Mon intervention se fera en trois parties, dans un premier temps il est indispensable de rappeler le mandat qui nous avait été confié à Montreuil, dans un deuxième temps nous reviendrons sur le contexte politique de cette élection et sur les particularités de la campagne de José Bové, enfin je terminerai sur la suite à donner à la campagne présidentielle.
Pour ne pas créer de quiproquo, je tiens à préciser que cette introduction n’a pas pour but de développer toutes les questions à l’ordre du jour.
Après avoir débuté notre discussion, d’ici une demi heure environ, jacques Perreux au nom du comité de campagne de José Bové fera le point de celle-ci. Demain matin une autre introduction ouvrira le débat sur les législatives.
I) Rappel du mandat de Montreuil
A l’issue des 20 et 21 janvier, la réunion nationale des collectifs unitaires antilibéraux considérait qu’une candidature de rassemblement était toujours possible. Elle proposait que José Bové en soit le candidat. Cette candidature devait avoir pour base les 125 propositions et le texte « Ambition et Stratégie ».
Nous appelions le PCF et la Ligue communiste à renoncer à des candidatures séparées et à prendre toutes leurs places dans une campagne collective.
Nous décidions d’organiser toute une série de meetings, la campagne devait être engagée autour de porte-parole représentants toutes les sensibilités du rassemblement. Nous précisions que chaque collectif et chaque militant déciderait de son engagement.
Une nouvelle réunion nationale devait se tenir début mars pour faire le point de l’action engagée, vérifier qu’elle suscite une dynamique populaire et décider des suites à donner.
Et l’on terminait en disant qu’un collectif de campagne serait créé pour prendre en charge la campagne présidentielle en lien avec la coordination nationale.
Il est bien entendu que notre discussion de ce matin doit dresser le bilan de nos engagements sur la base des décisions de notre réunion de Montreuil.
II) Le contexte politique
Mais il est important de resituer cette question dans le contexte politique notamment en tenant compte de ce qui s’est passé depuis Montreuil.
L’élection présidentielle se situe dans un contexte de bouleversements forts de la société française, la libéralisation se fait à marche forcée. Tout dans notre société devient marchandise.
Ces bouleversements sociaux économiques s’accompagnent de bouleversements politiques : montée de l’extrême droite en France et en Europe, quasi disparition des partis communistes, évolution des partis socialistes de la social-démocratie vers le social libéralisme si ce n’est vers le libéralisme tout court et dont certains se font les promoteurs les plus zélés...
Cet état des lieux ne doit pas nous masquer les résistances fortes qui existent au sein du parti socialiste et de l’électorat socialiste. Mais il ne faudrait surtout pas l’oublier, une partie croissante de la population ne vote plus et une autre n’a pas le droit de vote.
Le non au référendum est venu gripper cette belle mécanique libérale et contredire la toute puissance des médias et des grands partis politiques.
C’est autour de la campagne du non que sont apparues plusieurs nouveautés dans la vie politique française.
Des comités du non sont nés, ils constituèrent le socle des CUALS, ils étaient unitaires car ils regroupaient des citoyens, des adhérents d’Attac, du parti communiste, du parti socialiste, des verts, des syndicats, etc... Ils marquaient déjà une volonté de dépasser le cadre des partis et des militants, en y participant, entraient en opposition avec leur propres partis, c’était le cas des verts et des socialistes notamment avec PRS.
Ce fut aussi le temps de l’émergence forte d’internet dans le débat politique en opposition à une presse très largement oui-ouiste, c’est-à-dire l’irruption de citoyens dans l’action politique par l’intermédiaire de ce média.
La réussite de cette campagne a été fondatrice pour les collectifs. Nombre d’entre eux ont continué à se réunir et ont vécu deux temps forts de la vie politique : la crise des banlieues - même s’ils n’en furent pas les acteurs - ils se sont interrogés sur le sens des événements et ont recherché le débat avec les jeunes, puis la lutte contre le CPE où de nombreux collectifs s’engagèrent activement.
Tout cela a nourrit la volonté d’une candidature unitaire aux présidentielles mais l’arc du non n’était déjà plus tout à fait complet : les socialistes engagés dans la bataille du non participaient au débat programmatique de leur parti et à la désignation du candidat ; depuis, ils sont toujours restés sur la marge. La ligue communiste n’est jamais vraiment entrée dans la démarche, seul le PCF paraissait vouloir aller au bout de notre ambition commune.
Mais le poids des appareils politiques a recommencé à peser. Car pour être élu il est plus simple et plus sûr de disposer d’un appareil, de moyens financiers, de réseaux structurés, de gens experts, habitués aux subtilités d’une campagne. De leur côté, les partis ont besoin des élus pour leur financement et leur rayonnement.
