Une des agressions a eu lieu vers 12H30 devant la Librairie de l’Office des publications universitaires (OPU), selon un témoin oculaire. Plusieurs femmes, jeunes filles, brandissaient des pancartes jaunes et scandaient des slogans pour les droits des femmes en Algérie.
Un homme, qui a déclaré être un habitant du quartier, a d’abord commencé à les provoquer et à exciter de jeunes manifestants arrivés devant l’entrée de la Faculté centrale. Face à l’impassibilité des militantes, il leur a arraché, avec d’autres jeunes, leurs pancartes et leurs banderoles..
Video 0:45 Publié par le Journal Féministe Algérien
Non reproduite ici.
Selon une vidéo largement relayée sur les réseaux sociaux, une autre femme a été agressée, cette fois-ci en face de la Faculté centrale, devant le Centre culturel de la rue Didouche.
Un homme lui a arraché une pancarte ou une affiche de ses mains avant de s’éloigner et de la déchirer, malgré la présence de plusieurs éléments de la police, témoins de la scène sans pour autant intervenir. Ce qui n’a pas manqué de susciter l’indignation et d’aggraver la colère de la jeune femme.
[Video non reproduite]
Quelques-unes des victimes sont revenues sur ces agressions, dans une vidéo publiée sur la page Femmes Algériennes pour un Changement vers l’Egalité. “Aujourd’hui, j’ai eu le sentiment que ce pays n’est pas le mien”, a déclaré l’une d’elles. “Ils m’ont dit ce n’est pas votre place, ce n’est pas le moment”.
“Toute la société souhaite un changement et la démocratie mais dès que nous demandons nos droits de femmes, nous ne sommes plus algériennes pour eux”, poursuit une autre.
Elles ont ainsi regretté que toutes les classes de la société et différents corps de métiers “ont été autorisées” à manifester sans incidents notables ces dernières semaines tandis qu’un “carré féminin d’à peine quelques mètres est accusé de “provoquer la séparation” et de “semer la division”.
[Video non reproduite 10:02 ( en arabe)]
Ces agressions ont suscité la colère de plusieurs citoyens, qui ont dénoncé ces actes sur les réseaux sociaux. Certains dénoncent “la hogra” et des actes sexistes tandis que d’autres relèvent les “arguments rétrogrades” des agresseurs.
Rédaction du HuffPost Algérie
De nombreuses incises ne sont pas reproduites ici.
• HuffPost Maghreb, 30/03/2019 11h:10 CET | Actualisé 30/03/2019 11h:14 CET :
https://www.huffpostmaghreb.com/entry/des-militantes-pour-les-droits-des-femmes-agressees-a-alger_mg_5c9f26f4e4b0474c08cf0ee4?ncid=other_facebook_eucluwzme5k&fbclid=IwAR1ZQvWo_L2XwogQbS1DyubdrpCb3o9orNNYE8lN2H4OLxmHMh1Lsp8KxdQ
Vague d’indignation après l’agression du « carré féministe » ce vendredi : « La démocratie se fera avec les femmes ou ne se fera pas ! »
“Silmiya”, “pacifique”. Ce mot magique est peut-être le plus beau slogan entendu depuis le début du formidable mouvement populaire enclenché le 22 février 2019. C’est même devenu sa marque de fabrique, et nous sommes chaque vendredi des millions à renouveler notre profond attachement à ce mot et ce qu’il représente, à le brandir comme un mantra, comme un serment de paix, un garde-fou, à la moindre velléité de dérapage ou d’expression violente. C’est même ce qui a permis d’avoir des millions d’Algériennes et d’Algériens dans la rue pour réaffirmer leur détermination à se libérer du joug d’un système oppressant et être maîtres de leur destin.
Malheureusement, ce vendredi [29 mars], une agression est venue mettre à mal ce mot généreux. Des militantes féministes ont été violemment prises à partie par des manifestants près de la place Audin, devant le portail de la Fac centrale, à proximité de la librairie de l’OPU, selon des témoignages concordants.
Notre amie Amina Izarouken, une militante très engagée dans le combat féministe, a livré ce témoignage à chaud sur Facebook : “Avec un groupe de femmes, nous sommes sorties aujourd’hui pour manifester contre le système et pour une Algérie meilleure, nous avons mis en avant des revendications de femmes et avons investi un petit espace à Audin. Des passants nous ont même aidées à accrocher nos banderoles. Cinq minutes plus tard, nous avons été agressées verbalement et physiquement. Nos banderoles ont été déchirées. Nous avons subi la haine et la rage de manifestants.”
