Les lois de décentralisation de 2003 ont moins concerné les communes que les régions et les départements, mais le désengagement de l’État d’une série de secteurs, en particulier du domaine social, pèse considérablement sur leurs engagements : quand l’État ne fait plus, la commune doit-elle se substituer ? Ce débat touche de nombreux conseils municipaux. De ce point de vue, les « politiques de la ville » ne sont souvent qu’une vaste hypocrisie : d’un côté, l’État « n’assure plus » ; de l’autre, il pousse les villes à signer des contrats permettant le financement de quelques projets bien encadrés par les préfectures : on est bien loin du principe d’autonomie affiché ! Même la Cour des comptes a rendu un rapport sur les gâchis de cette politique
Concernant l’autonomie des communes, la distance entre l’affichage et la réalité est importante : ainsi, sur la question du logement, les communes semblent avoir une marge. Elles se dotent d’un plan local d’urbanisme (PLU), d’un plan local de l’habitat mais, dès lors qu’elles veulent rénover, réhabiliter leur parc de logements sociaux, elles doivent passer, de façon quasi obligatoire, pour obtenir des financements, par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), émanation directe de la loi Borloo, qui impose sa manière de voir : dans 99 % des cas de destruction, la reconstruction d’un parc social beaucoup moins étendu est à l’œuvre, la priorité est donné à l’accession à la propriété et les populations les plus pauvres partent.
L’État peut même prendre la place des collectivités locales, dans certains cas, en organisant une opération d’intérêt national : c’est ce qui se passe dans le Val-de-Marne, où une société d’aménagement va pouvoir se substituer aux douze communes concernées pour acheter du terrain, signer des permis de construire, créer de l’activité économique et du logement. En son temps, c’est ce qui avait permis de créer le site de la Défense…
Au 1er janvier 2006, 85 % de la population vivaient dans une structure intercommunale à fiscalité propre, 90 % des collectivités sont regroupées. Il est certain qu’une faible partie de ces citoyens a connaissance de la situation. Pourtant, ces structures, lorsqu’elles sont à fiscalité propre, fixent le montant de la taxe professionnelle, et elles prennent des décisions, par le biais d’assemblées non élues au suffrage direct, dans des domaines aussi importants que la politique d’aménagement du territoire ou du logement, les conseils municipaux ne gardant que des prérogatives limitées. Bien entendu, nous sommes favorables aux coopérations intercommunales, à la mutualisation des moyens, mais à condition que les habitants puissent débattre et contrôler. Tous ensemble.