En réponse aux questions posées par l’Association d’amitié franco-coréenne (AAFC)
Nous abordons dans sa globalité la situation en Asie du Nord-Est. Nous n’ignorons pas la responsabilité historique des Etats-Unis dans la géopolitique de crise qui domine cette région du monde – en particulier sa militarisation – ; une responsabilité qui remonte à leur volonté de briser les luttes de libération en Chine, au Vietnam ainsi qu’en Corée et dans bien d’autres pays d’Asie orientale. Cette politique a notamment abouti à la division durable de la péninsule coréenne, division qui est devenue un facteur de crise chronique.
Nous n’ignorons pas non plus la responsabilité présente de Washington qui organise de grandes manœuvres aéronavales avec Tokyo et Séoul et qui implante de façon précipitée, en Corée du Sud, une base de missiles d’interception Thaad – sans attendre le résultat des prochaines élections sud-coréennes. Les Etats-Unis font ici fort peu de cas du droit démocratique de la population à décider de la politique à mettre en œuvre sur la question de la réunification ou sur le rôle de leur pays dans la situation de crise régionale.
Les forces d’extrême droite, militaristes, sont puissantes en Corée du Sud et la démocratie certainement imparfaite, comme l’a confirmé le scandale d’Etat qui a conduit à la destitution de Park Geun-hye. Nous condamnons en particulier l’interdiction du Parti progressiste unifié, l’arrestation des dirigeants syndicaux combatifs, les attaques contre le droit syndical, la protection dont bénéficient les nantis (y compris après un événement aussi grave que le naufrage du ferry Sewol). Cependant, démocratie il y a. Des millions de personnes ont pu se mobiliser pendant plus de 300 jours, imposant la destitution de Park Geun-hye et l’appel à de nouvelles élections. Rien de tel en Corée du Nord.
Vous nous demandez ce que nous pensons des restrictions démocratiques en Corée du Sud. Etrangement, vous ne nous posez pas la même question concernant la Corée du Nord. Il faut dire que dans ce cas, il n’y a pas « restriction » de la démocratie, des libertés démocratiques. Il n’y a pas de démocratie du tout.
Notre opposition à la politique impérialiste des Etats-Unis ou de Tokyo n’implique en aucun cas un soutien au régime bureaucratique et népotique en vigueur en Corée du Nord. Nous considérons que ce régime n’incarne en rien la tradition communiste coréenne, qui était si vivace au lendemain de la Seconde Guerre mondiale ; au contraire, il l’a trahie (et même réprimée). Problème majeur, la politique du pouvoir nord-coréen rend plus difficile le rassemblement des forces progressistes contre les dynamiques de guerre en Asie orientale, contre une course folle aux armements (y compris nucléaires). Elle favorise en revanche le renforcement des courants nationalistes militaristes.
L’Asie orientale est aujourd’hui le théâtre d’un conflit majeur entre puissances capitalistes anciennes et nouvelles : les Etats-Unis et le Japon, la Russie et la Chine. La péninsule coréenne est probablement le principal « point chaud » dans cette géopolitique de confrontation. Pékin a gagné durablement l’initiative en mer de Chine du Sud. Washington tente de la garder au nord-est. Le gouvernement japonais poursuit son entreprise de réarmement, à l’encontre de la Constitution et des convictions pacifistes de la population.
Face à ces dynamiques guerrières, nous soutenons tous les efforts engagés dans la région par des mouvements populaires pour définir une politique de paix et de sécurité du point de vue des peuples et non plus du point de vue des puissances. C’est, pour nous, la meilleure façon d’œuvrer à la réduction des tensions, puis d’aider à la recherche d’une solution durable aux conflits territoriaux et maritimes actuels dans toute l’Asie orientale.
L’équipe de campagne de Philippe Poutou
Le Nouveau Parti anticapitaliste
La lettre de l’Association d’amitié franco-coréenne (AAFC)
Paris, le 18 mars 2017
Monsieur,
L’Association d’amitié franco-coréenne (AAFC) défend, depuis sa création en 1969, l’unité de la Corée. Attachée à la souveraineté de la Corée et à la liberté de son peuple, elle défend la paix dans toute la péninsule coréenne, enjeu vital pour la paix du monde. Elle considère que les solutions aux questions posées dans la péninsule doivent être avant tout réglées par les Coréens et par eux seuls.
