Lundi 23 juillet, Jean Chesneaux est mort à l’âge de 85 ans. Jean Chesneaux a été Président du Conseil d’administration de Greenpeace France de 1997 à 2004.
C’est sous sa présidence que Greenpeace a réussi son véritable ancrage dans la société civile française. En citoyen du monde, Jean ne cessait de promouvoir l’idée d’un mouvement écologiste mondial pour faire face aux problèmes environnementaux planétaires.
Professeur émérite d’Histoire de l’Asie orientale à l’Université Paris VII, Jean était reconnu comme historien de la Chine et du Pacifique. Mais par dessus tout, Jean était un militant passionné de l’humanisme, du pacifisme et de l’écologie. Son engagement trouvait ses sources dans les voyages qui l’ont fait parcourir le monde. A l’image des héros de Jules Verne, son auteur fétiche, Jean s’inscrivait dans la lignée des géographes du XIXe siècle qui partaient pour découvrir, observer et décrire.
Ainsi, en 1985, quelques mois après que les services secrets français eurent plastiqué le Rainbow Warrior en Nouvelle Zélande, Jean entreprit un voyage à Auckland pour s’excuser au nom du peuple français.
Greenpeace doit beaucoup à Jean Chesneaux et est honoré d’avoir fait un bout de chemin avec cet homme extraordinaire qui, par exemple, déclarait dans un entretien donné à La République des Lettres en décembre 1996 à l’occasion de la sortie d’un de ses livres « Habiter le temps » aux éd. Bayard : « Autre élément de la genèse du livre qui est plus récent, c’est ma sensibilité à la crise de l’environnement. La crise de l’environnement c’est un peu la contrepartie d’une insatisfaction vis à vis d’une histoire enfermée dans le seul passé, c’est la nécessité d’une interrogation sur l’avenir. La conscience humaine - autre versant de notre temporalité bi-directionnelle - est en même temps capable de maîtriser sa relation en amont et sa relation en aval. L’aval, c’est l’avenir de la planète dans ses rapports avec l’avenir de nos sociétés. Quelle terre laisserons-nous à nos enfants ? C’est une interrogation qui à elle seule est aussi forte que toute l’interrogation sur tout le patrimoine historique. En une seule phrase cela pèse aussi lourd que les millions de pages écrites sur l’histoire de l’humanité » (lire la totalité de l’interview)
« Discuter avec Jean était un voyage dans le temps et dans l’espace. Son regard était plein de curiosité et de chaleur humaine, ses yeux pétillaient sans aucune lueur de pessimisme » témoigne Pascal Husting, directeur de Greenpeace France.
« C’était un grand homme, un homme auprès de qui on s’élève. Ses connaissances et ses analyses, qu’il aimait tant partager, étaient inépuisables. Avec beaucoup de finesse, il comprenait et analysait les « tensions » à Greenpeace entre la nécessité de professionnalisme et dans le même temps le besoin de faire vivre un mouvement dynamique de citoyens pour encourager le changement » déclare Gerd Leipold directeur international de Greenpeace.
Du 27 au 31 août, France Culture rendra hommage à Jean Chesneaux en diffusant à 20 heures les entretiens qu’il avait accordé à Thierry Paquot début 2006.
Le 27 août : Un intellectuel engagé ?
Qu’est ce qu’un « intellectuel franc-tireur » ? Dans ce premier entretien, Jean Chesneaux nous parle de la France occupée, période durant laquelle il fût arrêté et emprisonné pendant quinze mois à Fresnes. Il évoque également ses récents combats pour la laïcité et revient sur les différents débats autour des notions d’esclavage et de colonisation.
Le 28 août : Chine : mode d’emploi.
Cette seconde séance permet de suivre Jean Chesneaux en Chine, où il s’est rendu douze fois de 1948 à 2002. Il explique sa fascination qu’il a pour ce pays, sa langue et ses peuples, et justifie son rejet de l’occident, arrogant et sûr de lui. Il trouve chez Confucius et aussi dans le tao des principes de vie auxquels il adhère. Bien sûr, il s’inquiète de l’urbanisation accélérée et désordonnée de la Chine actuelle et revient, avec un rare courage, sur « son » maoïsme.
Le 29 août : L’art du voyage.
Ayant pris volontairement sa retraite à 56 ans, Jean Chesneaux profite de son temps libéré des contraintes habituelles pour voyager, c¹est à dire « aller voir », enquêter, observer et témoigner. Car au voyage s’associe l’écriture d’articles ou de livres, comme sur le Pacifique (douze voyages et un réel engagement auprès de Tjibaou). Jean Chesneaux donne quelques conseils au voyageur sans mépriser le touriste abonné aux tours organisés.
Le 30 août : L’irruption écologique.
Enthousiaste de mai 68, soucieux des « mondes paysans » (il connaît bien l’histoire agricole de la Chine et du Vietnam) Jean Chesneaux sera un des premiers à soutenir le combat des paysans du Larzac. C’est par ce biais qu’il découvre l’écologie et en fait le fer de lance de ses nouvelles luttes. Il pense alors les dégâts du progrès, remet en cause la croissance, prône un art du temps, bref, espère réconcilier l’homme avec lui-même et avec la nature.
Le 31 août : Les chemins parcourus.
La dernière séance n’est pas un bilan un tant soit peu académique de sa vie mais la découverte et l’ouverture à de nouvelles rencontres et passions, l’appréciation critique de son propre passé et l’évocation de certains « amis » fidèles (Benjamin, Orwell, Brecht), des écrivains et des militants. C’est aussi une recommandation : être en accord avec soi, vivre selon ses principes.