Je vous remercie d’être venus, et je pense que notre présence de nous tous ici à Paris aujourd’hui est très, très importante, pour montrer aux gens qui se rassemblent en ce moment même à Moscou et dans d’autres villes de Russie, qu’ils ne sont pas seuls, pour leur montrer que dans d’autres pays, à Paris en tout cas, des gens comprennent ce qui se passe, et qu’ils font preuve de solidarité. Nous sommes rassemblés aujourd’hui en mémoire de Stanislas et d’Anastasja, qui ont été sauvagement tués dans le centre de Moscou le 19 janvier.
Je voudrais rappeler que ce n’étaient pas des gens comme tout le monde. L’un, Stanislas, était avocat, très compétent, très courageux, qui prenait toujours les affaires politiquement les plus dangereuses à défendre. Anastasja, ce n’était pas seulement une journaliste, très courageuse également, qui essayait au maximum de faire la lumière sur les affaires les plus sensibles. Tous les deux n’étaient pas seulement avocat et journaliste. C’étaient des gens qui se disaient militants, et qui militaient en Russie. C’étaient des gens symboliques d’une nouvelle génération en Russie, des gens qui essaient de se redresser, qui essaient de se battre pour leurs droits, qui essaient de vivre une vie pleinement citoyenne dans un système qui laisse peu de possibilités pour ça. Et c’est pour ça que leur mort, que leur assassinat, a fait une très grande émotion dans les milieux militants en Russie, qui commencent à grossir et à grossir.
Anastasja et Stanislas étaient aux côtés des gens qui se battaient au quotidien, aux côtés des habitants qui luttaient contre les expulsions ; aux côtés des militants écologistes qui essayaient de s’opposer aux appétits des sociétés immobilières qui voulaient détruire les espaces verts et les forêts ; aux côtés des Tchétchènes qui subissaient les exactions de l’armée russe ; aux côtés des militants syndicaux qui essayaient de défendre leurs droits dans les usines contre les appétits des capitalistes et des oligarques. Ils sont morts à cause de ça ! Ils sont morts parce qu’on ne veut pas en Russie laisser la possibilité aux gens de lutter pour leurs droits.
Et donc on est rassemblés ici en leur mémoire. Et je voudrais dire que leur mort est intervenue alors que depuis plusieurs mois les exactions contre les militants du social, les militants syndicaux, les militants écologistes se multipliaient ; alors qu’il y avait plusieurs rassemblements et des pétitions en Russie, pour réclamer que la justice soit faite, et que des enquêtes soient faites ! Or, rien n’a été fait ! Et donc le 19 janvier ils ont été assassinés.
Le 30 novembre, Stanislas, et Anastasja également, était avec nous à Moscou, alors qu’on manifestait justement pour demander justice, pour demander que les crimes contre la justice s’arrêtent ! Et à cette occasion, Stanislas avait fait un discours à la tribune, et je voudrais, si vous permettez, vous lire ce qu’il a dit. D’abord en russe, et après je ferai la traduction. En sa mémoire. (…en russe…). En français ça donne ça, et je rappelle que c’est Stanislas qui parle : « Je suis fatigué de voir mes amis dans des chroniques criminelles. Nous avons tous besoin de protection. Nous avons besoin de protection contre les nazis, contre les fascistes, nous avons besoin de protection contre les structures mafieuses, nous avons besoin de protection contre les organes de maintien de l’ordre, qui sont au service de ces pouvoirs mafieux. Nous avons tous besoin de protection et nous comprenons très bien que c’est seulement nous qui pouvons nous offrir et organiser cette protection. Personne d’autre ne le fera pour nous. Ni dieu, ni le tsar, ni la loi. Seulement nous même. Et alors, si nous nous soutenons l’un et l’autre, si nous nous défendons l’un et l’autre, alors seulement en ce moment-là on arrivera à faire quelque chose. »
C’était cela Stanislas, au meeting à Moscou contre les crimes envers les gens qui luttent pour la justice, le 30 novembre. Nous n’oublierons pas ! - je répète le slogan que disent tous les manifestants en ce moment dans les villes de Russie : Nous n’oublierons pas ! Nous ne pardonnerons pas ! Nous continuerons la lutte ! Donc, une minute de silence.