En quelques heures, la nouvelle s’est répandue. Un nouveau variant du Sars cov2 a été séquencé, d’abord au Botswana avec trois cas, puis en Afrique du Sud avec six cas. Le nouveau variant B.1.1.529 présente 32 mutations sur la protéine spike, un chiffre record.
La protéine spike qui permet au virus de pénétrer les cellules humaines, et qui est à la base de toute la stratégie de vaccination contre la Covid. Ce nouveau variant serait plus infectieux, c’est à dire rentrerait plus facilement dans les cellules humaines grâce à ces mutations, et échapperait plus facilement aux anti-corps anti-covid, de la vaccination ou des patients guéris. Ce qui potentiellement veut dire que les vaccins pourraient être moins efficaces en terme de protection contre le nouveau variant, alors qu’ils étaient resté bien protecteur face au delta, et que les patients qui ont déjà eu la covid pourraient plus facilement se réinfester.
Mais l’information clef pour l’avenir, c’est la transmissibilité, c’est à dire la capacité de se transmettre d’un individu à un autre, ce qui est différent de l’infectivité, la capacité à pénétrer la cellule. On a peu d’information sur ce dernier point capital, car il faudra du temps pour bien l’établir. Cependant, une mauvaise nouvelle est rapportée par le Dr Susan Hopkins, médecin chef de l’Agence de Sécurité Sanitaire de Grande Bretagne. Le R temporel, c’est à dire le taux de reproduction du virus à un moment donné, a bondi à 2 dans la région du Gauteng, en Afrique du Sud, où le nouveau variant a été retrouvé. Sans qu’on sache cependant si le B.1.1.529 est déjà dominant dans la région, et donc responsable du fait qu’une personne en contamine deux autres, un chiffre qui a presque doublé ! Prudence donc.
Aujourd’hui, on apprend que le nouveau variant a été retrouvé chez une jeune femme non vaccinée en Belgique, sans contact retrouvé avec l’Afrique Australe. Ce qui peut vouloir dire que le virus circule déjà hors de sa région d’origine. Cependant la patiente avait voyagé via l’Egypte et la Turquie en avion. Donc là aussi incertitude. Une personne a été retrouvée porteuse du variant à Hong Kong, après un voyage au Malawi. Israël vient d’annoncer son premier cas.
Huit pays européens, plus le Japon et Israël, ont immédiatement décidé de fermer leurs frontières aux voyageurs d’Afrique Australe. Une décision qui a fait réagir Christian Lindmeier, porte-parole de l’OMS, qui a déclaré lors d’un briefing à Genève que « l’OMS recommande que les pays continuent d’appliquer une approche scientifique et fondée sur les risques lors de la mise en œuvre des mesures de voyage (…) Et qu’à ce stade, encore une fois, la mise en œuvre de mesures de restrictions aux voyages est déconseillée ». Ces annonces et ces nouvelles restrictions ont fait chuter le rand sud-africain de 3% par rapport au dollar américain, soit son niveau le plus faible depuis un an. Tandis que la bourse de New York s’ouvrait à la baisse.
Alors que l’émergence du variant nu (Omicron) peut relancer encore la pandémie, et son cortège de morts, les seules annonces concernent les restrictions au transport. Un vrai scandale, car l’on sait que ce type de mesures ont déjà été inefficaces pour bloquer le variant delta !
Des annonces très politiques donc, et bien peu scientifiques, de gouvernements des pays riches qui flattent depuis le début le nationalisme vaccinal, et une illusoire fermeture des frontières. Or l’émergence de ce nouveau variant est un acte d’accusation terrible contre toutes les politiques de nationalisme vaccinal, qui privent de dose de vaccins les pays pauvres et notamment l’Afrique australe, où le delta était déjà né.
Un apartheid vaccinal qui fait que sur les 6,5 milliards de doses injectées, seulement 2,5% l’ont été en Afrique ! Un apartheid vaccinal pour défendre les profits des Pfizer et Moderna. Un apartheid vaccinal dénoncé depuis de longs mois par les activistes qui se battent pour la levée des brevets et de la propriété intellectuelle sur les vaccins, tests et traitements anti-covid. Un apartheid vaccinal qui favorise la circulation virale, et donc l’émergence de variants. Ce qui met en danger l’efficacité des vaccins.
