Faudrait-il renoncer à la candidature la plus convaincante ? Notre mouvement antilibéral peut-il se permettre une telle faute alors qu’il a devant lui à la fois une chance historique et un défi colossal ? C’est pourtant ainsi que nous pouvons comprendre certaines demandes qui circulent avec insistance. C’est en quelque sorte pour leur répondre que nous avons ensemble écrit ce texte.
Nous sommes des militants, responsables syndicaux ou associatifs. Chacun à sa façon, nous avons été engagés dans des combats emblématiques de notre temps. Cela ne nous confère aucun droit particulier, si ce n’est celui de parler depuis l’endroit où nous sommes.
Nous connaissons Marie-George Buffet. Au plus fort de la difficulté, surmontant les blessures des temps passés, c’est elle que nous avons vue sur le terrain, à nos côtés. Comme militante, bien sûr, mais bien au-delà, comme responsable politique, venant porter l’espoir, venant resituer notre combat dans toute sa perspective, mouillant le maillot pour que notre combat débouche avec les objectifs que nous nous étions fixés. Souvent, ses interventions tenaces furent décisives et ont marqué dans le monde du travail. Comme ministre, nous savons la trace qu’elle a laissée, vivante encore aujourd’hui, dans le milieu du sport et de l’éducation populaire, et bien au-delà : celle d’une femme courageuse, menant les combats jusqu’à leur terme avec les premiers concernés.
Si nous soutenons Marie-George Buffet, ce n’est pas parce qu’elle est communiste et que certains d’entre nous le sont également. Et ce n’est certainement pas pour opérer un rassemblement autour du Parti communiste. Cela ne serait pas à la hauteur des défis. Mais qui peut réduire aujourd’hui l’image de Marie-George Buffet à celle de son parti ? Au quotidien, avec celles et ceux qui partagent nos jours, nous pouvons vérifier qu’elle rassemble et qu’elle incarne un espoir vivace. Aucune autre candidature n’incarne cela avec autant de force que la sienne. Or, n’est-ce pas ce rassemblement-là que nous voulons, bien au-delà des collectifs déjà constitués ?
De ces hommes et de ces femmes, Marie-George Buffet est connue depuis dix ans. À elle, ils sont prêts, pour beaucoup, à accorder leur confiance, malgré la prégnance du souvenir d’un certain 21 avril.
Pour ceux d’entre nous qui ont vécu la campagne des régionales en Île-de-France, nous savons que la campagne et le résultat ont été pleinement partagés, et que c’est cela qui a fait la victoire.
Les uns et les autres, nous gardons en mémoire le rôle essentiel qu’elle a joué pour faire converger les forces antilibérales contre la constitution européenne, les gestes politiques qu’elle a produits pour que chacun trouve sa place. C’est cela qu’elle incarne. Nous-mêmes, qui le savons pour l’avoir vécu de l’intérieur, ne le lui renions pas alors que d’autres le lui reconnaissent.
Après la désignation de Ségolène Royal, beaucoup sont en recherche d’autre chose, d’une gauche courageuse, d’une gauche qui mène son combat. Ils cherchent une candidature alternative et crédible qui rendra leur vote à coup sûr utile. Comme pour le référendum, nous devons nous adresser à l’ensemble de la gauche et dire : « Quand on est de gauche, on est antilibéral. » Et nous savons que, de ce point de vue, le nom du (ou de la) candidat(e) donnera plus ou moins de force à cette volonté.
Ce débat est difficile, il est vif. Chacun veut donner son avis et souhaite qu’il soit entendu. C’est normal. Au sein des collectifs antilibéraux, certains expriment une autre préférence. Nous pouvons le comprendre. Mais nous n’acceptons pas que l’on ternisse l’image de l’un d’entre nous.
Selon les premiers résultats, Marie-George Buffet arriverait nettement en tête. Cela ne nous étonne pas, car c’est bien sa candidature qui est à nos yeux la plus convaincante. Il n’existe pas de consensus naturel, ni total, nous le savions dès le départ. Il nous reste à construire le consensus maximum. Et il serait naturel qu’il se fasse autour de la candidature recueillant le plus d’adhésions. Il faut respecter ce qui sort du débat citoyen. Comme cela a pu être expliqué : « Il y a une très grande différence entre ralliement inégalement convaincu à une candidature de compromis
et adoption majoritaire d’une proposition à laquelle demeurerait opposée une forte minorité ». Quelle campagne nous donnera une candidature qui manquera de notre conviction ?
Et n’est on pas en train de réintroduire un préalable dans notre discussion en parlant d’une « forte minorité » qui demeurerait « opposée », le préalable que notre candidate ne soit tout simplement pas Marie-George Buffet ? Est-ce sur la base d’un tel renoncement que nous pourrions porter l’ambition définie en commun ? Faut-il écarter la candidature la plus emblématique et la plus souhaitée pour convaincre notre peuple ?
Et si l’on pousse le raisonnement, choisir une candidature plus lisse, ou plutôt présentant moins d’aspérités parce que moins connue ? Ce débat nous mène droit à la révision de nos ambitions à la baisse. Est-ce de « l’enfermement » ? Non... Ces derniers jours, Marie-George Buffet, malgré les petites agressions dont elle pourrait se sentir victime, a encore posé des actes d’ouverture en formulant ses propositions pour la campagne. Il n’y a pas lieu pour nous de « renoncer », car nous ne sommes pas dans une logique d’affrontement. Nous pensons qu’il faut savoir tirer les leçons de ce qui s’exprime sans jamais perdre de vue ce que nous voulons. Et pour nous, comme pour beaucoup de celles et ceux qui nous entourent, Marie-George Buffet est celle qui est la mieux à même de donner toute sa force et sa cohésion à notre rassemblement. Nous sommes tous conscients que ce que nous avons réalisé ensemble est précieux. Nous savons tous que nous devons réussir ensemble. Nous savons tous que les enjeux appellent notre engagement commun. Nous avons le pain et le couteau. Ne gâchons pas la possibilité inédite qui s’offre à nous de changer les choses en profondeur. Ensemble, dès lundi, allons-y ensemble.