Robin Delobel : Pourquoi avoir lancé une campagne contre le microcrédit ?
Fatima Zahra El Belghiti : Nous avons lancé depuis 2012 la compagne contre les abus des institutions du microcrédit. En fait nous avons suivi et accompagné les luttes de leurs victimes, surtout les femmes, qui ont éclaté au sud-est du Maroc, dans le contexte des révoltes populaires qui ont embrasé la région depuis 2011.
Cela nous a permis de comprendre et de montrer comment ces micro-crédits sont des instruments, non pas pour combattre la pauvreté, mais pour réaliser des profits sur le dos des pauvres par des taux d’intérêts élevés. Ils s’insèrent dans la logique des politiques libérales de la Banque mondiale en faveur de la finance internationale. Nous les considérons comme des dettes privées illégitimes et nous revendiquons leur annulation.
Au Maroc les femmes recourent aux microcrédits, mais face à des taux d’intérêt abusifs, elles tombent rapidement dans l’incapacité de remboursement et sont harcelées par les institutions du microcrédit
RD : En quoi le microcrédit touche-il plus les femmes
FZEB : Au Maroc les femmes représentent la moitié des « clients » des IMFs (Institution de microfinance). En effet, elles sont les plus affectées par les mesures d’austérité et la privatisation des services publics depuis les années 80. Une grande majorité d’entre elles sont analphabètes, n’ont pas d’emploi et vivent dans la pauvreté alors qu’elles ont la responsabilité du foyer. Elles recourent aux microcrédits, mais face à des taux d’intérêt abusifs, elles tombent rapidement dans l’incapacité de remboursement. Elles sont alors harcelées par les institutions du microcrédit.
RD : Où en êtes-vous dans la mobilisation face aux instituts de microcrédit ?
FZEB : Les dettes privées illégitimes, dont le microcrédit, sont une composante de notre programme d’action. Les victimes nous contactent individuellement pour demander notre soutien. Nous essayons de porter conseil, mais en l’absence de leur organisation collective, on n’a pas les forces de résoudre au cas par cas un système d’arnaque qui concerne presque un million de victimes dans notre pays.
Source : Pour écrire la liberté
Robin Delobel Permanent au CADTM Belgique
Fatima Zahra El Beghiti Attac-CADTM Maroc
Robin Delobel
Fatima Zahra El Beghiti
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