement l’ambiguïté des procédures de la Banque en matière de conflits d’intérêts, et la faiblesse des règles existantes - qu’ils se sont engagés à perfectionner - les administrateurs permettent à M. Wolfowitz de sauver la face, sans avoir à le disculper tout à fait.
De son côté, il ne part ni sur une faute, ni sous le coup d’accusations humiliantes, ce qui était, de son point de vue, inacceptable. M. Wolfowitz, qui présidait la Banque mondiale depuis juin 2005, « ne démissionnera pas sous le feu », avait averti, mercredi, son avocat, Robert Bennett.
« Le contrat de M. Wolfowitz, exigeant qu’il adhère au code de conduite pour les membres du conseil et qu’il évite tout conflit d’intérêt, réel ou apparent, a été violé », avait, de son côté, conclu une commission d’enquête interne dont le rapport avait été remis lundi. Les appels à la démission se sont faits de plus en plus insistants après la publication de ce rapport, notamment de la part de l’Allemagne où M. Wolfowitz devait assister ce week-end à un conseil des ministres des finances du G8, dont les Etats membres sont les premiers contributeurs de la Banque mondiale.
IL A « COMPLÈTEMENT SAPÉ LES PRINCIPES DE BONNE GOUVERNANCE »
Le président américain, George Bush, qui souhaitait le voir rester à son poste, a accepté sa démission à contrecœur, a fait savoir Tony Fratto, porte-parole de la Maison blanche, selon lequel un nouveau candidat sera désigné prochainement. La présidence de la Banque mondiale est traditionnellement dévolue à une personnalité américaine et M. Bush entend bien perpétuer cette tradition, a souligné un membre de l’équipe présidentielle ayant requis l’anonymat.
La liste des éventuels successeurs de M. Wolfowitz s’allonge chaque jour depuis le début du scandale. Outre l’ancien représentant américain au commerce Robert Zoellick toujours favori, sont désormais cités : l’actuel numéro deux du Trésor, Robert Kimmitt, ou Paul Volcker, ancien président de la FED, qui pourrait assurer une période d’intérim.
Le personnel de la banque s’est, quant à lui, réjouit de cette issue. « Tout le monde courait dans les allées, applaudissait et s’embrassait », raconte un employé. L’affaire a soulevé une vague d’indignation parmi les 10 000 salariés de l’institution, dont les représentants sont allés jusqu’à écrire au Conseil d’administration pour se plaindre des conséquences sur leur travail, notamment dans la lutte contre la corruption. L’association du personnel, à l’origine de l’enquête sur la promotion de Shaha Riza, juge la date du 30 juin inacceptable et exige la mise en disponibilité immédiate de Wolfowitz, qui a, selon elle, « complètement sapé les principes de bonne gouvernance » qu’elle s’efforce de maintenir.
Paul Wolfowitz négocierait son départ de la Banque mondiale
Le Monde.fr avec AFP LEMONDE.FR | 17.05.07 | 18h03 • Mis à jour le 17.05.07 | 18h18
Après une crise de six semaines, l’avenir de Paul Wolfowitz à la tête de la Banque mondiale devrait finalement être décidé, jeudi 17 mai. Selon des sources proches de la Banque, les administrateurs de l’institution et les avocats de Paul Wolfowitz travaillent actuellement à la finalisation d’un scénario de sortie permettant au président de démissionner sans perdre totalement la face, car l’institution assumerait une partie des faits qui lui sont reprochés.
L’annonce de la démission de M. Wolfowitz pourrait être rendue publique dès l’issue d’une réunion du conseil d’administration de la Banque. Celui-ci poursuit, jeudi, l’examen des conclusions d’un rapport du comité ad hoc, qui estime que Paul Wolfowitz avait enfreint son contrat de travail, le code de conduite de la Banque et trois des règles s’appliquant au personnel en assurant personnellement l’avancement de sa compagne, Shaha Riza, également employée de l’institution.
