“Nous sommes aux anges”. La Cour internationale de justice (CIJ) – plus haute juridiction des Nations unies – leur a donné raison, et la délégation mauricienne est sur un petit nuage, comme l’exprime Sateeaved Seebaluck, conseiller du Premier ministre mauricien sur ce dossier, cité par L’Express, le principal quotidien de l’île. “Cet avis consultatif est clair et presque unanimement en notre faveur”, a-t-il précisé.
Si l’avis de la CIJ n’est en effet pas contraignant, il revêt un caractère hautement symbolique, et constitue un coup dur diplomatique pour le Royaume-Uni, désormais sous pression.
En 1965, trois avant son indépendance, Maurice avait été forcée de céder au Royaume-Uni sa souveraineté sur les îles Chagos, un archipel stratégique de l’océan Indien. Près de cinquante ans plus tard, la CIJ a estimé que ce détachement était illicite. “L’Assemblée générale des Nations unies a eu l’éclairage qu’il faut pour mener la décolonisation à son terme”, a estimé l’ancien président mauricien sir Anerood Jugnauth, qui s’est jeté de tout son poids dans cette affaire, rappelle L’Express.
2 000 Chagossiens expulsés
À l’époque, la séparation de l’archipel (de 55 îles, dont seules trois sont habitées) s’était suivie de l’expulsion d’environ 2 000 Chagossiens vers l’île Maurice et les Seychelles. Lundi, certains d’entre eux ont manifesté leur joie de pouvoir enfin y retourner. Liseby Elysé, qui en septembre 2018 avait apporté un témoignage émouvant devant la CIJ, a déclaré :
Je me sens très bien, je vais être capable de retourner dans mon île au bout de cinquante ans”.
En pleine guerre froide, le Royaume-Uni avait loué aux États-Unis la principale île, Diego Garcia, pour qu’ils puissent y installer une base militaire. Celle-ci revêt toujours une importance stratégique pour les puissances britanniques et américaines, ce qui fait craindre aux Mauriciens que le Royaume-Uni risque de rechigner à faire appliquer l’avis de la CIJ. Cette base eut par exemple un rôle majeur dans les années 2000 lors des conflits en Irak et Afghanistan.
“Aujourd’hui […] on a gagné un combat collectif. Mais attention, on n’a pas encore gagné la guerre elle-même”, prévient Nad Sivaramen, le directeur de L’Express, dans son éditorial.
Avec une Grande-Bretagne qui traverse, avec le Brexit, une période difficile, ayant elle-même des soucis d’intégrité territoriale à gérer, il ne faut pas s’attendre à ce que les Anglais et les Américains fassent leurs valises de Diego Garcia de sitôt.”
Courrier International
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