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La version montréalaise de la manifestation mondiale pour la justice climatique fut modeste, en comparaison de celle de l’an dernier, par cette journée idéale de beau temps ce que ne peut expliquer la seule résurgence de la covid-19 et l’absence de Greta Thunberg.
Elle était organisée par la coalition « Racial Justice Collective, Debout Pour La Dignité, la Coalition étudiante pour un virage environnemental et social (CEVES), La Planète s’invite au parlement, Climate Justice Montreal, XR Youth Québec, Pour Le Futur Montréal, Defund The Police Coalition et Solidarité sans frontières » (Métro-Montréal) et réunissait une forte majorité jeune tant francophone qu’anglophone et sans aucune présence organisationnelle ou représentative du mouvement syndical et social de même que de Québec solidaire.
Cette composition de la coalition nettement gauche radicale déterminait le radicalisme des quatre revendications tout en tenant compte de la plus récente conjoncture :
• L’atteinte de la carboneutralité d’ici 2030 ;
• La régularisation de toutes les personnes migrantes ;
• Le définancement et la démilitarisation de la police ;
• La reconnaissance pleine de la souveraineté autochtone.
On remarquera la revendication de la carboneutralité pour 2030 et non pour 2050 bien que cette notion ouvre la porte aux fausses solutions nucléaire et surtout à celle de la séquestration en sous-sol du carbone combinée à l’accaparement des terres autochtones et paysannes. Ce n’est là ni la cible Québec-Zen du Front commun pour la transition énergétique (FCTÉ) (« réduction d’au moins 65% des GES d’ici 2030 et la neutralité carbone en 2040 ») réunissant la quasi totalité du mouvement social québécois et encore moins de Québec solidaire (réduction des GES des deux tiers en 2030, sauf en campagne électorale où elle est de 50% !, et de 95% en 2050). À noter que Québec solidaire ne souscrit qu’à la régularisation des travailleuses essentielles dans la lignée des Libéraux fédéraux mais qui ont cédé à la CAQ ne la voulant que pour les préposées des CHSLD. Pour le définancement de la police, Québec solidaire demeure pour l’instant silencieux. Et ce n’est guère mieux pour les grandes centrales syndicales.
Le mouvement social et Québec solidaire avaient donc de bonnes excuses pour déclarer forfait. Il en avait d’autant plus que la bilinguisme y était marqué vouant aux gémonies la lutte victorieuse du peuple québécois pour imposer le français comme seule langue officielle du Québec — il faut se souvenir que la langue publique d’un peuple est un droit collectif et non pas un droit individuel —, base plus tard de la loi 101 charcutée depuis par la Cour suprême fédérale :
Questionné sur les discours qui ont précédé la manifestation, prononcés uniquement en anglais, François Geoffroy, co-porte-parole de La Planète s’invite au Parlement, a offert cette réponse : C’était comme ça parce qu’on voulait donner la parole aux personnes autochtones et de couleur en début de manifestation, mais la plupart des discours en fin de manifestation seront en français, la présence du français est importante pour nous.(Presse canadienne par Radio-Canada)
La commodité des excuses pour escamoter ses responsabilités politiques
Mais ce ne sont que des excuses. Pourquoi le FCTÉ et/ou Québec solidaire n’ont-il pas pris l’initiative de profiter du premier anniversaire de la grande manifestation de Montréal et de cette journée mondiale pour organiser une grande manifestation pro-climat et anti-pandémie cette fois-ci en précisant certaines revendications de relance de plein emploi écologique au-delà de la pure dénonciation et de la stérile supplication auprès des gouvernements en place.
Par exemple, à son conseil national du 12 septembre, Québec solidaire s’est engagé dans une campagne politique pour « un plan d’urgence de relance juste et verte pour un pays solidaire, pour sortir de la crise sanitaire, sociale, économique et écologique actuelle » dont l’une des revendications phares est « l’embauche de 250 000 personnes dans le secteur public et par la nationalisation les secteurs de transport collectif, des secteurs privés de santé et d’éducation » à la suggestion de l’IRIS, le think-tank de la gauche québécoise. On se dit que cette caution de l’IRIS eut suffi pour emporter l’adhésion du FCTÉ en autant que la direction Solidaire n’enfouisse pas six pieds sous terre la résolution de son conseil national comme elle le fait présentement.
En autant que cette manifestation eut été démocratique comme celle de l’an passé, la petite coalition radicale aurait sans doute été plus qu’heureuse de s’y intégrer avec ses morts d’ordre, ses bannières et ses pamphlets particulièrement si elle avait eu droit à une petite place à la tribune. Peut-être eut-elle pu convaincre la grande coalition d’adopter ses autres demandes lesquelles sont strictement démocratiques et revendiquées dans la rue par des groupes malheureusement fortement anglicisés par les politiques oppressives du gouvernement fédéral, comme la loi des Indiens, et par la pression du capitalisme néolibéral dont l’anglais est la lingua franca. Cette petite coalition radicale, sentant physiquement et politiquement la force d’un peuple fier et combatif comme il l’a été en 1972 et en 2012, aurait sans doute été plus sensible au fait français.
En attendant le jour de cette re-mobilisation de masse, la courageuse petite coalition radicale de la nouvelle jeunesse intersectionnelle, quelque peu éloignée cependant de la lutte de classe qui nous réunit toutes et tous contre ce détestable 1% qui concentre richesse et pouvoir jusqu’à l’orgie, aura combler vaille que vaille un immense vide.
Marc Bonhomme, 27 septembre 2020