UNE LISTE DE REMPLAÇANTS CIRCULE
Pour l’instant, ni les avocats de M. Wolfowitz ni la Banque mondiale n’ont confirmé la teneur de ces négociations. L’avocat de M. Wolfowitz, Robert Bennett, a réitéré à l’agence Reuters que « dans ce contexte, il ne démissionnera pas ». Le New York Times rapporte cependant que « des responsables de l’institution ont déclaré qu’ils étaient confiants, qu’une solution se dessinait, mettant fin à ce qui était devenu un affrontement cinglant entre la Banque, l’administration Bush et les ministères des finances du monde ».
Le quotidien américain ajoute, en citant des sources proches des négociations, « que lors de ces dernières 24 heures, M. Wolfowitz a défié le conseil de le désavouer, sachant que les Etats-Unis s’opposeraient à un tel licenciement. Auparavant, M. Wolfowitz avait fait tout pour éviter un vote au conseil ». Or, la Maison Blanche, qui avait jusqu’alors « pleinement » soutenu l’ancien membre de l’administration Bush, a changé de ton, mercredi, indiquant que toutes les hypothèses étaient désormais en discussion.
Paul Wolfowitz a annulé, mercredi, sa venue en Slovénie pour la Conférence annuelle sur le développement économique de la Banque mondiale, sans donner d’explications. Le New York Times a déjà établi une liste de ses possibles successeurs, au premier rang desquels on retrouve l’ancien président de la Réserve fédérale (Fed), Paul Volcker, le gouverneur de la Banque d’Israël, Stanley Fischer, ou encore Tony Blair. Deux proches de George Bush sont également mentionnés : Robert M. Kimmitt, numéro deux du département du Trésor, et Robert B. Zoellick, ancien du département d’Etat.
Banque mondiale : Paul Wolfowitz implore la clémence, le soutien de la Maison Blanche fléchit
La position de Paul Wolfowitz à la tête de la Banque mondiale devient de plus en plus précaire. Face aux administrateurs de l’institution, l’ancien numéro deux du Pentagone, menacé de destitution, a imploré la clémence, mardi 15 mai, en promettant de changer ses méthodes de gestion. Mais la Maison Blanche, soutien jusque-là sans faille, a elle-même changé de ton en expliquant que « toutes les options [étaient] sur la table » quant au devenir de M. Wolfowitz.
Accusé de népotisme, le président de la Banque mondiale a réfuté point par point les conclusions publiées lundi par le comité ad hoc, selon lesquelles il avait violé les règles déontologiques de l’institution en accordant des augmentations de salaire à sa compagne. « Vous avez encore la possibilité d’éviter des dégâts à long terme en résolvant cette affaire d’une façon juste et équitable qui reconnaisse que nous avons tous essayé de bien faire, même si nous n’y somme pas parvenus parfaitement », a déclaré M. Wolfowitz, sur un ton suppliant. « J’implore chacun de vous d’être équitable en prenant votre décision car celle-ci affectera non seulement ma vie mais elle affectera aussi la manière dont l’institution est considérée aux Etats-Unis et dans le monde. »
« UN NOMBRE DE CHOSES SIGNIFICATIVES QUE J’AI BESOIN DE MODIFIER
»
Mardi, le président de la Banque mondiale a essayé de démontrer que les torts étaient partagés. Il a ainsi réaffirmé qu’il avait agi sur « instruction » du comité d’éthique et que les augmentations de salaire accordées à sa demande faisaient partie d’un accord « raisonnable ». Au-delà de l’affaire de conflit d’intérêts, M. Wolfowitz, 63 ans, est revenu sur ses méthodes de gestion, qui sont selon lui la véritable raison de sa mise en cause. « Il y a un certain nombre de choses significatives que j’ai besoin de modifier pour regagner la confiance du personnel », a-t-il reconnu en notant qu’il s’était trop appuyé sur ses conseillers personnels.
Le soutien de la Maison Blanche a lui-même fléchi mardi : « Nous faisons confiance à Paul Wolfowitz », a confirmé mardi son porte-parole, Tom Snow. Mais ce dernier a ensuite reconnu que la présidence de l’institution internationale pourrait changer de tête, une fois la procédure achevée : « A un certain moment dans l’avenir, des débats devront être menés quant à la direction de la Banque mondiale. Dans ce sens, toutes les options sont sur la table. » D’ici là, le conseil d’administration doit à nouveau se réunir mercredi afin de poursuivre ses délibérations.