La pandémie nous appelle au contraire à la solidarité, au partage des doses, à l’augmentation urgente des capacités de production, à une campagne ultra-rapide de vaccination en Afrique australe pour ralentir la diffusion virale et protéger le monde, comme cela aura du être fait en juin face à l’explosion virale en Inde, qui a fait probablement plus d’un millions de morts. Cette politique a un nom. C’est la levée des droits de propriété, la levée des brevets !! Les capitalistes la refusent pour défendre les 1000 dollars par seconde que les brevets sur les vaccins covid leur rapportent. L’éditorial de juillet 21 du British Médical Journal n’hésitait pas à dénoncer cette politique comme « un crime contre l’humanité ».
Pour le variant nu comme pour le variant delta, il est probable que la mutation soit apparue chez une personne vivant avec le VIH/Sida, avec une baisse de profonde de l’immunité, car non traitée contre le VIH. Pour le delta, c’est ce que suggéraient les études d’infectiologie dans la baie de Nelson en Afrique du Sud. Hier « les malades sont au sud, les traitements sont au nord » pour le sida. Et les capitalistes de la pharmacie qui osaient mettre en procès l’Afrique du Sud pour sa loi de 1997, qui l’autorisait à fabriquer et importer des génériques contre le VIH. Avec à la clef 400 000 morts supplémentaires. Aujourd’hui l’apartheid vaccinal. Terrible conjonction.
Le 30 novembre s’ouvre à Genève la réunion inter-ministérielle de l’OMC. C’est déjà un scandale que ce soit une instance sur le commerce qui décide de fait de la politique sanitaire face à la pandémie. C’est un scandale que depuis un an l’Union Européenne, Macron, la Suisse, bloquent la demande de levée des droits de propriété intellectuelle sur la covid. Le prix à payer, c’est 10 000 morts par jour depuis un an ! Et maintenant ce que nous craignions tous, l’émergence d’un nouveau variant. Et les ONG, syndicalistes, activistes du Sud qui voulaient aller à Genève pour clamer leur colère seront de fait interdit de se rendre devant l’OMS. Hier déjà avec les difficultés à faire reconnaître leur vaccination par la Suisse, aujourd’hui car ils risquent d’être bloqués dans les aéroports, ou d’errer à Genève.
Ainsi Fatima Hassan, l’infatigable avocate sud africaine de Health Justice Initiative, ne devrait pas pouvoir aller à Genève et déclare : « les personnes noires et brunes seront interdites de voyage, mais on ne votera pas de dérogation. C’est l’apartheid du vaccin. L’OMC, l’UE et le Royaume-Uni n’aiment pas que leurs nombreux anciens sujets coloniaux le disent, mais cacher la vérité n’aidera pas. L’interdiction de voyager est également anti-science, n’a aucun sens. Les pays qui nous interdisent de voyager nous ont également empêchés d’avoir accès à des vaccins vitaux en même temps qu’eux. Les personnes qui bloquent la dérogation sont celles qui nous interdisent de voyager. Nous avons mis en garde lorsque la dérogation a été proposée pour la première fois : vaccinez tout le monde, partout, rapidement, à cause des variants. Je devais me rendre au MC 12, mais je ne peux pas – mes vols transitent par des zones qui ne permettront pas aux Sud-Africains d’atterrir, la Suisse ne m’a pas encore donné de certificat de vaccination, même si je suis doublement vacciné avec Pfizer, ce qui signifie que je mangerais dehors dans le froid et que je ne pourrais entrer dans aucun bâtiment ou café – alors reportez le MC 12 – oui s’il vous plaît, reportez ».
Le 30 novembre, jour de l’ouverture de la session de l’OMC, un cri doit jaillir. Levez les brevets ! Levez les droits de propriété. Quand ? Maintenant !
Frank Prouhet, France, Collectif Brevets sur les vaccins anti covid, stop. Requisition. 26 Novembre