Janvier 2024 |
N° 23 |
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Dans ce numéro : |
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_________________________________________________________________________ Publié par : Solidarité Socialiste avec les travailleurs en Iran http://www.iran-echo.com |
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Adresse : S.S.T.I, 21 ter, Rue Voltaire, 75011 Paris E-mail : sstiran yahoo.fr |
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L’université du « Global Labour Institute » 2023 et la participation de « Solidarité Socialiste avec les Travailleurs d’Iran »
Une centaine de syndicalistes de 28 pays différents se sont réuni.es du 27 au 29 novembre 2023 à l’université du « Global Labour Institute » (GLI).
« Solidarité Socialiste avec les Travailleurs d’Iran » a participé à cette université à l’invitation des organisateurs/trices de l’évènement. Vous trouverez ci-dessous un bref rapport sur cette rencontre.
GLI est un réseau international pour promouvoir la solidarité internationale entre les organisations syndicales.
Le premier GLI a été créé en 1997 à Genève à l’initiative de Dan Galin, un ancien secrétaire de l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des secteurs connexes (UITA).
Cet institut compte désormais 5 antennes situées Paris, Manchester, Genève, New York et Moscou. Il coopère avec des syndicats nationaux de différents pays ainsi qu’avec des organisations internationales dont :
- IndustriALL (qui représente plus de 50 millions de travailleur/euses de l’industrie dans 140 pays),
- WIEGO (réseau mondial pour promouvoir l’autonomisation des travailleurs/euses à faible revenu, en particulier des femmes de l’économie informelle),
- IBW (Fédération internationale des travailleurs/euses de la construction et du bois),
- ITF (Fédération internationale des travailleurs/euses du transport) ...
Le GLI considère que « sa mission est d’offrir un espace de libre discussion à tous celles et ceux qui cherchent à rétablir le mouvement syndical international dans son but initial : être le moteur d’une transformation progressive et radicale de la société. »
Depuis 2012, le GLI organise chaque année ou tous les deux ans une université internationale. Le but de celle-ci est de créer un espace d’échange d’opinions et d’expériences entre les organisations syndicales de différents pays afin qu’elles puissent aborder ensemble les défis auxquels est confronté le mouvement syndical international.
L’université de 2023 a été organisée près de Paris par les GLI de Paris et de Manchester. Des activistes syndicaux de 28 pays (Philippines, Hong Kong, Inde, Pakistan, Palestine (par vidéo), Israël, île Maurice, Ouganda, Bénin, Cameroun, Sénégal, Afrique du Sud, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Italie, Moldavie, Russie, Ukraine, États-Unis d’Amérique, Canada, Honduras, Argentine,...) ont participé à cette rencontre qui a duré trois jours. Les intervenant.es y ont abordé les thèmes suivants à travers plénières et ateliers :
- Développer des alliances syndicales internationales permanentes et durables entre les syndicats à l’échelle des entreprises multinationales, faciliter les liens entre les syndicats locaux et surmonter d’éventuels blocages causés par la bureaucratie syndicale.
- Organiser des campagnes sociales en partenariat avec les mouvements militants orientés vers la justice sociale, ainsi qu’avec des groupes de citoyen.nes progressistes.
Cette rencontre a également porté sur les enjeux majeurs du mouvement syndical mondial : concevoir des stratégies syndicales pour organiser les jeunes travailleurs/euses, pour renforcer la présence des femmes dans le mouvement syndical, affronter la montée de l’autoritarisme, et faire face aux changements liés à l’environnement. Il s’agit donc de :
- développer un syndicalisme adapté aux besoins et aux inspirations de la jeunesse, porter les revendications de jeunes travailleurs/euses, former de jeunes syndicalistes et leur permettre l’accès aux fonctions de responsabilités syndicales à l’échelle locale et mondiale,
- renforcer les revendications des femmes dans le mouvement syndical international, faciliter les alliances intersyndicales entre femmes à tous les niveaux, leur permettre l’accès aux fonctions de responsabilités syndicales à l’échelle nationale et internationale,
- prêter une attention particulière aux précaires : contractuel.les, migrant.es, saisonnier.es, intérimaires, indépendant.es... notamment dans le secteur informel (domesticité, recyclage, vente ambulante ...),
- encourager des espaces de syndicalisation au-delà du lieu de travail,
- renforcer la solidarité internationale entre syndicats face aux guerres impérialistes et coloniales,
- organiser les travailleurs/euses immigré.es pour défendre leurs droits et pour lutter contre la xénophobie,
- défendre le droit des travailleurs/euses à constituer des syndicats indépendants et démocratiques,
- accroître la coopération internationale des syndicats pour faire face à la répression anti-syndicale menée par les patrons et les Etats,
- préparer la transformation écologique par la conception de plans tenant compte du savoir-faire et de la compétence des salarié.es, et former des militant.es en ce sens,
- anticiper les transformations du travail et accompagner les travailleurs/euses en formation professionnelle pendant la période de transition écologique,
- renforcer les alliances entre les mouvements syndical et environnemental par des revendications communes,
- combattre les privatisations, défendre la propriété publique et le contrôle démocratique sur celle-ci, défendre l’accès universel à l’énergie et aux autres ressources.