D’après Amina, l’argument avancé pour justifier cette agression est que “ce n’est pas le moment”, que “vous divisez le mouvement”, leur a-t-on signifié. Elle leur rétorque : “Nous jugeons que c’est le moment parce qu’il s’agit de notre existence dans notre pays. En quoi nos revendications séparent ? Comment peuvent-elles séparer, kifeche [comment] ? Chacun et chacune, depuis le 22 février, sort pour un idéal, non ? D’autres personnes nous demandaient de nous voiler et (affirmaient) que l’égalité on ne l’aura jamais, que c’est contre l’islam. Heureusement, il y a eu des hommes bienveillants qui ont essayé de nous protéger jusqu’à ce que nous quittions cet espace.”
Une autre militante féministe a pointé la passivité des policiers témoins de la scène, “qui n’ont pas accompli leur devoir, qui consiste à nous protéger en tant que citoyennes algériennes”. Pis encore, ils “se sont rangés du côté de l’agresseur et ses partisans et nous ont demandé de partir”.
Cette affaire a suscité comme de juste de vives réactions d’indignation. “Il n’y a pas de peuple libre si les femmes ne sont pas libres”, écrit Wassyla Tamzali. La fondatrice des Ateliers sauvages souligne dans un autre message posté sur sa page Facebook :
Ne vous trompez pas, le combat des femmes, c’est pour libérer les hommes, et pas seulement du 5e mandat mais du plus vieux des mandats.”
Wassyla Tamzali prévient, sur un ton grave : “Nous avons été réduites à être les Cassandre de notre pays. Il est urgent que ça change car nous aurons le destin de Troie, et aux ruines de 1962 s’ajouteront celles de février 2019.”
Notre consœur Daïkha Dridi s’est fendue, de son côté, d’un texte extrêmement puissant publié sur sa page Facebook : “Les féministes dont les banderoles ont été déchirées, qui ont été bousculées et insultées aujourd’hui, l’ont été parce qu’elles sont des femmes”, dénonce-t-elle. “Si c’étaient des hommes qui étaient en train de placarder des affiches contre le Code de la famille, personne ne les aurait attaqués. C’est juste la hogra [le mépris du plus faible] ordinaire que de nombreux Algériens exercent en toute impunité sur les femmes.”
Et de poursuivre : “Qu’on ne nous dise pas que c’est parce qu’elles avaient des mots d’ordre différents de ceux de la majorité qu’elles ont été attaquées. Sinon, pourquoi on n’a encore jamais vu de manifestants portant le drapeau amazigh [berbère] se faire agresser ? Personne ne m’a demandé mon avis sur le carré féministe, ce n’est pas une idée que j’aurais défendue si j’avais participé au débat sur la question, mais maintenant que ce carré existe, j’en suis totalement solidaire. À tous ceux qui nous demandent de nous taire et d’attendre, je réponds : la démocratie se fera avec les femmes, l’égalité entière et totale, ou elle ne se fera pas. Ceux qui veulent préserver l’image exemplaire qu’ils se font des manifestations peuvent encore sauver cette image en vous rendant nombreux et nombreuses au carré féministe de la Fac centrale d’Alger dès vendredi prochain.”
« Soyons nombreux au Carré féministe »
Pour sa part, l’écrivain Kamel Daoud note : “On ne peut pas vouloir la liberté pour soi et l’interdire pour la femme algérienne. On ne peut pas dénoncer un système injuste et reproduire cette injustice sur la femme. On ne peut pas rêver d’une Algérie meilleure pour soi mais qui n’est pas meilleure pour les femmes algériennes. On ne peut pas dénoncer un régime et avoir ses mœurs face à la femme. La liberté est entière ou c’est une injustice. On ne peut pas dire ‘dégagez tous maintenant !’ aux gangs du régime et dire aux femmes ‘ce n’est pas le moment’. On est contre ce régime même quand il est dans nos esprits et nos habitudes. Ou bien on ne l’est pas.”
Amazigh Kateb [auteur, compositeur et interprète] a également réagi sur sa page : “Ceux qui s’attaquent aux féministes dans les manifestations sont soit des balataguia [hommes de main au service du pouvoir], soit des abrutis qui, dans un cas comme dans l’autre, nuisent au mouvement et aux femmes”, assène-t-il.
