27 avril
Youssef Chahed refuse les 20% de la production pétrolière revendiquées par les protestataires de Tataouine
http://www.businessnews.com.tn/tataouine-youssef-chahed-refuse-les-20-de-la-production-petroliere-revendiquees-par-les-protestataires,520,71906,3
Le chef du gouvernement refuse catégoriquement les 20% de la production pétrolière que revendiquent les protestataires. Les manifestants ont revendiqué, entre autres, que 20% de la production pétrolière soit consacrée au développement dans la ville de Tataouine.
Le chef du gouvernement, qui annonçait ce matin des mesures en faveur de la région, a également refusé de voir de nouveau les protestataires au siège du gouvernorat à Tataouine. Il a mandaté pour les rencontrer les ministres des Affaires sociales et le ministre (Ennahdha) de l’Emploi.
27 avril
Tataouine : La tension est à son comble, Youssef Chahed évacué des locaux du gouvernorat
http://www.businessnews.com.tn/tataouine--la-tension-est-a-son-comble-youssef-chahed-evacue-des-locaux-du-gouvernorat,520,71891,3
La tension est à son comble en ce moment même à Tataouine. En visite ce jeudi 27 avril 2017 dans la région, le chef du gouvernement, Youssef Chahed, a dû être évacué des locaux du gouvernorat où il annonçait 64 mesures prises en faveur de la région.
Le chef du gouvernement a annoncé le recrutement, aujourd’hui même, de 500 jeunes de Tataouine dans une société environnementale avec une promesse d’employer 2 000 autres sur les prochains mois.
Les mesures annoncées par Youssef Chahed comprennent également le financement de plus de 1 000 projets, l’ouverture d’un concours pour le recrutement de cadres supérieurs à la SITEP, ainsi que de nombreuses mesures visant à améliorer les conditions agricoles dans la région, l’amélioration de l’infrastructure, des transports à travers notamment l’ouverture de l’aéroport de Remada aux vols civils.
Le chef du gouvernement a annoncé d’autres mesures pour la formation professionnelle, dans le domaine de la santé et notamment la réhabilitation et l’extension de l’hôpital de Tataouine, dans les domaines industriel, commercial, administratif et culturel ainsi que la préservation de l’environnement.
Ces mesures n’ont pas eu l’accueil escompté. Les manifestants de Kamour se sont rués sur le siège du gouvernorat appelant à l’escalade.
En ce moment toute la ville est en grève générale, les commerces sont fermés et des roues en feu bloquent les routes…
28 avril
Visite de Youssef Chahed à Tataouine à la tête d’une importante délégation ministérielle à Tataouine sous tension
http://lapresse.tn/component/nationals/?task=article&id=130076
Plus d’un mois après le début des protestations et des sit-in à Tataouine, le chef du gouvernement, Youssef Chahed, s’est rendu hier dans la ville accompagné d’une importante délégation ministérielle (l’Industrie, l’Environnement, les Domaines de l’Etat et les Affaires foncières, l’Equipement, l’Emploi, l’Energie, les Affaires sociales, l’Economie numérique, l’Investissement et bon nombre de conseillers).
Avec des milliers de jeunes à quelques encablures des champs pétrolifères, le déplacement était délicat et le gouvernement Chahed, traînant comme un boulet les promesses non tenues des gouvernements qui l’ont précédé, se devait de répondre à cette détresse d’une ville dont l’économie ne tourne qu’autour des sociétés pétrolières et des entreprises de services y afférents.
A Tataouine, le taux de chômage avoisine les 27%, et 36% chez les diplômés du supérieur, des taux largement supérieurs à la moyenne nationale. Principalement, Youssef Chahed est venu apaiser la tension et négocier avec les protestataires.
Signe de tension, les négociations de la veille jusqu’à tard dans la nuit pour tenter d’annuler la grève générale ont échoué. Hier, Tataouine avait des allures d’une ville morte. La route menant au gouvernorat n’est pas facile à traverser, le convoi formé d’une vingtaine de véhicules a même emprunté une piste poussiéreuse pour contourner la route barrée par des jeunes en colère. La tension est palpable. En attestent les graffitis sur les murs de la ville qui parlent de « révolution du pétrole ». Plus tôt, en l’absence des journalistes accompagnant la délégation ministérielle, le chef du gouvernement s’est rendu à l’Iset de Tataouine pour y rencontrer des représentants du « Mouvement de Kamour », mais plus d’une heure après, Youssef Chahed sort bredouille, sous les sifflets. « En réalité, nous n’avions qu’un seul point de désaccord, ce sont les 20% des revenus du pétrole qu’ils réclament », nous explique une source proche de Youssef Chahed. Pendant le déjeuner, le chef du gouvernement aurait déclaré à ses proches : « Si cela pouvait résoudre le problème j’aurais signé tout de suite, sauf s’ils se contentaient de ces 20% de l’Etat central, ils perdraient au change ». En effet, le taux d’investissement de l’Etat par habitant à Tataouine dans le plan de développement 2016-2020 est de 4.500 dinars contre 1.200 dinars pour Tunis par exemple ; elle est de loin la première région favorisée.