A l’issue des interventions et échanges, un manifeste a été élaboré par des participant.es.
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Sara Selami de « Solidarité Socialiste avec les Travailleurs d’Iran » est intervenue à l’atelier « Lutte pour la liberté syndicale dans les pays autoritaires », l’un des ateliers dédiés à la lutte contre l’autoritarisme.
Lors de cette prise de parole, les divers types d’organisations professionnelles indépendantes de travailleurs/euses en Iran ont été présentées :
- associations professionnelles, telles que celles des enseignant.es (et leur Conseil national de coordination), ainsi que certaines associations professionnelles des travailleurs/euses du bâtiment ;
- syndicats qui se sont reconstitués, par en bas et sans autorisation comme le Syndicat du personnel de la régie de bus de Téhéran et de sa banlieue (Vahed), et celui des travailleurs/euses de la canne à sucre de Haft Tapeh ;
- les organisations semi-clandestines comme celle des contractuel.les de l’industrie pétrolière, les unions de retraités... ;
- des unions généralistes ou des associations de soutien au mouvement ouvrier, comme les Comités d’Aide pour la création ou de Suivi de syndicats, le syndicat Libre ...
Il a été souligné que les luttes menées par l’ensemble de ces organisations ont permis d’imposer aux employeurs et à l’Etat un certain nombre de droits sociaux. Et cela au prix d’une répression brutale dont les activistes ouvrier.es ont été et sont toujours la cible : licenciement, passage à tabac, arrestations et condamnation à de longues peines de prison.
Dans un pays où le droit de grève n’est pas reconnu, les grèves et les débrayages sont plus nombreux que dans beaucoup d’autres pays.
Dans un pays où les rassemblements et les manifestations de rue sont interdits - à l’exception des manifestations officielles et pro-gouvernementales - des manifestations et rassemblements de retraité.es et de salarié.es en activité se tiennent presque quotidiennement...
En un mot, c’est grâce à un ensemble de luttes ouvrières collectives et organisées - et au prix fort que les syndicalistes paient pour ces luttes - que certains droits sociaux inexistants ou non reconnus légalement, finissent en pratique par s’imposer.
L’expérience du mouvement syndical en Iran, sous un régime tyrannique et dictatorial, prouve que des droits sociaux peuvent être conquis par la lutte collective des travailleurs/euses de base, et en ne s’appuyant que sur leur propre force.
Cliquer ici pour la version persane.
Iran : Mobilisations et grève des salarié.es du Groupe National de l’Aciérie d’Ahwaz
Message du Syndicat des travailleurs/euses de la compagnie d’autobus de Téhéran et sa banlieue
Le quatrième jour de mobilisation et grève des sidérurgistes du Groupe National de l’Aciérie d’Ahwaz s’est poursuivi avec des slogans tels que « Nous sommes prêt.es à mourir, plutôt que d’être humilié.es » « les menaces et et la prison, ne nous ferons pas plier ».