L’impact de l’échec de St Ouen fut très fort sur les collectifs. Dans les questionnaires, on trouve des réactions exprimant le découragement et l’écœurement mais, en même temps, malgré le désarroi, une volonté de continuer et de ne pas se résigner s’exprime fortement.
À cette occasion-là, l’arc se brise davantage puisque la Ligue l’avait déjà quitté et que le parti Communiste partait à son tour.
Je souhaite souligner une problématique qu’il va falloir aborder pour les législatives et développer plus encore à l’automne, car l’abandon par les partis politiques de la construction unitaire a créée des fractures à l’intérieur de ces partis, les verts sont concernés depuis longtemps, la ligue à son tour et le pcf enfin. Cela se traduit par une méfiance renforcée et par le départ de militants de ces organisations ou par la création de minorités internes et/ ou externes organisées (communistes unitaires, alterékolos, minos de la ligue, PRS ).
Les collectifs deviennent un espace politique très apprécié et parfois le seul espace politique pour certains.
D’autant que, dans ce contexte, surgit la candidature de José Bové portée par un appel citoyen de plus de 40 000 personnes utilisant le support internet. Ce qui dépasse largement les effectifs des collectifs, ce qui modifie également la nature des acteurs, les « simples citoyens » prennent une place dominante, n’est-ce pas l’amorce de ce que nous recherchons ? Car l’objectif des collectifs n’est pas d’être un simple refuge pour militants en rupture stratégique avec leur organisation. N‘ont-ils pas pour but de permettre au plus grand nombre de faire de la politique ? Notamment les sans, ceux qui ne votent plus, ceux à qui l’on ne permet pas de voter, quel est notre bilan en la matière ?
Face aux refus des partis, c’est un appel citoyen qui a relancer la possibilité d’une candidature antilibérale aux présidentielles. On retrouve encore une fois, fortement exprimée, une situation de crise et de défiance touchant les partis politiques de la gauche antilibérale.
Mais cela montre également, une fois de plus, la vitalité de cet espoir. Et le besoin ressenti de ne pas se laisser enfermer dans des logiques d’appareil fussent-elles celles de son organisation.
Cette évolution traduit la manifestation d’une recherche de solution face à la violence de la crise politique, certains parlent de décomposition, c’est sans doute vrai, cela mérite débat, notamment sur notre rôle dans la recomposition et de quelle recomposition parlons-nous. Encore une fois, les assises de l’automne peuvent nous permettre de travailler cette question.
Les questionnaires, malgré leurs limites, nous laissent entrevoir un nouveau panorama des collectifs. Certains, très minoritaires, disparaissent. D’autres, peu nombreux, se mettent en sommeil, la moitié laissent le libre choix à leurs membres et créent à côté des comités de campagne, d’autres fonctionnent à géométrie variable tantôt comité de campagne tantôt collectif anti libéral.
Quelques uns deviennent des collectifs pour Marie-George - je ne parle pas des collectifs montés à la va vite pour St-Ouen qui ont disparus très rapidement après. Tous les autres sont des collectifs soutenant José Bové sans compter les comités Bové qui se sont créés après Montreuil. Lorsque l’on parle des collectifs c’est de cette diversité-là dont il faut tenir compte, surtout lorsque l’on ambitionne de ne pas perdre leur capacité militante mais au contraire de la développer.
Une des leçons à tirer de cette situation c’est que la volonté de travailler ensemble perdure, que les 100 premiers questionnaires reçus montrent que ces collectifs représentent environ 2000 personnes. Nous ne connaissons pas le nombre exact de collectifs existants auquel il faudrait ajouter les comités Bové qui ne se sont pas créés à partir d’un collectif, bref tout cela représente une capacité militante qui compte mais qui demeure fragile. Ce qui nous pose la question de quelle organisation, pour quels objectifs ?
La campagne de José Bové :
Ce que nous n’avions pas imaginé à Montreuil, c’est le blocage des parrainages et l’énergie qu’il faudrait déployer pour tenter d’en recueillir 500.
Le débat d’idées est presque occulté par le combat pour les parrainages.
De toute part nous nous heurtons au piège et aux limites de la constitution. Cette question doit faire l’objet de combats pour que les grands partis ne décident pas, pour la population, des personnes qui peuvent se présenter et encore moins des débats de société qui pourront se tenir ou ne pas se tenir. D’ailleurs la formulation de la question induit l’idée que le refus opposé au candidat ne doit pas nous faire abandonner le terrain du débat d’idées. Ne devons nous pas de toute façon être présents dans la campagne ?
Ce que nous n’avions pas imaginé au moment de la candidature de José Bové, c’est l’émergence du candidat Bayrou et le fort recul de Ségolène Royal, recul qui entraine toute la gauche à ne peser que pour 1/3 des suffrages. Bien sûr, près de la moitié des français sont indécis et les dernières élections nous ont prouvé que des surprises étaient possibles.