Malgré les 64 mesures annoncées, dont une hausse de 5 millions de dinars du budget de la responsabilité sociale des entreprises pétrolières, l’accueil au siège du gouvernorat n’était guère meilleur. Le chef du gouvernement a beau rendre hommage aux résistants de la ville qui ont mené la bataille de Remtha en 1915 contre le colonisateur, le discours n’a pas séduit. « Nous refusons toutefois le régionalisme, quoi qu’il arrive nous devons rester unis », a-t-il prévenu.
A la fin de son allocution, il est chahuté par quelques-uns qui se mettent à scander « Choghl, Horria, Karama Watania » (travail, liberté et dignité). Ils prennent à partie l’équipe gouvernementale et les députés de la région, les accusant de trahir Tataouine et estimant que les mesures décidées ne sont pas suffisantes. (…)
Devant cette réunion qui dégénère, Youssef Chahed hésite, ne sachant pas s’il doit réagir ou quitter la réunion. Finalement, il décide de quitter les lieux avant de remettre officiellement des micro-crédits à plus de 300 jeunes porteurs de projets. Dehors devant le siège du gouvernorat, des centaines de jeunes chauffés à blanc, que la police arrive difficilement à contrôler, attendaient le chef du gouvernement pour le siffler. (…)
29 avril
Les négociations entre les sit-inneurs et le gouvernement (représenté par un ministre Ennahdha) ont pris fin samedi 29 avril avec le refus des premiers d’accepter la proposition gouvernementale de recruter immédiatement 150 employés dans les sociétés pétrolières et 350 dans un intervalle de trois mois, et l’augmentation des allocations du programme de responsabilité civile à 30 millions de dinars.
30 avril
Tataouine : L’armée et la Garde nationale évacuent 700 employés des compagnies pétrolières
http://www.webdo.tn/2017/04/30/tataouine-larmee-et-la-garde-nationale-evacuent-700-employes-des-compagnies-petrolieres/
Des unités de l’armée et de la garde nationale ont escorté hier, samedi 29 avril 2017, 86 voitures et 10 bus transportant près de 700 ouvriers des compagnies pétrolières se trouvant dans le désert de Tataouine.
Selon Mosaique fm, ils ont été transportés à l’entrée de la ville.
Les sit-inneurs de la région ont assuré l’évacuation des ouvriers dans les meilleures conditions, ajoute la même source.
Rappelons que le Chef du gouvernement a décidé hier de limoger le gouverneur Mohsen Ben Ali dans le cadre des changements effectués suite à la visite de la délégation gouvernementale jeudi à Tataouine.
2 mai
Sit-in El Kamour : Les propositions du gouvernement sont humiliantes !
http://www.businessnews.com.tn/sit-in-el-kamour--les-propositions-du-gouvernement-sont-humiliantes,520,71980,3
« Les propositions faites par le gouvernement sont au dessous du niveau demandé et sont carrément humiliantes ! », c’est ce qu’a déclaré Mongi Miiz, membre de la coordination du sit-in d’El Kamour, près de Tataouine, le 2 mai 2017.
Le gouvernement, représenté par Imed Hammami, ministre (Ennahdha) de l’Emploi et de la Formation professionnelle, a proposé (le 29 avril) l’embauche immédiate de 150 personnes et de 300 autres personnes dans les 3 mois qui arrivent.
M. Miiz a expliqué que les revendications des sitinneurs consistent à employer un membre de chaque famille, à savoir 4 000 personnes. Il a ajouté que la porte du dialogue reste ouverte avec le gouvernement.
7 mai
Tataouine - Les manifestants poursuivent leur sit-in pour faire pression sur le gouvernement
http://www.businessnews.com.tn/tataouine-les-manifestants-poursuivent-leur-sit-in-pour-faire-pression-sur-le-gouvernement,520,72085,3
Des citoyens de Tataouine ont organisé aujourd’hui, dimanche 7 mai 2017, une manifestation pour soutenir le sit-in d’El Kamour.
