L’utilité des élections européennes est, on le sait, très discutable. Le Parlement de Strasbourg est une façade démocratique d’une Europe dont le pouvoir réel se trouve à Bruxelles. Son exécutif, mis en place par les gouvernements, encadre par contre 80% de lois nationales. A quoi bon voter ? Surtout un candidat issu d’un petit parti, tel NPA, à peine éligible avec le seuil de [plus de ] 5%. Et s’il arrive à se faire élire, que pourra-t-il faire à partir de son strapontin anticapitaliste dans un hémicycle dominé par la droite ultra-libérale et une gauche social-démocrate libérale à trois quarts ?
Pourtant il y a plus d’une raison, et beaucoup plus significatives, pour voter Yvan Zimmerman. C’est le contexte économique actuel et la réponse politique qui nous incombe, si nous voulons devenir ne serait-ce que pour peu l’agent conscient de notre propre avenir.
La faillite du système financier mondial et ses répercussions dramatiques sur l’économie, dont l’industrie automobile est le moteur depuis plus d’un demi-siècle, sont telles que personne n’ose prévoir l’issue du tunnel. Ils « espèrent » seulement. Des centaines de milliers de chômeurs par mois aux Etats-Unis, des dizaines de milliers par pays en Europe, ce n’est – d’après les économistes qui n’ont pas été surpris par la crevaison de la bulle financière, - que le début. D’autres disent que le capitalisme est dès maintenant cliniquement mort et que les centaines de milliards de dollars ou d’euro des budgets publics qu’on y injecte ne sont que l’overdose, transfusion sur cadavre, que les générations à venir devront payer… si tout va bien et si les concernés acceptent de le faire pacifiquement. Sinon c’est la grande casse, comme les deux guerres mondiales qu’on a vu au XXe siècle, après quoi on a remis les compteurs à zéro.
Bref, l’alternative est connue par tous : ou bien la loi du profit provoquera de gigantesques barbaries sous des formes diverses, ou bien les forces productives de l’humanité et les richesses naturelles seront mises au service de l’homme. C’est la vieille, originelle et indélébile idée du socialisme, que le stalinisme a dénaturé et le libéralisme proclamé déchue. Sortir du capitalisme, c’est l’aspiration de la nouvelle génération, c’est la plateforme politique du NPA, dont nous sommes assez nombreux à avoir la sympathie et une certaine dose de réserve critique.
Notre vote n’est donc ni utilitaire, dans le sens électoraliste, ni simplement sanction contre le gouvernement, qui ne subsiste que sur la base d’une opposition politique minable. Il est bel et bien le vote d’une certaine conscience politique. Dès maintenant le capitalisme a mis un rideau de fer devant l’avenir de nos enfants, ce qui est pour nous qui sommes en retraite ou l’approchons le plus révoltant. On détruit la nature à grande échelle, on détruit la marchandise invendable, on détruit les outils de travail, enfin on détruit la force productive principale – classe ouvrière – par licenciements massifs sans aucune perspective de rembauche. Pour organiser résistance ferme et solidarité durable les syndicats ne suffisent plus. Il faut un outil politique, y compris pour armer les syndicalistes. Pour forger cet outil, il faut du bon acier, de bons ouvriers, à tête politique lucide et à cœur ardent. Yvan Zimmerman en est l’un, le seul qui nous est proposé dans le Grand Est.
Mais pourquoi le candidat NPA et non un autre issu de la gauche ?
Voter « utile », voter socialiste ? Cela fait longtemps qu’on fait le chantage aux ouvriers par le « vote utile » : si ce n’est pas nous, c’est la droite qui passera. Et avec ou sans illusions nous avons voté, chaque fois qu’il fallait. Et qu’en ont-ils fait ? Au lieu des réformes sérieuses du système social, ils nous ont fait avaler en catimini des véritables contre-réformes, telle la loi sur la circulation débridée du capital et celle de la base de calcul de nos retraites dans le privé, passant de 10 à 25 ans ! Pour la loi de 35 heures ils ne font que s’excuser à la droite. S’il n’y avait que cette « fermeté » des députés socialistes, Sarkozy l’aurait aboli des les premiers mois de quinquennat. Les deux seules réformes qu’ils mettent en avant, faute d’en avoir d’autres, c’est celle de Badinter, abolition de la peine de mort (qui concerne 3-4 personnes par an) et celle de Lang, fête de la musique (qui concerne un jour sur 365). Parfois on est amené à s’avouer l’inavouable : Giscard en a fait plus !
