L’événement date un peu, mais il vaut la peine d’y revenir. Le 20 septembre dernier, Libération, dans ses pages « Rebonds », publiait deux tribunes contrastées relatives à la politique de l’immigration. Faut-il y voir une intention maligne ? Rien que de très classique, a priori, dans cette confrontation entre la gauche (Manuel Valls, maire d’Évry, député PS de l’Essonne) et la droite (Étienne Pinte, maire de Versailles, député UMP des Yvelines).
Confrontation entre la gauche et la droite ? On lit ainsi : « Trop longtemps, en matière d’immigration, la gauche s’est trouvée ballottée entre le discours de la droite et celui des associations », puis : « Les mesures en faveur de l’accueil des populations d’origine immigrée doivent, en second lieu, s’accompagner de dispositifs tendant à mieux encadrer les flux migratoires. » Avec des mesures concrètes à la clé : « Il est d’abord indispensable de renoncer au principe de la régularisation systématique porté par certaines associations. Ce genre de mesures crée des “appels d’air” qui condamnent ceux qui les prennent à vouloir vider le tonneau des Danaïdes. Il faut donc assumer une politique de reconduite aux frontières dans le respect du droit des personnes. »
Et puis : « Il ne faut pas craindre d’aborder la problématique des quotas, même si cela nécessite une révision de notre Constitution. » Mais qui reprend ainsi à son compte tous les poncifs nauséabonds anti-immigrés ? Manuel Valls !
Quant au maire UMP de Versailles, il écrit : « Comment peut-on parler de quotas lorsqu’on s’adresse à des hommes, des femmes et des enfants ? », qu’il juge « insupportable de fixer des chiffres de reconduite à la frontière », dénonce « une chasse à l’homme » dont sont victimes « une grand-mère en train de faire sa toilette ou une famille tchétchène ». Il rappelle la dette de la France envers les immigrés qu’elle a fait « venir dans notre pays pour travailler dans nos mines et nos usines », qui travaillent « dans les services à la personne » et « qui nous ont aidés à nous libérer et ont versé leur sang pour nous ». Voilà donc où en est la gauche « libérale autoritaire » : en situation de se voir donner une leçon d’humanisme par un notable de droite !