Comme lors de la désignation du successeur de Yasser Arafat à la tête de l’Autorité palestinienne, c’est un peuple sous occupation qui, le 25 janvier, va désigner ses représentants. Sans savoir s’il lui sera un jour possible d’accéder à sa pleine souveraineté, comme il le revendique dans un État qui s’établirait sur la totalité des territoires occupés en 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.
Jérusalem... La capitale symbolique de la Palestine est aujourd’hui au cœur du combat pour l’autodétermination d’un peuple privé de ses droits nationaux depuis des lustres. Dans la continuité du dépeçage de la Cisjordanie par la construction d’un mur qui, lorsqu’il sera achevé, aura pour effet d’interdire pratiquement aux Palestiniens de disposer d’un État digne de ce nom, Jérusalem se voit soumise à une intense politique de colonisation. Des quartiers entiers du secteur palestinien de la cité sont détruits, bouclés ou partagés par ce même mur qui rend pratiquement impossible tout contact entre la population arabe et le reste de la Cisjordanie. Près de 100 000 résidents de la ville sont désormais à l’extérieur du mur, donc sans accès à leurs écoles, hôpitaux ou emplois.
Pour bien signifier leur volonté d’annexion, les gouvernants israéliens ont attendu le dernier moment pour autoriser les opérations de vote, le 25 janvier... Et voilà que l’on apprend que deux compagnies françaises, Alstom et la Connex, ont été retenues pour participer à un consortium de construction et d’exploitation d’un tramway, lequel doit entrer en fonction en 2008. Ce projet vise à relier la partie occidentale de la ville à deux colonies construites en Cisjordanie occupée : Pisgat Zeev et French Hill. Son dessein n’est guère mystérieux. Il s’agit, pour les dirigeants israéliens, de dessiner ce qu’est à leurs yeux l’avenir de Jérusalem : annexée en totalité et décrétée capitale de l’État d’Israël. Il n’est pas inutile de souligner que pareille entreprise constitue non seulement une violation nouvelle et majeure des droits nationaux palestiniens, mais qu’elle contrevient même au droit international en vigueur
Depuis 1967, aucun État ne reconnaît officiellement l’annexion de Jérusalem ou la légalité des colonies construites en territoire palestinien. En renforçant la présence israélienne et les implantations coloniales en zone palestinienne, la construction de ce tramway viole de surcroît les conventions de Genève. Et elle s’avère en contradiction flagrante avec l’avis du 9 juillet 2004 de la Cour internationale de justice de La Haye, qui condamne la construction du mur, en exige le démantèlement total, et fait obligation aux États membres des Nations unies d’agir en ce sens. Pourtant, le gouvernement français, à l’instar de ses homologues européens ou de l’administration américaine, demeure silencieux. Autrement dit aussi complice d’une logique de spoliation que le sont Alstom et la Connex.
C’est pour dénoncer cette attitude et l’engagement mercantile des deux firmes françaises dans la construction coloniale du tramway qu’une campagne d’opinion vient de débuter en France. C’est le Collectif national pour une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens (qui regroupe plusieurs dizaines d’associations, syndicats et partis) qui en a pris l’initiative. Il compte, dans les prochains jours, organiser une campagne d’envoi de cartes postales aux entreprises concernées ainsi qu’aux autorités françaises, éditer un autocollant, publier un tract et préparer des initiatives de mobilisation militante. Dans la difficile lutte qui est la leur, les Palestiniens ont un urgent besoin de notre solidarité. Pour desserrer l’étau dans lequel ils se trouvent pris, nous avons le devoir de mettre en échec toutes les manifestations du projet de colonisation et d’annexion dont ils sont les victimes. Arrêtons donc le tramway de la honte !