Leila Saadna, autre militante très active, fera remarquer fort utilement dans une publication sur les réseaux sociaux : “La semaine dernière, notre carré féministe devant la Fac centrale a été particulièrement bien reçu par plusieurs groupes de manifestantes et manifestants, qui ont repris avec nous nos slogans comme ‘Silmiya, nesswiya, tahya el m’ra el djazairiya’ (Pacifique, féminine, vive la femme algérienne !). L’ambiance était magnifique et pleine d’espoir”. Cela pour “montrer que nous n’étions pas isolées mais bien au cœur de la manifestation car nous faisons partie du peuple”, précise Leila. Tous au carré féministe vendredi prochain pour scander ensemble : “Silmiya, nesswiya, tayha el m’ra el djazairiya !”
Mustapha Benfodil
• El Watan, 31 mars 2019 :
https://www.elwatan.com/edition/actualite/vague-dindignation-apres-lagression-du-carre-feministe-ce-vendredi-la-democratie-se-fera-avec-les-femmes-ou-ne-se-fera-pas-31-03-2019
Nombreuses protestations et videos postées sur les réseaux sociaux :
Daikha Dridi
29 mars, 14:28 ·
Les féministes dont les banderoles ont été déchirées, qui ont été bousculées et insultées aujourd’hui l’ont été parce qu’elles sont des femmes. Si c’étaient des hommes qui étaient en train de placarder des affiches contre le code de la famille personne ne les aurait attaqués.
C’est juste la hogra ordinaire que de nombreux Algériens exercent en toute impunité sur les femmes.
Qu’on ne nous dise pas que c’est parce qu’elles avaient des mots d’ordre différents de ceux de la majorité qu’elles ont été attaquées. Sinon pourquoi on n’a encore jamais vu de manifestants portant le drapeau amazigh se faire agresser ?
Personne ne m’a demandé mon avis sur le carré féministe, ce n’est pas une idée que j’aurais défendue si j’avais participé au débat sur la question, mais maintenant que ce carré existe, je suis totalement solidaire.
A tous ceux qui nous demandent de nous taire et d’attendre, je réponds : la démocratie se fera avec les femmes, l’égalité entière et totale, ou elle ne se fera pas. Ceux qui veulent préserver l’image exemplaire qu’ils se font des manifestations, vous pouvez encore sauver cette image en vous rendant nombreux et nombreuses au carré féministe de la Fac centrale d’Alger dès vendredi prochain.
AmraneMM @AmraneMM
Donc quand les étudiants,les chômeurs,les profs,l’enseignement professionnel,les architectes,les personnes aux besoins specifiques,ont manifesté pour des demandes particulières et on a applaudi. Mais quand c’est des femmes, « c’est pas le moment » ? #نندب #Algérie
Kamel Daoud
On ne peut pas vouloir la liberté pour soi et l’interdire pour la femme algérienne. On ne peut pas dénoncer un système injuste et reproduire cette injustice sur la femme. On ne peut pas rêver d’une Algerie meilleure pour soi mais qui n’est pas meilleure pour les femmes algériennes. On ne peut pas dénoncer un Régime et avoir ses mœurs face à la femme. La liberté est entière. Ou c’est une injustice. On ne peut pas dire « dégagez tous maintenant ! » aux gangs du régime et dire aux femmes « ce n’est pas le moment ». On est contre ce Régime même quand il est dans nos esprits et nos habitudes. Ou bien on ne l’est pas.
• http://www.siawi.org/spip.php?article19208
Après l’agression du 29 janvier contre le carré féministe à Alger
Lors de la manifestation du vendredi 29 mars à Alger, le « carré des féministes » a été agressé violemment par d’autres manifestants que visiblement l’exigence d’égalité des droits dérange, suscitant une vive indignation et des protestations.
Lors de la manifestation du vendredi 29 mars à Alger, le « carré des féministes », crée et apparu lors des manifestations du 22 mars a été agressé violemment par d’autres manifestants que visiblement l’exigence d’égalité des droits dérange.
D’après les témoins et la revue de presse, les reproches pouvaient être d’ordre religieux, « des personnes nous demandaient de nous voiler et (affirmaient) que l’égalité, on ne l’aura jamais, que c’est contre l’islam ». Ou sur d’autres registres : « division du peuple », ou « ce n’est pas le moment ».
L’on constate que quand il y a expressions des mouvements catégoriels –étudiants, chômeurs, profs,enseignement professionnel, architectes, personnes aux besoins spécifiques, pour des demandes particulières « on a applaudi ». Mais quand il s’agit d’un « carré féminin d’à peine quelques mètres » il est accusé de « provoquer la séparation et de semer la division ».