A part les exceptions honorables, le parti socialiste est devenu le parti des carriéristes petit-bourgeois, dont les ex-trotskystes occupent la place la plus détestable. Nos « votes utiles » n’ont servi qu’à assouvir leur soif foncièrement égoïste de privilèges et de prestige. Quelle contraste saisissant avec notre camarade Yvan Zimmerman ! Lisez ses discours, renseignez-vous sur sa vie et ses luttes dans les sinistres ateliers de Peugeot ! Et votez, pour une fois, vraiment utile !
Pour comble de dérision, ces mêmes socialistes nous proposent aujourd’hui de repêcher pour leur compte leurs candidats déchus ailleurs ! Apparemment, depuis la défaite cinglante de Jospin ils n’ont rien compris, ou bien ils nous prennent toujours pour les moutons.
Et les autres listes, plus à gauche ?
D’abord, il est regrettable qu’on n’ait pas proposé aux travailleurs un front anticapitaliste uni. Cela va dans le sens de nos aspirations profondes, mais rarement avec les calculs mesquins des uns ou des autres. On accuse Besancenot de tous les côtés, comme si c’est lui qui devait porter le chapeau tout seul. Lutte ouvrière répète depuis des dizaines d’année les phrases générales sur l’exploitation des travailleurs par les capitalistes au point que c’est devenu inaudible, de même que les portraits de Marx, Lénine et Trotsky accrochés sur les murs de leurs locaux. Si cela suffisait pour changer les rapports sociaux, on l’aurait vu et su. Dans ses rangs les ouvriers sont nombreux, et dévoués, mais pourquoi ne sont-ils pas avec NPA ? Je ne sais rien, à moins que ce ne soit le prolongement du feuilleton historique entre Arlette et Krivine : « Je t’aime, moi non plus ».
Les verts ont plus d’une fois démontré comment la loi du profit détruit la planète, sans être capables de formuler un programme anticapitaliste quelconque. On aurait bien aimé voir José Bové, représentant des petits paysans, sur la liste commune anticapitaliste, de même que cette dame fort respectable et courageuse qui s’appelle Eva Joly, mais ils se sont joint à Cohn-Bendit, champion d’aventurisme politique toutes classes et catégories sociales confondues.
Et Front de gauche ? Melenchon, dont la grandiloquence n’a d’égal que le vide du discours radical-socialiste du XIXe siècle, voudrait implanter sur le sol français un OGM politique de souche allemande (Linke). En guise de rupture avec le capitalisme il appelle à une « insurrection civique » pour une « refondation républicaine » ! Comprend qui pourra. Quant au PCF, qui a usé et abusé du dévouement des meilleurs ouvriers de France durant trois générations entières, il n’a plus rien à dire ni à la France, ni aux ouvriers. Son seul souci est de payer les factures pour l’entretien d’un appareil qui ne représente plus personne, sauf lui-même. La jeunesse le fuit comme une peste, ce qui en dit long sur le poids de créances douteuses du passé. Pourtant, c’est encore parmi les ouvriers et syndicalistes communistes que les jeunes d’aujourd’hui trouveront le meilleur et le plus solide appui et expérience.