Mais ne devrions-nous pas consacrer un peu de temps à la nature du vote Bayrou ? Certains le voit comme un retour au vote ancien de la troisième force, d’autres comme un vote, qui pour nombre d’électeurs, aurait le mérite de casser le système.
Du coté des antilibéraux, les sondages placent tous les candidats autour de 2%, l’échec de la candidature unitaire pèse sur toute la gauche. Pourtant le succès des meetings précédents St-Ouen comme de ceux de la campagne Bové prouvent qu’unis nous pouvions peser dans le paysage politique.
Tout laisse à penser qu’une candidature unitaire aurait donné du sens, d’autant que depuis le début nous aurions pu être sur la bataille d’idées et être plus sur le terrain, dégagés de l’épuisante bataille des parrainages
L’échec à gauche est marqué par l’absence de projet, la candidature Royal semble être tombée dans son propre piège.
Quelles peuvent être les conséquences de cette situation, quel rôle pouvons-nous jouer à travers la présidentielle et aussi à travers les législatives ?
Pour en revenir aux engagements de Montreuil, nous pouvons dire que nous avons respecté les décisions, une coordination nationale a été mise en place, cette coordination donne un place au collectifs dont ils étaient privés du fait de la composition du CIUN, un comité de campagne distinct a organisé les meetings, nous avons gardé une liaison permanente avec celui-ci, tout en séparant les réunions de la coordination des CUALS de celle de la campagne Bové située l’après midi ( même si les débats ne pouvaient être totalement étanches, était-ce d’ailleurs souhaitable ?) Et nous avons décidé de cette réunion les 17 et 18 mars, compte tenu de la situation de la campagne,
Quant à l’appréciation sur la campagne, la dynamique populaire qu’elle crée, sur ses qualités, ses limites c’est à partir de nos discussions que nous l’apprécierons.
III) Et demain ?
Si José Bové obtient ses parrainages, quelle campagne mener ? Faut-il comme certains d’entre nous le préconisent, être neutre envers tous les candidats, ce qui est la réalité de la position d’une partie des collectifs mais en sachant que d’autres nombreux se sont engagés en tant que tels dans la campagne ? Ou laisse-t’on les collectifs mener campagne sous la forme qu’ils ont décidé ?
Faut-il mener campagne si nous n’avons plus la candidature de Bové, une campagne de soutien aux candidats antilibéraux qui se présentent ? Une campagne d’une autre nature qui permette aux collectifs d’exister politiquement durant les présidentielles. Ou la campagne doit-elle maintenant se déplacer sur le terrain des législatives ?
Notre objectif n’est-il pas de casser les mécanismes constitutionnels et de permettre l’émergence dans la vie politique de ceux qui n’ont pas la parole ? Nous avons évoqué l’insurrection citoyenne, avons-nous vraiment déployé cette volonté ?
Textes issus de la réunion des 17 et 18 mars
lundi 19 mars 2007
La réunion s’est tenue à la Bourse du travail départementale de Bobigny.
Un compte rendu plus factuel sera réalisé par le secrétariat rapidement :
Entre Paris et les diverses régions, départements, localités, les participants ont été entre 280 et 300. Nous avions reçu plus de cinquante annonces de l’impossibilité de se déplacer pour des raisons financières et du fait des manifestations anti-EPR.
Nous avons en caisse 1900 euros, issus de la participation des collectifs d’Ile de France qui serviront à un remboursement partiel des frais de voyages.
Les conclusions non écrites au débat sur les législatives seront rediscutées en secrétariat et des propositions faites.
Vous trouverez ci-dessous :
– 1. Le texte d’appréciation sur la campagne pour la présidentielle de José Bové
– 2. Le texte d’orientation commun pour les législatives
– 3. Le calendrier des prochaines réunions de la coordination nationale
1. Pour la présidentielle :
Pendant la campagne électorale, les attaques de la droite continuent et s’amplifient : plans de licenciements massifs, expulsions des sans papiers, attaques contre le Code du travail, mesures et projets racistes au nom d’une « identité nationale » qui accentue le rapprochement avec le Front National, etc.
La percée de Bayrou, fausse nouveauté, vrai faux nez de la droite, met en évidence le rejet de l’Etat-Sarkozy, comme la méfiance envers la candidate du PS.
L’absence d’alternative à gauche ouvre ainsi la voie à toutes les aventures ou compromissions.
Le Pacte présidentiel de Ségolène Royal ne répond pas aux exigences de la situation.
Tout cela montre la nécessité d’une alternative unitaire de transformation sociale à même de répondre aux aspirations populaires exprimées dans les luttes et dans les urnes ces dernières années.