L’AAFC s’est toujours efforcée de présenter une vision équilibrée de la situation coréenne, loin des caricatures et des perceptions unilatérales.
Vous êtes candidat à l’élection présidentielle française. L’AAFC souhaiterait donc connaître votre opinion sur les questions coréennes, le président de la République étant l’acteur principal dans la politique étrangère de la France.
Nous avons cinq questions à vous poser.
Malgré l’armistice de 1953, les deux Corée sont toujours « techniquement » en guerre, et la péninsule coréenne connaît régulièrement des tensions. Alors que les médias et certains pays se plaisent à souligner le programme nucléaire de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), les exercices militaires américains menés en République de Corée (Corée du Sud) ne soulèvent aucune réprobation, alors qu’ils simulent clairement une invasion de la RPDC. Aux termes de l’article 39 de la Charte des Nations unies, de telles manœuvres peuvent pourtant être considérées comme une « menace contre la paix ». Estimez-vous nécessaire que la situation dans la péninsule coréenne soit traitée dans sa globalité et que les comportements d’autres acteurs – à commencer par les États-Unis d’Amérique - soient soulignés ?
Les sanctions internationales et unilatérales adoptées contre la RPDC n’ont nullement entamé la détermination des autorités nord-coréennes, tout en pénalisant en premier lieu la population de ce pays. Depuis des années, ces sanctions ont démontré leur inefficacité et ne font que détériorer la situation. Quelle est votre position sur les sanctions dont la RPDC fait l’objet ?
À l’exception de la France et de l’Estonie, tous les pays de l’Union européenne entretiennent des relations diplomatiques normales avec la RPDC. Cette situation est contraire à la tradition diplomatique de la France, qui est de reconnaître des États et non des régimes politiques, et nuit à la place de notre pays en Asie orientale, une des régions les plus dynamiques du monde. Après l’ouverture, en 2011, d’un premier bureau français de coopération à Pyongyang, comptez-vous faire évoluer cette situation pour normaliser les relations entre la République française et la RPDC, conformément à la pratique de nos principaux partenaires européens ?
La République de Corée connaît de vives tensions politiques, notamment depuis 2012 et l’élection de la présidente Park Geun-hye récemment destituée. Le Parti progressiste unifié, un des principaux partis politiques sud-coréens, a fait l’objet d’une interdiction en 2014 et on a assisté à une répression accrue à l’encontre des syndicats ou encore des familles des victimes du naufrage du ferry Sewol (304 morts et disparus le 16 avril 2014), manifestant pacifiquement pour exiger la vérité sur cette tragédie. La République de Corée entend pourtant partager les mêmes valeurs et standards que les pays occidentaux. La répression en cours en Corée du Sud est peu soulignée, alors que les médias se plaisent à relayer la moindre rumeur sur la Corée du Nord. Quelle est votre position sur les différentes restrictions apportées aux libertés démocratiques en Corée du Sud ?
Le dialogue intercoréen reste peu connu et encouragé à l’étranger. L’AAFC soutient clairement ce dialogue comme seule voie possible pour le règlement des différends entre Coréens et l’apaisement des tensions dans la péninsule coréenne. Estimez-vous que la France doit appuyer le dialogue entre les deux Corée et rappeler qu’il constitue le seul instrument sérieux pour trouver une solution pérenne à la crise coréenne ?
Vos réponses ne pourront qu’intéresser les électeurs dont le choix se fait en fonction de différents paramètres, dont les questions internationales, et nous rendrons ces réponses publiques. Nous estimons en effet que la question coréenne est une de celles en vertu desquelles notre politique étrangère doit être évaluée.
Nous vous remercions d’avance pour tout l’intérêt que vous porterez à la présente lettre. L’Association d’amitié franco-coréenne est à votre entière disposition pour toute question, ainsi que pour une éventuelle rencontre.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur, l’expression de nos sentiments les plus respectueux.
le Bureau national de l’Association d’amitié franco-coréenne
Association d’amitié franco-coréenne
www.amitiefrancecoree.org