• Parle-nous de cette victoire et de ta commune ?
Mohand Saddek Akrour – Malgré d’importants acquis, le mouvement populaire de 2001 [en Kabylie, NDLR] a connu une fin décevante, au regard des énergies que nous avions déployées. J’ai rompu avec les auberges espagnoles qui produisent ce genre de gâchis, et j’ai décidé de m’organiser politiquement au PST. L’ouverture politique prônée par ce dernier donne aujourd’hui, comme premier fruit, la victoire que nous venons d’obtenir à Barbacha. C’est une commune rurale de plus de 20 000 habitants, à une quarantaine de kilomètres de Bejaïa (Kabylie). Nous avons obtenu 66 % des voix exprimées, ce qui nous donne six sièges sur les neuf à pourvoir. Cette victoire est aussi le prolongement du score honorable que le PST a réalisé aux législatives du 17 mai dernier, même si nous n’avions pas eu de députés. L’objectif de visibilité que nous nous sommes assigné avait déjà été largement atteint.
• Comment s’est déroulée la campagne ?
M. S. Akrour – Le pouvoir a accouché d’une loi électorale scélérate, qui nous a obligés à quémander le parrainage de milliers d’électeurs pour chaque wilaya (« département ») et de quelques centaines d’électeurs pour les communes, même les plus petites. Aucun parti ou groupe n’a pu recueillir ces parrainages pour les wilayas. Au niveau national, le PST n’a pu se présenter que dans six communes. Toutefois, même après avoir dépassé toutes les contraintes imposées (légalisation des signatures par la mairie et leur validation par un magistrat), nos listes ont été rejetées par les services de la préfecture. Il a fallu un procès en référé pour qu’enfin nos listes soient acceptées. Du fait de toutes ces barrières, nous n’avons pas pu préparer, comme il se doit, notre campagne. Malgré cela et le manque de moyens matériels et financiers, nous avons réussi à organiser deux meetings par jour, entre 18 heures et minuit, pour toucher les travailleurs et les autres catégories sociales pauvres des villages les plus reculés. L’intox, la désinformation et les calomnies orchestrées à notre encontre par nos adversaires, les partis du pouvoir et ceux de la prétendue opposition de droite ou de gauche (à l’image du Front des forces socialistes, affilié à l’Internationale socialiste) n’ont pas pu nous affaiblir. Nous avons réussi notre campagne, pleinement, à Barbacha, mais aussi à Tichy, Aokas et Adekar. Notre discours – 100 % à gauche – a été adopté par la population. Même sous la pluie et dans le froid de nos montagnes, des centaines de personnes nous ont obligés à débattre avec elles pendant plusieurs heures.
• Et maintenant, quelles sont les perspectives ?
M. S. Akrour – Nous avons pu balayer le tribalisme et le régionalisme, qui sont de mise en Kabylie. Nous avons aussi réussi à avoir un vote hautement politique. C’est ainsi que notre victoire est perçue, par les masses locales, et même à l’échelle régionale et nationale, comme une bouffée d’espoir et de dignité retrouvée. Nous avons obligé la presse bourgeoise à parler du PST et de cet espoir que nous avons réussi à susciter. Ce n’est qu’un début, le chemin est difficile mais, par cette modeste victoire, nous venons de montrer qu’il est possible de réussir et de semer les germes de la révolution socialiste. Nous sommes donc en marche.