La réunion nationale des collectifs unitaires, tenue à Bobigny les 17 et 18 mars 2007 :
– regrette que la gauche antilibérale ne soit pas parvenue à se rassembler pour l’élection présidentielle ;
– constate que la responsabilité en incombe aux choix faits successivement par les directions de la LCR et du PCF de diviser le processus unitaire ;
– souligne que la candidature de José Bové, soutenue par des forces diverses, est légitime, qu’elle suscite une dynamique militante et citoyenne, et représente un élément de la construction de l’indispensable rassemblement de la gauche antilibérale ;
– dénonce la manœuvre anti-démocratique des partis qui ont donné des consignes pour empêcher le parrainage d’autres candidats que les leurs.
La réunion nationale constate que les collectifs locaux de la gauche antilibérale ont fait des choix divers pour le 1er tour de l’élection présidentielle. Il leur appartient de définir les modalités de leur engagement dans la période électorale.
Elle mandate la coordination nationale pour maintenir me cadre commun des collectifs et prendre toutes les initiatives possibles en vue de favoriser le rassemblement de la gauche antilibérale.
2. Pour les législatives :
2.1 Notre objectif est de présenter une candidature unitaire de la gauche antilibérale dans le maximum de circonscriptions sur la base de textes de référence :
– Texte Ambition-Stratégie...
– Ce que nous voulons (les 125 propositions).
– La précision, qui figure dans l’introduction du texte adopté le 21 janvier, (extrait) :
4) La candidature de Ségolène Royal qui accentue le caractère social-libéral de la campagne du PS, tourne le dos aux exigences populaires et aggrave le divorce entre la colère sociale et l’offre politique. Son orientation sociale-libérale démontre l’impossibilité d’envisager un accord gouvernemental ou parlementaire avec le PS. Sa direction joue sur le réflexe « ne pas recommencer le 21 avril 2002 » et tente de culpabiliser les électeurs anti-libéraux, alors que ce n’est pas la multiplication des candidatures anti-libérales en 2002 qui a causé l’échec de Jospin, mais le bilan de la gauche plurielle.
2.2 Ces candidatures unitaires de la gauche antilibérale ne peuvent résulter que d’accords politiques entre collectifs, comités, réseaux militants (dans leur diversité) et les partis politiques, courants et sensibilités.
2.3 Nous proposons que ces candidatures soient présentées sous un label national commun.
2.4 En cas d’impossibilité d’accord, les coordinations départementales, avec les collectifs locaux, décideront souverainement de présenter ou soutenir des candidats porteurs de nos exigences, en évitant autant que possible de situations d’affrontements entre antilibéraux.
2.5 Nous proposons que les candidatures présentées par les collectifs et les coordinations soit rattachés à l’Association nationale de financement SEGA.
Rappel : un stage de formation aux problèmes des législatives est fixé, pour la région parisienne, le 31 mars. Il faut s’inscrire au plus tôt de façon à l’utiliser au mieux, à l’adresse du secrétariat : Ausecretariat AT ras.eu.org
3. Au sujet du calendrier et de la préparation des assises
Propositions du secrétariat, adoptées.
3.1 Le calendrier des coordinations.
Il nous semble nécessaire d’ajuster le calendrier afin de tenir compte des conditions de l’activité militante durant les mois qui viennent.
Nos propositions se formalisent sur les dates suivantes :
– Le 28 avril (ou les 28 et 29), une coordination de bilan de la présidentielle après le premier tour, permettant en même temps de traiter des questions de répartition des circonscriptions pour les législatives avec les autres forces antilibérales.
Cela peut évidemment permettre de bâtir des coopérations renforcées pour mener à bien les campagnes locales pour les législatives
La date de dépôt des candidatures est le 11 mai.
– Le 23 et 24 juin :
Bilan des deux séquences électorales et
Discussion des perspectives précises pour les Assises.
Le secrétariat :
Il est provisoire et il est donc toujours utile, en lien avec des coordinations, d’en prévoir le renforcement numérique.
Il doit se charger en lien avec les coordinations régionales et départementales des moyens d’information et de discussion en vue de préparer les échéances.
Le site www.alternativeunitaire2007 doit être utilisé pour toutes les questions au sujet des législatives.
3.2 La préparation des Assises, pour l’automne
Il n’a pas semblé au secrétariat qu’il soit possible de préparer très activement les Assises avant la fin des deux séquences électorales, présidentielle et législatives .
Nous proposons donc que tout cela soit préparé en deux temps :
– Qu’un groupe de travail soit désigné lors de la coordination de bilan après la présidentielle (les 28 et 29 avril) et
– Que celui-ci présente ses propositions avant la coordination suivante, afin de préciser en juin les derniers éléments de la préparation et de l’ordre du jour des Assises.
Dans l’immédiat, il doit être fait par le secrétariat un premier recensement des contributions en vue des Assises.