Quant au « ce n’est pas le moment », les femmes remarquent à juste titre que ce n’est jamais le moment, que tout est toujours renvoyé aux lendemains qui chantent alors qu’il y a « d’autres priorités », et ce n’est pas spécifique à l’Algérie. Dans Observalgerie.com, Amina Zrouken souligne : « Je ne comprends pas comment on nous dit que ce n’est pas le moment ! Les Algériens sortent aujourd’hui pour une Algérie meilleure, pour une démocratie, pour des lois égalitaires. Et pour nous aussi, il est important de dire dans ce mouvement que nous revendiquons nos droits en tant que femmes. La démocratie qui ne prend pas en charge les droits des femmes n’est pas une démocratie. On voulait pointer du doigt que le côté démocratique de ce pays qu’on veut ne peut pas se faire sans l’égalité ».
Ce qui est notable c’est que si les forces de police présentes officiellement chargées de la sécurité des manifestants ont au mieux laissé faire (peut-être assurer la sécurité des manifestantes ne rentrait pas dans leur mission ?), au pire invité les femmes à enlever leurs pancartes et à partir, l’agression a suscité des réactions et de vives protestations, El Watan parle d’une « vague d’indignation ».
Robi Morder
• MEDIAPART. LE BLOG DE ROBI MORDER. 1 AVR. 2019 :
https://blogs.mediapart.fr/robi-morder/blog/010419/apres-lagression-du-29-janvier-contre-le-carre-feministe-alger
Au « carré des féministes », les Algériennes revendiquent leur part du changement
Réunies devant les escaliers de la fac centrale, munies de leurs drapeaux et banderoles, des militantes pour les droits de la femme scandaient “pacifique, féministe, vive la femme algérienne”.
Sous une pluie battante, plusieurs militantes des droits des femmes se sont organisées lors de la manifestation pacifique de ce vendredi 22 mars dans un “carré des féministes”. Activistes ou simples citoyennes, elles se sont rassemblées ce vendredi afin de dire “le changement sera également au féminin”.
Réunies devant les escaliers de la fac centrale, munies de leurs drapeaux et banderoles, des militantes pour les droits de la femme scandaient “pacifique, féministe, vive la femme algérienne”. Un slogan pour dire que ce tournant dans l’Histoire de l’Algérie sera avec la participation massive des femmes.
Des militantes pour les droits de la femme de la première heure étaient présentes à ce “carré féministe”. Fadhila Chitour-Boumendjel membre fondateur du réseau Wassila et militante des droits de la femme, apporte son soutien à cette initiative.
“Nous sommes là aujourd’hui pour la continuité du combat, pour une Algérie égalitaire pour la femme. Nous avons raté le coche plusieurs fois depuis l’indépendance. Les femmes pendant la guerre de libération sont montées au maquis tout en continuant à honorer leurs responsabilités de femmes, malheureusement après l’indépendance celles-ci ont été remerciées et sans plus” indique Fadhila Chitour-Boumendjel.
Pour cette militante, l’Algérie s’ouvre sur une nouvelle ère propice à l’amélioration de la condition de la femme algérienne. C’est pourquoi il est nécessaire de s’unir et de doubler d’effort pour acquérir d’avantages de droit.
Hassina Oussedik d’Amnesty international estime que les droits de la femme dans le monde ont connu une régression. “En Algérie nous ne sommes pas mieux”. Pour elle il faut continuer l’engagement et transmettre le flambeau à la nouvelle génération.
Sur un ton ferme et déterminé, de jeunes militantes scandaient “le pays est le nôtre et on fera ce qu’on voudra”. Signataires de la Déclaration des “femmes Algériennes pour un changement vers l’égalité” celles-ci se disent prêtes à faire valoir le rôle déterminant de la femme dans la société.
Leila Saadna, signataire de la lettre se félicite de la présence massive des femmes depuis le début de ce soulèvement populaire. Cette participation active démontre, selon elle, la volonté des femmes à être plus présentes dans la société.
Les slogans des militantes du carré des féministes ont attiré de nombreuses citoyennes.
“La question des femmes nous concerne toutes” indique une jeune fille dont la pancarte dit : “on sortira malgré le mauvais temps car vous êtes plus mauvais”.
Latifa Abada
• Huffpost Maghreb, 22/03/2019 17h:26 CET | Actualisé 23/03/2019 10h:15 CET :
https://www.huffpostmaghreb.com/entry/au-carre-des-feministes-les-algeriennes-revendiquent-leur-part-du-changement_mg_5c950164e4b01ebeef0e8e48