Selon les rapports du Syndicat des salarié.es du Groupe National de l’Aciérie d’Ahwaz, leurs revendications comprennent :
- La levée de l’interdiction d’entrer dans l’entreprise pour les travailleurs/euses suspendu.es et la réintégration des travailleurs/euses précédemment licencié.es ;
- L’alignement des salaires sur ceux des autres entreprises sidérurgiques, dont l’aciérie d’Oxin ;
- La mise en œuvre complète et immédiate du plan de classification des emplois ;
- Un contrat de travail sans paragraphes laissés en blanc pour tous les travailleurs/euses de la filiale Shafaq ;
- Le licenciement du PDG corrompu, l’appropriation et l’autogestion de l’entreprise par les travailleurs/euses ;
Les obstacles et les défis auxquels sont confronté.es les grévistes du Groupe National de l’Aciérie d’Ahwaz sont innombrables : menaces, intimidations, présence de vigiles et de membres des services sécuritaires interdisant la présence dans l’entreprise d’environ 40 travailleurs/euses protestataires, suspension et licenciement de travailleurs/euses protestataires, direction d’entreprise incompétente et corrompue menant une politique anti-ouvrière, rôle destructeur de la Banque Nationale, etc. Mais l’unité des travailleurs/euses, leur détermination et leurs organisations indépendantes traceront le chemin pour obtenir la satisfaction de ces revendications.
Nous saluons les grévistes du Groupe National de l’Aciérie d’Ahwaz
Le chemin des travailleurs/euses vers la victoire passe par leur unité, ainsi que l’existence d’organisations ouvrières indépendantes du patronat, de l’Etat et de toutes les institutions liées aux forces de sécurité et de renseignement, tels le Conseil islamique du travail et la « Maison des travailleurs ».
26 décembre 2023
Syndicat des travailleurs/euses de la compagnie de bus de Téhéran et sa banlieue
Cliquer ici pour la version anglaise.
Déclaration de neuf détenu.es politiques de la prison d’Evin : « Notre responsabilité dans la souffrance des autres »
Parmi les prisonnier.es politiques, certain.es ont risqué leur vie l’année dernière pour exiger la liberté et mettre fin aux discriminations. Mais maintenant, face au génocide des Palestinien.nes dans une guerre barbare menée par le gouvernement israélien, certain.es disent : « J’aimerais qu’il en tue davantage ». « J’aimerais qu’il termine le travail avec une bombe atomique pour que le monde puisse pousser un soupir de soulagement. » Certain.es disent même : « J’aimerais qu’il bombarde Téhéran où se trouve la tête du serpent ». On ne peut que plaindre des gens qui se battent pour leur propre auto-destruction.
La guerre actuelle est une bénédiction pour les dirigeants réactionnaires, tout comme l’avait été la guerre Iran-Irak, qui a duré huit ans (1980-1988). Elle avait contribué à stabiliser le régime iranien et avait rendu possible le massacre de milliers de prisonnier.es politiques. Ce même régime qui a tué et blessé des milliers d’enfants et d’adolescent.es au cours du soulèvement de l’année dernière et bien avant cela, tente désormais de cacher sa nature réactionnaire sous prétexte de défendre le peuple palestinien.
Si la guerre s’étend, elle contribuera à réprimer et à accentuer les violences contre les manifestant.es et les prisonnier.es politiques, les mouvements de salarié.es, les femmes, les étudiant.es, les minorités religieuses telles que la communauté bahaïe, et à mener une attaque massive contre le mouvement « Femme, Vie, Liberté ».
Depuis l’étranger, une partie de l’opposition iranienne d’extrême-droite agit de façon convergente. Elle dit vouloir « exporter la démocratie » avec des bombes et des attaques militaires. En fait, ces gens cherchent surtout à s’approprier une part du gâteau de reconstruction des infrastructures suite à la destruction de celles-ci par une attaque militaire de l’Occident. Ils n’ont décidément tiré aucune leçon de l’expérience des deux dernières décennies en Afghanistan et en Irak. Au plus fort du mouvement Femme, Vie et Liberté, ces gens ne cherchaient que le soutien d’Israël et de l’Occident, et dans la guerre actuelle, ils ne font que les servir.
Mais l’indifférence à l’égard de la guerre et du génocide en cours en Palestine et une possible attaque militaire contre l’Iran, dépasse le cercle de ces courants extrêmes.
Notre message est le suivant :
- Face à cette guerre complexe et inégale contre le peuple palestinien notre positionnement ne doit pas partir de notre volonté de combattre notre propre gouvernement, ses actions par procuration et ses politiques ruineuses ;
- Nous devons nous baser sur la définition de génocide comme le fait d’agir « dans l’intention de détruire totalement ou partiellement un groupe national, ethnique, racial ou religieux » ;
- Nous refusons de nous soumettre à la censure médiatique et au monopole de l’information.
Il nous est demandé de choisir entre le Hamas et Israël, entre une guerre meurtrière et la continuation de la situation actuelle. Nous refusons ces choix binaires qui ne peuvent mener qu’au pire. Nous devons y opposer nos propres options.
