Nous avons appris (ou plutôt réappris), grâce à l’étude présentée le 22 novembre 2006 par Catherine Vautrin, ministre déléguée à la Cohésion sociale et à la Parité, qu’en France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son compagnon. Q’une femme sur dix est victime de mauvais traitements conjugaux. Que la justice « commence » à prendre la mesure de ces violences. Mais comment se fait-il que nous ne le sachions pas déjà au point de ne plus pouvoir l’oublier ? Comment se fait-il que la justice n’ait pas depuis longtemps « pris la mesure » d’un crime inlassablement et quotidiennement répété ?
Les femmes succombent dans le silence des médias quand elles ne s’appellent pas Marie Trintignant, ou quand il ne s’agit pas d’une adolescente brûlée vive dans une « cité sensible ». Faut-il que la victime soit célèbre ou l’acte spectaculaire pour mériter la « une » des quotidiens nationaux et le 20 heures des grandes chaînes de télévisions ? Le meurtre conjugal commis par Monsieur Tout-le-monde peut-il être relégué aux colonnes de la presse locale, comme le plus stupide des accidents de la route ? La mort sous les coups est-elle moins condamnable ou porteuse de sens que celle advenue par le feu ?
Une fois passée la journée mondiale du 25 novembre contre les violences faites aux femmes, la routine journalistique reprend ses droits. Pourtant, l’assassinat conjugal n’est pas un simple fait-divers, mais bien un fait majeur de société. A force de sensationnalisme, les médias occultent l’essentiel : la terrible banalité sociale de la violence masculine dont témoigne ce « groupe de parole » destiné aux hommes qui en sont coupables et qui comprend « un Rmiste, deux ouvriers, un enseignant et un chef d’entreprise » (Le Monde, du 23 novembre 2006). Les femmes tombent, victimes aussi de ce silence.