Léonce Aguirre – Quel sens peut-on donner aux résultats de ces élections législatives ?
Francisco Louça - Depuis trois ans, le gouvernement de coalition de droite a imposé une politique qui a conduit à une crise sociale, dont la donnée la plus visible est la plus grande coissance du taux de chômage dans l’Union européenne. Or, le pays est socialement très vulnérable, les pauvres représentent près de 20 % de la population et la majorité des chômeurs ne reçoivent aucune allocation. Le vote indique une volonté de l’écrasante majorité de la population de battre le gouvernement de droite qui a mené une telle politique.
Quelle est la progression du Bloc de gauche ?
F. Louça - Lors des dernières élections législatives, le Bloc avait recueilli 2,9 % des voix, ce qui traduisait une petite croissance de son influence après cinq ans d’existence. Le Bloc recueille aujourd’hui nationalement 6,5 % des suffrages, passant de 150 000 à 364 000 voix. Il a huit élus, quatre hommes et quatre femmes, et peut-être une neuvième. Nous avons quatre élus à Lisbonne (+2), deux à Porto (+1) et deux à Setubal, la banlieue ouvrière de Lisbonne (+2). Cette progression concerne l’ensemble du pays et elle est particulièrement forte dans les quatre plus grandes villes (Lisbonne, Porto, Cintra et Braga, où le Bloc dépasse à chaque fois le Parti communiste). Ce dernier remonte d’un demi-point et obtient un résultat national de 7,5 %.
Quant à la composition sociale des électrices et des électeurs du Bloc, il polarise une part importante de l’électorat jeune (où il arrive en troisième position) et, contrairement aux élections précédentes, il bénéficie d’un vote populaire dans l’ensemble du pays. Cela traduit l’écho des campagnes du Bloc contre la guerre, contre la politique d’austérité du gouvernement de droite.
Quelles initiatives le Bloc va-t-il prendre dans les semaines qui viennent ?
F. Louça - Nous avons indiqué lors de la soirée électorale que nous avions deux priorités :
– relancer les propositions que nous avons défendues pendant la campagne électorale contre le chômage, contre les délocalisations, contre les fraudes des faillites d’entreprises, pour la lutte contre la corruption et pour la levée du secret bancaire, pour une politique fiscale qui soit la base d’une redistribution des richesses et d’une justice sociale ;
– prendre une initiative sur la question de l’avortement, qui est toujours interdit au Portugal, ce qui entraîne des procès de femmes qui, même s’ils ont souvent abouti à des acquittements, témoignent d’une vulnérabilité sociale vis-à-vis d’une loi répressive. Nous allons proposer un référendum populaire pour soumettre au vote populaire un projet de loi pour le droit à l’avortement, et nous nous donnerons les moyens pour le présenter tout de suite, car la défaite de la droite rend le moment propice pour prendre une telle initiative.
Propos recueillis par Léonce Aguirre