• Quel est votre sentiment sur la prise de contrôle par le Hamas de la bande de Gaza ?
Mustapha Barghouti - La première raison de tout cet effondrement est la poursuite de l’embargo. De nombreuses forces, dont le gouvernement israélien, les États-Unis et l’Union européenne ont saboté les initiatives de paix du gouvernement d’unité nationale palestinien en continuant l’embargo, ce qui a abouti à ce grave échec. Ils ont refusé la démocratie palestinienne, la seule démocratie du monde arabe. Un tiers de notre Parlement a été arbitrairement emprisonné par Israël. La seconde raison, c’est que le Hamas n’aurait pas dû recourir à la force, c’est une erreur. Mais, le plus important maintenant, c’est de sortir de cette situation. Il nous faut trouver le moyen d’une réconciliation et il faut revenir en arrière sur bon nombre d’actions entreprises. Il faut un gouvernement transitoire intérimaire qui devra se concentrer sur la réforme de l’appareil de sécurité, en le rendant indépendant des factions, et qui préparera ensuite de nouvelles élections libres et démocratiques.
• Mais les élections précédentes n’ont pas été acceptées par la communauté internationale...
M. Barghouti - En insistant sur la tenue de nouvelles élections, nous envoyons le message que ce n’est pas à Israël, ni aux États-Unis, ni à l’Iran de décider, à la place des Palestiniens, de ceux qui doivent nous diriger. Si nous avions appelé à des élections deux mois après les dernières élections, cela n’aurait pas été accepté, mais quand nous demandons de nouvelles élections après presque deux ans et après toute cette expérience, je pense que c’est totalement justifié.
• Êtes-vous le seul à dire cela et y a-t-il d’autres forces derrière vous ?
M. Barghouti - Un grand nombre de forces démocratiques disent la même chose, comme le FPLP, le FDLP, le Parti du peuple, des organisations de la société civile, le réseau d’aide aux blessés, etc. Je pense que cette idée gagne du terrain et elle est la seule façon de se sortir de cette situation.
• Pensez-vous que nous sommes à la veille d’une guerre civile ?
M. Barghouti - Non, ce qui est arrivé n’est pas une guerre civile, mais une lutte pour le pouvoir entre deux factions. Il faut s’affronter en organisant des élections démocratiques, pas en se tirant dessus. C’est une honte d’en être arrivé là. Nous avons certes un sérieux problème, qui est interne aux Palestiniens, mais il reste secondaire face à la question principale qu’est l’occupation israélienne, qui dure depuis quarante ans, la plus longue occupation de l’histoire moderne, un apartheid pire que celui qu’a connu l’Afrique du Sud. C’est là-dessus que je mets toute mon énergie.