Le fait est que nous avons une faible tradition de mouvements de protestation contre la guerre. Bien que les courants et mouvements égalitaires connus sous le slogan « pain, travail, liberté » aient eu des positions clairement anti-guerres, nous n’avons pas pu faire la jonction entre :
- d’une part les luttes contre l’oppression, l’exploitation et la discrimination,
- d’autre part la lutte contre la guerre et le bellicisme.
Il faut revenir au slogan « Ni Gaza, ni Liban » qui avait été scandé par le passé.
Certaines personnes attribuent leur misère actuelle aux interventions aventureuses du gouvernement iranien dans la région. Mais l’argent que le gouvernement a dépensé ainsi ne bénéficiait pas aux peuples de ces pays. Il servait uniquement à soutenir des dictatures et des forces réactionnaires de la région. Et cette politique du régime iranien avait pour but de consolider et de maintenir ses propres intérêts.
Le résultat de ces interventions a été que les roquettes du Hamas ont supplanté les luttes sociales et politiques du peuple palestinien et leur riche histoire. Par ailleurs, ne sont même pas mentionnées les forces progressistes participant à la résistance palestinienne.
A l’intérieur de cette coquille réactionnaire, s’est développé le monstre de l’indifférence à l’égard de la souffrance d’autrui. Certaines personnes ne s’élèvent contre la guerre et les meurtres que lorsque les bombes tombent sur elles. Elles déclarent : « Je me fiche de ce qui va arriver à Gaza » ; « Je me fiche de ce qui arrive au Baloutchistan et au Kurdistan » ; « Quoi qu’il arrive aux immigré.es afghan/nes, aux femmes, aux travailleurs/euses permanent.es, aux précaires, aux personnes marginalisées, je ne proteste que lorsque mes proches et moi sommes attaqué.es. »
Ce monstre constitue le talon d’Achille de notre mouvement révolutionnaire.
Notre pays comporte une pluralité de langues et de religions, toutes sortes de divisions, d’oppressions multidimensionnelles,
Mais on y trouve également des complémentarités, des liens étroits entre travailleurs/euses et opprimé.es de la région.
L’indifférence à l’égard de la souffrance des autres peuples, ne peut conduire qu’à la continuité de la domination des forces dirigeantes actuelles et l’impossibilité de tout changement.
En ce moment, l’adversaire le plus puissant de ce monstre d’indifférence est la prise de conscience et la volonté des peuples du Moyen-Orient. Celles-ci se sont cristallisées dans le slogan « Femme, Vie, Liberté ».
Ce slogan est un appel à soutenir la dignité humaine et à lutter contre les discriminations et l’apartheid sous toutes leurs formes.
En s’appuyant sur ce slogan, on peut affronter le fondamentalisme religieux sous toutes ses formes, qu’il s’agisse de celui du Hamas ou celui d’Israël.
En définissant leurs frontières de cette manière, il est possible de délimiter :
- d’un côté ces deux forces réactionnaires, ainsi que les forces impérialistes qui les soutiennent,
- de l’autre, les mouvements sociaux progressistes, les travailleurs/euses, les femmes et le désir de liberté et d’égalité.
Anisha Asadollahi,
Golrokh Iraee,
Reza Shahabi,
Arash Johari,
Keyvan Mohtadi,
Mehran Raouf,
Foad Fathi,
Maziar Seyedenejad,
Omid Massir.
Prison d’Evin - novembre 2023
Cliquer ici pour la version espagnole.
Vers une solidarité et une organisation conséquentes des mobilisations des salarié.es du secteur pétrolier
Faisant suite à leurs mobilisations éparses contre les conditions de vie et le faible niveau des salaires, ainsi qu’aux atteintes du gouvernement à leurs droits et avantages acquis, les travailleurs/euses permanent.es du secteur pétrolier ont annoncé, lors d’un de leurs rassemblements il y a environ deux mois, qu’ils organiseraient des rassemblements tous les lundis pour faire aboutir leurs revendications.
Cela fait plus d’un an que des retraité.es de la sécurité sociale, des enseignant.es, des employé.es des télécommunications, etc. ont décrété que des journées de mobilisation auront lieu certains jours de la semaine, et que des rassemblements simultanés seraient organisés dans différentes villes d’Iran.
Cette façon de lutter et de protester a joué un rôle dans le développement de l’unité entre retraité.es, ainsi que dans le renforcement du mouvement des retraité.es, qui est devenu habituel.
