Depuis le 9 janvier, Raif Badawi doit subir une séance de flagellation tous les vendredis. Sa sentence prévoit qu’il reçoive 50 coups de fouet pendant 20 semaines, pour atteindre 1000 coups en tout. La flagellation constitue une violation de l’interdiction absolue de la torture et des autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, inscrite dans le droit international.
Raif Badawi a été flagellé pour la première fois après la prière du vendredi le 9 janvier, en public, devant la mosquée d’Al Jafali à Djedda. Quelques jours plus tard, Ensaf Haidar, la femme de Raif résidant avec leurs trois enfants au Canada, a dit à Amnesty International que son mari souffre énormément, que son état de santé se dégrade et qu’il ne survivrait peut-être pas la prochaine séance. « J’ai expliqué à mes enfants ce qu’il se passait, pour ne pas qu’ils l’apprennent de la bouche de leurs amis à l’école. C’est un choc énorme pour eux. La pression internationale est cruciale, et je pense que si nous continuons à soutenir Raif, cela pourrait porter ses fruits. Nous devons continuer à nous battre », nous a-t-elle dit.
Vendredi 16 janvier, le jour prévu de sa deuxième séance de flagellation, Raif a reçu la visite d’un médecin en prison. Celui-ci a statué que les plaies de Raif n’ayant pas encore guéri, il n’était pour le moment pas en état de subir une deuxième séance de flagellation. Le médecin a demandé à ce que celle-ci soit repoussée au vendredi 23 janvier.
Raif Badawi a été condamné le 7 mai 2014 par le tribunal pénal de Djedda à 10 ans de prison et 1 000 coups de fouet, assortis d’une interdiction de voyager pendant 10 ans à l’issue de sa peine, d’une interdiction d’utiliser les médias et d’une amende d’1 million de riyals saoudiens (environ 226 000 euros). Le jugement rendu contre lui est lié à la création de son site internet, « Libérez les libéraux saoudiens » (dont la cour a ordonné la fermeture), et à des accusations selon lesquelles il aurait « insulté l’islam ». La Cour d’appel de Djedda a confirmé sa condamnation le 1er septembre.
Selon la décision finale de cette instance, Raif Badawi ne recevra pas plus de 50 coups de fouet consécutifs, et un intervalle d’au moins une semaine devra être observé entre chaque série.
Raif Badawi était initialement inculpé d’« apostasie », infraction passible de la peine de mort en Arabie saoudite. Il est détenu depuis le 17 juin 2012 à la prison de Briman, à Djedda. Son avocat, Waleed Abu al Khair, est également en prison. Il purge une peine de 15 ans de réclusion en raison de son militantisme pacifique.
Le procès de Raif Badawi s’est ouvert en juillet 2012, devant le tribunal général de Djedda. Le 21 janvier 2013, cette juridiction a transmis le dossier au tribunal pénal de Djedda, au motif qu’elle n’était pas compétente pour juger cette affaire car elle estimait que Raif Badawi n’avait pas insulté l’islam et ne pouvait donc pas être accusé d’apostasie. Le procureur général a néanmoins insisté pour qu’il soit jugé pour cette infraction. L’affaire a alors été transmise à une cour d’appel pour déterminer si elle devait être examinée par le tribunal pénal de Djedda ou par une autre instance, telle que le tribunal général de Djedda, compétent pour juger les affaires d’apostasie. La cour d’appel de Djedda a finalement renvoyé le dossier devant le tribunal pénal, qui a condamné Raif Badawi le 29 juillet 2013 à sept ans d’emprisonnement et 600 coups de fouet. Son avocat a fait appel de cette décision, avançant que le juge en charge de l’affaire n’occupait ses fonctions que de manière temporaire et manquait d’impartialité. Le 11 décembre 2013, la cour d’appel a jugé que l’affaire devait être à nouveau révisée et l’a renvoyée devant le tribunal pénal de Djedda. Le 25 décembre 2013, le juge du tribunal pénal a conclu qu’il n’était pas compétent pour réexaminer ce dossier car le prévenu était accusé d’apostasie. L’affaire a une nouvelle fois été transmise à la cour d’appel de Djedda pour qu’elle décide de renvoyer l’affaire devant le tribunal pénal ou de la rejuger elle-même. C’est finalement le tribunal pénal de Djedda qui a été chargé de l’affaire et qui, le 7 mai 2014, a condamné Raif Badawi à 10 ans de prison, 1 000 coups de fouet et une amende d’1 million de riyals saoudiens (environ 226 000 euros). Raif Badawi a fait appel de cette décision et, le 1er septembre, la cour d’appel a maintenu la condamnation.
Les autorités saoudiennes continuent de mener une campagne de persécution de grande ampleur à l’encontre des défenseurs des droits humains et des militants de la société civile, en engageant des poursuites judiciaires contre eux et en adoptant des mesures arbitraires, telles que l’interdiction de voyager. Le 6 juillet 2014, l’avocat de Raif Badawi, l’éminent défenseur des droits humains Waleed Abu al Khair, a été condamné par le tribunal pénal spécial à une peine de 15 ans de prison assortie d’une interdiction de voyager subséquente de 15 ans. Il a été jugé coupable d’avoir « désobéi au souverain et cherché à lui ôter sa légitimité », « insulté le pouvoir judiciaire et remis en cause l’intégrité des juges », « créé une organisation non autorisée », « nui à la réputation de l’État en communiquant avec des organisations internationales » et « rédigé, enregistré et envoyé des informations troublant l’ordre public ». Il a été arrêté le 15 avril, après avoir comparu lors de la cinquième audience de son procès devant le tribunal pénal spécial à Riyadh, la capitale saoudienne. Avant cela, il avait déjà été condamné pour des charges similaires à trois mois d’emprisonnement par le tribunal pénal de Djedda et avait vu sa sentence confirmée le 6 février 2014 par la cour d’appel de La Mecque.
Les châtiments corporels, notamment la flagellation, vont à l’encontre du droit international, qui interdit la torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.