Les manifestants ont affirmé qu’ils maintiennent leur sit-in jusqu’à la réalisation de leurs revendications et leurs demandes. « Nous voulons que les réponses du gouvernement soient à la hauteur de nos protestations », indique l’un des manifestants en s’adressant au gouvernement.
12 mai
La résistance se radicalise malgré les intimidations
Le sit-in d’El Kamour se poursuit depuis 18 jours. Installé entre un champ pétrolier et le chemin principal qui relie les puits de pétrole au reste du pays, le sit-in, fortement contesté par le pouvoir et les médias, revendique la création de 3 000 emplois et d’un fond régional de développement.
Au moment où les sociétés pétrolières menacent de partir, les négociations entre les sit-inneurs et le gouvernement ont pris fin samedi 29 avril avec le refus des premiers d’accepter la proposition gouvernementale de recruter immédiatement 150 employés dans les sociétés pétrolières et 350 dans un intervalle de trois mois, et l’augmentation des allocations du programme de responsabilité civile à 30 millions de dinars.
Dimanche 7 mai 2017, quelques milliers d’habitants se sont rassemblés à Tataouine en soutien aux sit-inneurs d’El Kamour contre la diabolisation médiatique et les pressions politiques. Reportage.
De loin, les tentes blanches d’El Kamour évoquent un No DAPL des indiens d’Amérique du Nord luttant contre le colonialisme pétrolier. À une centaine de kilomètres de Tataouine, au milieu de nulle part, sous un soleil de plomb, plus de 50 grandes tentes ont été dressées autour d’un immense drapeau national. Nous avançons difficilement sur une terre rocheuse vers les visages mats des fils des « fellagha » du Sud. Le slogan « Résistance jusqu’à la victoire » [الرخ لا] domine le décor, qui rappelle les sit-ins occupant les margelles confisquées de l’or noir en Afrique ou en Amérique Latine. Comme les Algériens, les Boliviens, les Equatoriens ou les Péruviens, les Tunisiens du Sud posent à leur tour des questions longtemps éludées par le pouvoir politico-médiatique : richesses naturelles ? Pour qui ? Pourquoi ? Et comment ?
En ce jeudi 4 mai, nous sommes au 12e jour de l’occupation d’un des carrefours-clés de l’industrie fossile en Tunisie.
Tout a commencé le 5 avril, quand les employés des sociétés pétrolières de Tataouine ont observé une grève générale sectorielle en soutien aux 24 ouvriers licenciés par la compagnie pétrolière canadienne Winstar. Après plusieurs négociations, la compagnie off-shore a refusé de réintégrer les ouvriers et n’a pas répondu aux appels des habitants à un engagement social sérieux dans la région. « C’est la goutte qui a fait déborder le vase », se rappelle Mahmoud Abdelnour, 25 ans, commerçant du centre-ville de Tataouine.
Le 8 avril, il était là quand une dizaine de jeunes chômeurs ont allumé la mèche de la contestation populaire locale. Après un sit-in modeste de quelques dizaines de chômeurs au cœur de la ville, 64 sit-in ont occupé les routes de Tataouine empruntées par les camions de pétrole. « Maintenant, ils sont près de 1 200 sit-inneurs à El Kamour et autant dans la ville », affirme Mahmoud.
Mahmoud a suivi de près l’évolution du mouvement. « Ça a été un mois chargé en mobilisations et en réflexions sur ce que nous devons revendiquer, auprès de qui et par quels moyens. Dès les premiers jours, nous avons pensé à occuper El Kamour car nous savions déjà que le Nord ne nous écouterait que sous pression. Mais faute de moyens, l’occupation d’El Kamour a été retardée jusqu’au 26 avril. En concertation avec les habitants, les chômeurs ont décidé de passer à l’acte », explique Mahmoud, qui assure, avec d’autres membres, la collecte de l’argent et des réserves alimentaires pour le sit-in, auprès de ceux qui soutiennent le mouvement à Tataouine, à Tunis et au sein de la diaspora tunisienne.