Aujourd’hui, les travailleurs/euses titulaires du secteur pétrolier ont pris comme modèle cette tradition progressiste et moderne, pour coordonner et organiser leurs mobilisations. Il ne fait aucun doute que l’utilisation de cette méthode renforcera leurs luttes.
Elle aura également un impact important sur le renforcement de la mobilisation et de l’unité des travailleurs/euses de tous les secteurs, face à leurs employeurs et au système étatique qui les soutient.
Le secteur pétrolier constitue la source principale des finances de l’Etat. Ce dernier est simultanément le patron de cette industrie, et est donc directement confronté aux salarié.es qui y travaillent.
Le pouvoir a un besoin vital que le secteur de la production pétrolière soit en activité afin de couvrir les coûts exorbitants de son propre système, ainsi que de la gouvernance en général.
Pour ces raisons, les salarié.es titulaires et de la sous-traitance du secteur pétrolier occupent une place particulière dans l’ensemble du mouvement ouvrier d’Iran.
Le développement de leurs mobilisations exercera une pression fondamentale et décisive sur le gouvernement et le contraindra à réagir.
Le résultat de chaque victoire et de chaque succès des travailleurs/euses du pétrole constituera un tremplin pour les victoires et les succès des salarié.es de tous les autres secteurs.
Il est du devoir de toutes et tous les travailleurs/euses, enseignant.es, retraité.s, chômeurs/euses, ainsi que de toute personne voulant une amélioration des conditions de travail et de vie, de soutenir les luttes des salarié.es du secteur pétrolier.
Signataires :
1- Syndicat des retraité.es ;
2- Syndicat des travailleurs/euses de l’électricité et de la métallurgie de Kermanshah ;
3- Syndicat des peintres d’Alborz ;
4- Conseil des retraité.es d’Iran ;
5- Comité pour la création d’organisations ouvrières ;
6- Appel des femmes d’Iran ;
7- Voix indépendante des salarié.es du groupe sidérurgique « National Steel Group ».
iran
5 Novembre, 2023
Cliquer ici pour la version anglaise.
Réponse de Reza Shahabi, travailleur emprisonné à la lettre ouverte de Saemeh Sultani, militante du Mouvement des femmes afghanes !
Chère Saemeh, voisine dont le destin est lié au mien.
Votre message sincère m’a profondément touché. Tout ce qui vient du cœur, va au cœur.
La honte est parfois un sentiment révolutionnaire. Votre lettre me provoque à la fois de la colère et de la honte :
- de la colère contre les insultes quotidiennes, la violence, le rejet et l’humiliation que vous rencontrez chaque jour en tant que citoyenne afghane,
- de la honte, parce qu’en tant qu’Iranien, je me reproche toutes ces années passées à ne rien faire contre ce que vous subissez, alors que j’aurais certainement pu faire quelque chose.
Je suis profondément triste et peiné de malheureusement constater qu’au sein de nos peuples opprimés, et même dans cette prison, certain.es militant.es politiques et syndicaux qui devraient être les porte-drapeaux de la lutte contre toutes les formes de discrimination, continuent à répandre la haine et la division.
Nos gouvernants s’acharnent contre la vie des peuples d’Iran, d’Afghanistan et du reste de la région. Ils utilisent à cet effet une paire de ciseaux avec :
- sur une lame, le fondamentalisme religieux dans tous les domaines, y compris la politique, l’éducation et la culture,
- sur l’autre lame, les relations capitalistes enragées, impitoyables et prédatrices.
Certains sociologues et journalistes iraniens expliquent dans la presse que le retour des Talibans au pouvoir en Afghanistan est issu des racines culturelles du peuple de ce pays. Être victime d’une oppression est une douleur pénible, mais lorsque la personne qui la commet est elle-même victime d’une oppression, c’est encore plus terrible.
Les travailleurs/euses d’Iran sont très opprimé.es et se mobilisent à juste titre pour leurs droits légitimes, ainsi que contre la progression de la pauvreté et de l’inégalité dans le pays.
Mais, malheureusement, certain.es sont sous l’influence de la propagande anti-afghane d’organisations inféodées au pouvoir comme les Conseils islamiques du travail et la Maison des travailleurs.
Ils/elles ont des positions complètement fausses.