Voter Zimmerman, ce n’est pas le vote par défaut. Ses discours sont le meilleur témoignage de son profil politique. Il est issu de notre classe, il n’est pas parachuté d’ailleurs pour être à notre service. Sa vision politique n’est pas façonnée par les livres gauchistes du Quartier latin, mais par la dureté de vie et de travail imposé par le « talon de fer » de la dynastie Peugeot. En travaillant, il a lutté et s’est instruit. Comme syndicaliste véritable il intègre ses camarades immigrés dans le mouvement ouvrier français. Par son dévouement à « ceux qui ne savent pas lire ni écrire », il est entouré d’un réseau d’infaillible solidarité. Ses convictions anticapitalistes sont cimentées par l’expérience directe du capital. Si l’on ajoute à cela la sincérité et modestie qui ne trompent pas, il dispose de toutes les qualités nécessaires pour un jeune dirigeant ouvrier, capable et fiable, dont nous travailleurs avons toujours eu besoin, et que nous manquerons sûrement demain lorsque la violence du capital – qui ne signera jamais son arrêt de mort ! – exigera de nous le cœur ferme et tête lucide. Voter pour Zimmerman aujourd’hui, c’est investir pour demain. Et s’il est élu, nous pouvons être sûrs qu’il utilisera sa position pour tendre la main à nos frères, travailleurs de l’Est et de l’Ouest de l’Europe. Pour faire une autre Europe, celle des travailleurs.
Notre bulletin de vote pour ces élections en soi ne pèse pas lourd. En le plaçant dans la bonne boîte, celle qui engage l’avenir, nous pouvons lui donner le poids nettement plus démultiplicateur. En situant ce vote de classe au-dessus du vote de tel ou tel parti, nous feront connaitre Yvan Zimmerman à grande échelle, notre confiance démultipliera ses forces, dont nous bénéficierons à notre tour. Bien sûr, en votant pour le candidat NPA nous allons soutenir le parti de Besancenot là où il a le plus besoin pour devenir la véritable alternative politique. Mais l’enjeu dépasse largement le NPA et à cette heure grave aucune mesquinerie politique n’est de mise. Le parti, ses dirigeants, ses candidats - ce ne sont que les outils de la lutte de classes. Celui qui nous est proposé à l’Est est fait du bon acier au carbone, voire de l’acier rapide, et non de celui pour « ferrer les ânes », comme on dit dans le jargon de nos métiers. Votez et faites voter autour de vous Yvan Zimmerman ! Vous ne le regretterez pas !
Radoslav PAVLOVIC, ouvrier menuisier-ébéniste, NANCY.
Le 13 mai 2009
Yvan Zimmermann : Est
Présentation publiée dans « Tout est à nous ! » n°7 du 7 mai 2009.
Après avoir été ouvrier sur les chaînes de l’usine Peugeot-Mulhouse (atelier peinture) à plein temps pendant douze ans, Yvan Zimmermann est à mi-temps depuis un an, l’autre moitié de son temps de travail étant consacrée au métier d’artisan élagueur. Militant syndical et révolutionnaire, sur un terrain lutte de classe depuis un certain nombre d’années, il a choisi de participer à la construction du NPA, parce que l’appel d’Olivier Besancenot répondait à l’attente de beaucoup d’ouvriers et de militants venus d’horizons politiques et syndicaux différents. Il a donc rejoint le NPA avec un certain nombre d’entre eux.
Les ouvriers trouvent leur légitimité dans le combat contre les humiliations du quotidien, dans le cadre syndical le plus souvent, mais surtout en allant jusqu’au bout, c’est-à-dire la fin à l’exploitation capitaliste. Yvan Zimmermann a accepté d’être candidat pour tous ses camarades qui, à l’usine ou partout ailleurs, luttent au quotidien, mais aussi pour ceux qui souffrent jusqu’au suicide. Il souhaite faire de ces élections la tribune de ceux dont on brise les vies en silence dans les usines, les quartiers populaires ou les pays pauvres. Il souhaite porter à la face des puissants toute la colère, l’intelligence et la dignité de ceux qu’ils jettent aujourd’hui à la rue, contribuer ainsi à l’unification de tous les combats actuels qui restent trop dispersés et aider le monde du travail à l’emporter sur celui de l’argent, pour débarrasser enfin ce monde du capitalisme.