Tous les salariés, du public comme du privé, dès qu’ils feront des heures supplémentaires déclarées, seront concernés par la contre-réforme en cours ; les salariés à temps partiel pour les heures complémentaires effectuées dans la limite des 10 % du temps travaillé (au maximum trois heures par semaine) ; et pour les cadres au forfait les jours en sus des 218 jours. Les salariés ne payeront pas certaines cotisations de Sécu sur ces heures supplémentaires : entre 2,2 euros et 1,7 euro par heure, plus un crédit d’impôt d’un montant compris entre un tiers et un quart de cette somme. Par exemple, un smicard devra travailler près de 20 heures supplémentaires par mois pour avoir un surcroît de salaire égal à ce qu’il aurait touché avec une augmentation du Smic de 5 %. Et encore, si son patron lui fait effectuer ces heures supplémentaires et les déclare !
La seule vraie évolution est d’avancer d’un an l’application de la majoration de 25 % des heures supplémentaires dans les établissements de moins de vingt salariés (au lieu des 10 % actuels). Combien de salariés et d’heures supplémentaires sont-ils concernés ? Difficile de le savoir exactement, mais moins d’un cinquième, c’est certain. Les patrons, sans travailler plus, gagneront plus, eux aussi : de 0,5 euro à 1 euro par heure supplémentaire et, dans les PME, les exonérations de cotisations compenseront le relèvement de la majoration salariale de 10 à 25 % pour tous les salaires n’excédant pas les 2 000 euros brut par mois. Le patronat se satisfait de ces mesures, puisqu’elles lui rapportent sans faire d’effort. Et le Medef se félicite de la « prise de conscience d’un coût du travail trop élevé ». Mais ce qui est insupportable, c’est le coût des profits patronaux !
La propagande sur le niveau des salaires et des « charges sociales » bat son plein. Contre le déferlement médiatique, il faut répéter, sans cesse, que les cotisations sociales sont du salaire que les salariés touchent quand ils sont malades, en retraite, etc. Ces cotisations ne sont jamais remboursées intégralement aux caisses concernées. Quand les cotisations sociales diminuent, le salaire diminue, mais cela ne se voit que plus tard. Surtout, cela sert de prétexte à toutes les « réformes » libérales de la santé ou des retraites... au nom du fameux « trou de la Sécu ».
Ces nouvelles exonérations, d’un montant prévu de 6 milliards d’euros, vont s’ajouter à toutes les autres, mises en place ces quinze dernières années : on arrivera à un montant annuel compris entre 25 et 30 milliards d’euros. La part de ces milliards, qui est payée par l’État aux caisses, est financée par l’impôt ! C’est-à-dire que les salariés vont payer, avec leurs impôts directs et indirects (TVA), ces exonérations. C’est un marché de dupes évidemment. Pas pour les patrons qui ont tout bénéfice dans l’affaire : le coût de travail diminue et leurs profits augmentent.
Cette réforme se met en place au moment où les salariés de l’usine Kronenbourg d’Obernai (Bas-Rhin) sont en grève pour refuser d’être obligés d’effectuer 48 heures par semaine, et pour l’embauche des intérimaires. En effet, au-delà des slogans électoraux, pour travailler plus, il faut, d’une part, que le patron le décide et, d’autre part, être en mesure, physiquement et moralement, de le faire, ce qui n’est pas toujours évident quand on connaît l’intensité du travail dans la plupart des entreprises aujourd’hui. La CGT, la CFDT et la CGC, dans un communiqué commun, estiment que cette mesure va accroître les inégalités sans garantie pour l’emploi. Mais ce qui doit être à l’ordre du jour, c’est une mobilisation pour une augmentation de 300 euros pour tous et un Smic à 1 500 euros net.