Au lieu de s’en prendre au rôle destructeur des politiques et pratiques du pouvoir, telles que les détournements astronomiques de fonds publics, le pillage des biens publics, la corruption et l’expansion du mode de vie luxueux des enfants des dignitaires en place, ils/elles affirment que les Afghan.es ont volé nos emplois. Ils/elles nient ainsi que les migrant.es afghan.es constituent en Iran l’une des parties de la classe ouvrière les plus vulnérables et les plus privées de leurs droits, et cela depuis plusieurs générations.
Ces personnes se trompent de cible. Nous savons tous et toutes que la cause de l’existence en Iran de millions de chômeurs/euses, en particulier parmi les jeunes pour la plupart formé.es et éduqué.es, n’est certainement pas les travailleurs/euses acharné.es afghan.es, qui sont pour la plupart sous-payé.es et qui constituent une main-d’œuvre bon marché.
Vous et moi savons bien que les soulèvements de 2017, 2019 et 2022, ainsi que les émeutes causées par la crise de l’eau ou le mécontentement des peuples opprimés du Kurdistan, du Baloutchistan, du Khuzestan, du Lorestan, du Torkaman Sahra et du Mazandaran, n’ont jamais été dirigés contre la présence de migrant.es et de citoyen.nes afghan.es.
Se concentrer sur les travailleurs/euses afghan.es et mobiliser l’opinion publique contre eux/elles est une tactique que la classe dirigeante utilise depuis plus de 40 ans en Iran contre les travailleurs/euses et les personnes démuni.es.
Je n’ai aucun doute sur le fait que les personnes que nous aimons, dont Jina, Nika, Sarina, Setareh, Hadith, Armita ... n’ont pas sacrifié leur vie pour qu’un an après leur courageux soulèvement pour l’égalité et la liberté, nous assistions à la montée de discours destructeurs, hostiles, racistes et anti-afghans. Voici des exemples de ce qui m’est venu à l’esprit après avoir lu votre lettre.
Le mouvement « Femme, Vie, Liberté » a montré qu’une autre grande force entrait dans l’arène de la lutte sociale, une force puissante s’opposant à toute forme d’exclusion, « d’insiders » et « d’outsiders », de « nous » et de « eux », sous quelque prétexte que ce soit (nationalité, langue, sexe, ethnie, etc.).
Permettez-moi d’ajouter que la résonance du slogan « Pain, Travail, Liberté », dont le mouvement afghan de défense des droits des femmes a été l’un des porte-drapeaux depuis des années, est une source d’inspiration pour moi et pour d’autres militant.es du mouvement ouvrier.
Je suis très heureux que la lutte contre les discriminations envers les femmes et pour l’égalité inconditionnelle, soit devenue si puissante et irréversible.
Je me réjouis que cette mobilisation se soit simultanément enracinée dans les luttes contre :
- le patriarcat,
- les politiques diviseuses anti-migrant.es et fascistes,
- les relations capitalistes oppressives, racines de la discrimination, de l’exploitation et de la violence dans nos vies.
Chère Saemeh, soyez assurée que mes camarades et moi-même sommes à vos côtés dans cette lutte, parce que nous partageons le même destin et que nous avons un ennemi commun. La seule voie vers l’émancipation est de s’unir et de s’organiser.
Dans l’espoir que la justice triomphe en Iran et dans le monde entier.
Reza Shahabi, prison d’Evin
Syndicat des travailleurs de la compagnie de bus de Téhéran et de sa banlieue (Sherkat-e-Vahed)
16 novembre 2023
Cliquer ici pour la version anglaise.
Le génocide des Palestinien.nes continue à Gaza
Au 3 janvier, soit 89 jours après le déclenchement de la guerre d’Israël contre la population de Gaza, le nombre de mort.es palestinien.nes dépasse 22300, dont 9600 enfants et 6750 femmes (Selon Wafa News Agency). Selon Elias Sanbar ex-ambassadeur de la Palestine à l’Unesco, tous les six minutes, un enfant meurt à Gaza.
Rien, même le massacre criminel de civils le 7 octobre 2023, ne peut expliquer ces massacres qui selon toute apparence, ne sont pas seulement des crimes de guerre, mais également un génocide.
L’Afrique du Sud a déposé une requête auprès de la Cour internationale de Justice, l’organe de l’ONU censé juger les différends entre États. Pretoria entend ainsi dénoncer et prévenir le caractère « génocidaire » de l’invasion israélienne à Gaza.