Autour d’une grande citerne d’eau, un groupe de sit-inneurs s’est réuni pour adoucir la chaleur caniculaire du désert. Certains lavent leur linge, d’autres discutent des dernières nouvelles en provenance de la ville. « Les négociations ont pris fin samedi 29 avril avec le ministre de l’Emploi. Nous sommes en train de réfléchir en commun aux prochaines étapes », explique Saddem Katouch, 26 ans, diplômé en soudure et chômeur depuis 6 ans. Le manque d’expérience, le grand nombre des sit-inneurs et la diversité des attentes n’ont pas empêché le sit-in d’El Kamour d’avoir une discipline infaillible.
Les sit-inneurs ont élu des coordinateurs qui ont élu à leur tour un porte-parole.
Chaque décision est discutée collectivement en assemblée où les coordinateurs relaient les propositions des sit-inneurs. Chaque décision est prise après un vote effectué au niveau de chaque représentation du sit-in puis au niveau de la coordination générale. « Nous essayons de rester transparents et de respecter la volonté de chaque sit-inneur. Cela est possible à travers les votes et les concertations entre nous. Nous passons tout notre temps à discuter de tous les détails de nos demandes et des solutions que nous proposons au pouvoir », explique Khelifa Bouhaouach, 26 ans, membre de la coordination.
Dans la cour du sit-in, Fethi Boufalegha, 22 ans, s’immisce dans la discussion en proposant un thé sous sa tente. « Tout ce que vous avez vu à Tataouine, depuis les routes, les écoles, les postes, les administrations jusqu’au terrain de foot ou au souk, tout a été bâti par les habitants eux-mêmes. Nos parents et nos frères, ouvriers à l’étranger, ramènent depuis des décennies des devises. Ce n’est pas de l’argent que nous demandons mais le développement. Le pétrole, le sel, le phosphate, l’eau et toutes les richesses naturelles doivent revenir à la Tunisie, alors que nous sommes convaincus que nos richesses sont confisquées par une élite nationale corrompue par les capitaux étrangers », dénonce Fethi.
Comme beaucoup de ses camarades, il suivi des formations professionnelles liées aux métiers des forages pétroliers. En 2012, il décroche un diplôme en pompage et un permis de conduire des semi-remorques. « Les jeunes ici n’ont qu’une seule ambition, travailler dans le désert [les sociétés pétrolières], mais les décideurs préfèrent recruter des étrangers ou des diplômés pistonnés de Sfax, de Tunis et des grandes villes. Sur des milliers de postes, seules quelques centaines sont attribués aux jeunes de Tataouine », dénonce Abdelhalim Katouch, 26 ans, sit-ineur.
Sous la tente, Fethi et ses compagnons sirotent le thé et se partagent des cigarettes fraîchement venues de la ville. La discussion porte sur les négociations et les leçons à tirer des erreurs du passé. « Il ne faut rien laisser au hasard ! », s’exclame l’un des chômeurs, « nous devons écrire tous les détails et ne signer qu’une fois que l’accord est clair et engageant ». En 2013, comme dans la plupart des régions, un sit-in « Massir » a eu lieu suite à l’assassinat de Mohamed Brahmi. « Après des mois d’occupation de la place centrale de la ville, on nous a baratiné avec une dizaine de postes provisoires dans un chantier appartenant à Bouchamaoui. Les contrats sans couverture sociale ont pris fin au bout de six mois », explique Fethi avant d’assurer que « les barons du Prix Nobel n’auront plus de décisions à prendre sur nos revendications. Ni société civile, ni partis politiques, ni UGTT ne négocieront à notre place », s’exclame-t-il.
Le soir approche et le rafraîchissement de l’air apaise le sable brûlant. Torses nus, deux jeunes préparent le dîner alors que d’autres se préparent à la réunion de la coordination. « Les gens d’El Kamour sont conscients des enjeux sécuritaires et politiques. Nous avons un règlement intérieur infaillible et nous nous partageons les tâches de garde et de contrôle que nous assurons jour et nuit pour protéger le sit-in et le pays. Nous documentons tous les dons venus en soutien et nous avons une comptabilité transparente. Nous sommes ici en tant que contestataires pacifiques et patriotiques, pour améliorer le niveau de vie de tous les Tunisiens », insiste Khelifa, avant que Tarek Hadded ne conclue : « avec le soutien des habitants de tout le Sud et d’ailleurs, les sit-inneurs ne reculeront pas. Non seulement le sit-in se poursuivra mais en plus nous allons avancer vers le désert ».
48 heures après le discours de BCE, la volonté des sit-inneurs est toujours la même. Comme le pouvoir choisit le dialogue de sourds, la résistance se radicalise encore plus…