Netanyahu n’a jamais caché son opposition à toute velléité nationale des palestinien.nes, notamment la création d’un Etat. Son gouvernement, le plus annexionniste de l’histoire de l’Etat d’Israël, comprend des ministres religieux fascistes dont Bezalel Smotrich qui est le « responsable de l’administration civile de la Cisjordanie ». En 2017, ce colon messianique avait publié un plan destiné selon lui, à assurer la victoire d’Israël. Ce plan offrait aux « Arabes de Judée-Samarie », autrement dit de Cisjordanie, le choix de « rester en tant qu’individus dans l’Etat juif » tout en posant cette condition : « Celui qui ne veut ou ne peut renoncer à ses ambitions nationales recevra une aide pour lui permettre d’émigrer vers un des nombreux Etat arabes ». On ne peut être plus claire ! Ce plan met en œuvre une seconde Nakba (catastrophe) pour les palestinien.nes. Un journal israélien avait jugé ce plan « suicidaire » même pour Israël. Selon Haaretz (01/01/2024), les ministres d’extrême-droite du gouvernement Netanyahu ont proposé d’occuper définitivement Gaza et de reconstruire des colonies. Donc, la guerre contre la population de Gaza serait une prélude pour compléter le nettoyage ethnique et annexer la Cisjordanie.
D’ailleurs, depuis l’attaque du 7 octobre, la vengeance sans fin et sanguinaire d’Israël touche de près des dizaines de milliers de palestiniens travaillant en Israël ou dans les colonies. Ils sont sauvagement expulsés vers Gaza sous les bombardements ou la Cisjordanie après avoir subi les traitements inhumains. Lire l’article intitulé «
Où en est le mouvement ouvrier en Israël ?
Les syndicats en Israël, en général, ont soutenu et soutiennent la colonisation des territoires. L’Histadrout, le syndicat principal crée en 1920 et dont Ben Gourion a été un des dirigeants, a dès le début œuvré pour la séparation des ouvriers arabes et juifs au sein de la Palestine sous mandat britannique. Ce syndicat avait une milice armée, des banques, des services sociaux, etc. Il a participé pleinement, à la guerre de 1948-1949, et à l’expulsion des palestinien.nes de leurs foyers.
Comme d’autres syndicats, l’Histadrout, se comporte comme un bras de l’armée israélienne. Sur son site officiel on ne trouve pas un mot compassion envers les civils Gazaouis et notamment les enfants. Mais, il y a une rubrique nommée « Israel under Attack » (« Israël attaqué ») et beaucoup de documents sur la solidarité entre les israélien.ne.s (Lire).
La « Fédération nationale des travailleurs d’Eretz Israël », proche du parti au pouvoir, est inquiète pour les problèmes économiques du pays. Son secrétaire général Yoav Simchi a déclaré (21 déc. 2023) :« Il est temps de mettre un terme à la saga de l’abandon des coordinateurs militaires de la sécurité en Israël. Il est difficile de croire que même après la position héroïque qu’ils ont remplie le 7 octobre en défendant les frontières d’Israël, elles passent toujours de main en main. J’appelle à la création immédiate d’une autorité nationale pour les coordinateurs de sécurité militaire. Il ne peut y avoir de discussions sur l’avenir des coordinateurs de sécurité militaire, tout en laissant les coordinateurs de sécurité militaire en dehors « Le jeu ». Ce qui était dans le passé ne sera pas dans le futur ! J’attends des député.es et des ministres de la Knesset qu’ils agissent immédiatement. »(Lire).
La République Islamique d’Iran, dans la continuité de sa politique hégémonique et interventionniste régionale, soutient publiquement le Hamas et le Jihad Islamique en leur fournissant des moyens financiers. Son but est de diviser les Palestiniens et de saboter la politique de l’OLP. Par ailleurs, il ne faut pas négliger la judéophobie d’une partie des responsables iraniens.
Par opposition au régime islamique, une partie de la population et une partie de « l’opposition », jugent opportun de soutenir la position israélienne.
Des forces progressistes, par contre, connaissent bien les manœuvres du régime. Tout en luttant contre la dictature islamique, elles soutiennent fermement la résistance du peuple palestinienne et condamnent fermement le génocide en cour à Gaza par l’armée d’Israël.
Le syndicaliste emprisonné Réza Shahabi et certain.es de ses codétenu.es ont par exemple publié, depuis la Prison d’Evin, une déclaration de soutien au peuple palestinien.
4 janvier 2024